La désinformation est aujourd’hui un phénomène courant sur les réseaux sociaux. En janvier 2024, un utilisateur de la plateforme X (anciennement Twitter) nommé @stephan95105295 a publié un message affirmant que « L’Encyclopédie de la Franc-Maçonnerie révèle que la Terre est bel et bien plate » et que des organisations comme les francs-maçons cacheraient cette vérité au public. Ce type de message, sans preuve et très spectaculaire, attire facilement l’attention. Il s’inscrit dans la logique des théories du complot, qui cherchent à convaincre les gens que le monde est dirigé par des forces secrètes. Grâce à la vitesse de diffusion d’Internet, ce genre d’affirmation peut se propager en quelques minutes, sans qu’aucune vérification ne soit faite.
L’auteur de ce message semble surtout chercher à attirer des réactions et de la visibilité. Sur les réseaux sociaux, publier quelque chose de choquant ou d’inattendu permet souvent d’obtenir plus de « likes », de commentaires et de partages. Ce comportement s’explique par la logique de ce qu’on appelle l’économie de l’attention : plus un message attire les gens, plus il est vu. L’auteur joue donc sur le plaisir de provoquer et sur le sentiment de savoir quelque chose que les autres ignorent. Comme l’a montré Pierre-André Taguieff (2005), les discours complotistes donnent à leurs partisans l’impression de “découvrir la vérité cachée”, tout en rejetant les connaissances scientifiques. Ce tweet n’est donc pas seulement une erreur : c’est un moyen de participer à un discours collectif où la remise en question de la vérité devient une sorte de jeu social.
Les caractéristiques techniques des réseaux sociaux, souvent appelé les affordances, expliquent aussi pourquoi la désinformation se répand si vite. Selon Testard-Vaillant et Zeitoun (2019), Internet a transformé chaque internaute en diffuseur d’information : n’importe qui peut partager un message sans qu’il soit vérifié. Les auteurs rappellent que les rumeurs se propagent toujours plus vite que les rectifications, car la logique des plateformes privilégie la rapidité et la popularité. De son côté, Ceylan (2023) montre que les réseaux sociaux “récompensent” les publications qui provoquent de fortes émotions : plus un contenu fait réagir (rire, colère, étonnement), plus l’algorithme le met en avant. Les messages comme celui sur la Terre plate utilisent donc ces mécanismes pour devenir visibles, même s’ils sont complètement faux. Ces exemples montrent que la désinformation n’est pas un accident, mais le résultat du fonctionnement même des plateformes : elles encouragent les messages simples, choquants et viraux, au détriment de la réflexion critique.
En somme, le tweet affirmant que la Franc-Maçonnerie cacherait la vérité sur la Terre plate illustre bien les mécanismes actuels de la désinformation. Ce genre de contenu ne cherche pas à informer, mais à attirer l’attention et à semer le doute. Les réseaux sociaux, par leurs algorithmes et leur fonctionnement rapide, renforcent cette tendance en donnant de la visibilité aux messages les plus extrêmes. Comprendre ces mécanismes, comme l’ont expliqué Testard-Vaillant, Zeitoun et Ceylan, est essentiel pour apprendre à vérifier les sources, à réfléchir avant de partager, et à garder un esprit critique face à ce qu’on lit en ligne.
Bibliographie
Ceylan, A. (2023). How Social Media Rewards Misinformation. Journal of Digital Media Studies, 12(2), 45-62. https://insights.som.yale.edu/insights/how-social-media-rewards-misinformation
Taguieff, P.-A. (2005). La foire aux illuminés : ésotérisme, théorie du complot, extrémisme. Paris : Mille et une nuits. https://doi.org/10.4000/assr.7272
Testard-Vaillant, P., & Zeitoun, V. (2019). Internet, l’autoroute de la désinformation ? CNRS Le Journal, n° 301. https://lejournal.cnrs.fr/articles/internet-lautoroute-de-la-desinformation