Et si on transformait les quartiers résidentiels en un réseau de potagers paysans?

En 2019, j'ai eu la chance de participer à une école d'été sur la décroissance à Barcelone. Ce fut pour moi l'occasion de réfléchir à d’autres façons de réaliser les grandes fonctions sociales telles que se nourrir, se loger, se vêtir, se déplacer, etc.

Les différents ateliers réalisés m'avaient alors amené à imaginer des alternatives désirables en termes de systèmes alimentaires, dont la re-paysannisation des banlieues québécoises . En effet, si au lieu de faire pousser du gazon, les banlieusard·es coopéraient avec la relève agricole, nous pourrions métamorphoser les espaces gazonnés des quartiers résidentiels en un immenses résesau de potagers cultivés par des paysan·nes . Bien que j’étais enthousiasmée par cette idée, cette vision n’était demeurée qu’au statut d’idée….

Mais quelle ne fut pas ma surprise, cette semaine, de tomber sur cet article de La Terre de Chez nous , qui présente “ Vincent Fluet, un jeune maraîcher de 32 ans, [qui] développe un modèle d’affaires original qui consiste à produire des légumes sans terre agricole. Il cultive sur des terrains résidentiels de sa municipalité à La Sarre, en Abitibi ."

Voici quelques faits saillants à retenir de l’expérience de Vincent Fluet:

• De nombreuses personnes sont prêtes à rendre leur terrain disponible

  • « Plusieurs propriétaires m’offrent de cultiver chez eux. Ils ne me chargent presque rien. Ils trouvent ça beau ce que je fais. Je pourrais en cultiver deux fois plus grand. La disponibilité du fonds de terre est là »

• C'est un modèle qui implique un faible taux d'endettement et qui peut s'adapter aux différents contextes

  • "J’ai un taux d’endettement pratiquement nul et j’estime minimalement aller chercher un chiffre d’affaires de 50 000 $. Je pense qu’une agriculture urbaine, low tech, accessible et résiliente comme la mienne a vraiment de l’avenir. »

  • "Il sélectionne les cultivars qui résistent le mieux au froid et démarre sa production dans une serre. Soucieux de limiter ses émissions de gaz à effet de serre, il utilise notamment des couvertures flottantes."

• Dans les contraintes rencontrées, il y a eu le besoin d’adaptation de la réglementation municipale et d’approvisionnement en eau

  • "Évidemment, il a dû convaincre les élus municipaux de modifier la réglementation afin de permettre l’agriculture en terrains résidentiels. L’approvisionnement plus limité en eau des résidences demeure un défi"

• Une approche écologique facile à mettre en oeuvre

  • "il compense sa pollution en achetant des crédits de carbone. Ses contenants sont réutilisés et depuis deux ans, il assure n’avoir employé aucun pesticide."

Pour l’instant il ne s’agit que d’un premier paysan qui réinvente une autre façon d’habiter nos quartiers résidentiels, mais j’y vois là une alliance plus que prometteuse pour créer de nouveaux systèmes alimentaires décentralisés, low-tech, écologiques et fondés sur la collaboration entre paysan·nes, mangeurs·euses, habitant·es et municipalités!

On pourrait imaginer de combiner ce réseau de quartiers résidentiels agroécologiques à des fiducies d'utilités sociales agroécologiques (FUSA) qui regrouperaient des infrastructures communes telles  des serres collectives, des outils ou véhicules partagés, des entrepôts et espaces de transformation collectifs.

Je ne sais pas dans quelle mesure ce premier exemple en inspirera d’autres, ou dans quelle mesure on pourrait assister à un mouvement grassroot de re-paysannisation de nos quartiers résidentiels, mais mon petit doigt me dit qu’ il y a là un terreau fertile à creuser pour les 76 personnes élues de la Vague écologiste municipale !

https://www.laterre.ca/actualites/cultures/un-agriculteur-cultive-ses-legumes-sur-des-terrains-residentiels-en-abitibi