FICHE DE CONNAISSANCE : « UN SITE DE FAKE NEWS SE FAISANT PASSER POUR LE MONDE ET BRUT »
Un article du Monde (2025) expose une campagne de désinformation menée par un faux site nommé BrutInfo, conçu pour imiter les médias français Le Monde et Brut. Le site a diffusé une fausse information selon laquelle Emmanuel Macron aurait fait construire un bunker présidentiel. Pour rendre la tromperie crédible, les auteurs ont produit une vidéo avec des images et voix générées par intelligence artificielle.
Ce cas illustre une stratégie d’usurpation médiatique où des acteurs cherchent à exploiter la confiance du public envers des marques d’information établies. Les enquêteurs ont identifié le groupe Storm-1516, lié à la Russie, comme responsable. Ce collectif est connu pour ses campagnes visant à influencer les opinions publiques occidentales en relayant des récits favorables au Kremlin.
Compréhension du cadre de désinformation
Selon Wardle et Derakhshan (2017), la désinformation consiste à créer et diffuser sciemment de fausses informations dans l’intention de tromper.
L’usage de l’IA transforme ces pratiques : les deepfakes, les voix de synthèse et les vidéos générées renforcent l’illusion du vrai. Ce phénomène correspond à ce que Woolley et Howard (2019) appellent la propagande computationnelle, soit l’utilisation coordonnée de technologies numériques pour orienter les perceptions politiques. Ici, la désinformation n’a pas seulement pour but de convaincre, mais de créer le doute et de fragiliser la crédibilité journalistique.
Processus et stratégies employées
L’opération repose sur trois dimensions principales :
Création d’un faux site imitant l’identité de médias connus ;
Production de contenus falsifiés appuyés sur l’IA
Amplification sur les réseaux sociaux, grâce à des influenceurs rémunérés ou idéologiquement engagés.
Enjeux et portée du phénomène
Même si la portée directe de cette campagne semble limitée, elle révèle une crise de confiance médiatique plus large. L’imitation des codes journalistiques rend difficile la distinction entre faits et fiction, contribuant à un désordre informationnel (Wardle & Derakhshan, 2017). Ces opérations sapent la légitimité de la presse et nourrissent la méfiance envers les institutions démocratiques.
Elles posent aussi des défis technologiques et éthiques : comment repérer les contenus générés artificiellement et réguler les plateformes sans restreindre la liberté d’expression ? La lenteur de modération des réseaux sociaux accentue la vulnérabilité du public face à ces manipulations.
Réflexion critique
Ce cas démontre que la désinformation moderne repose moins sur la simple invention de mensonges que sur le détournement de la crédibilité médiatique. Les technologies d’IA permettent une mise en scène du faux presque indiscernable, ce qui complexifie la vérification.
La lutte contre ces pratiques passe autant par la régulation des outils technologiques que par une éducation critique du public, afin de reconnaître les signes de manipulation. La vigilance citoyenne devient essentielle pour maintenir un espace informationnel démocratique et fiable.
Références
Le Monde. (2025, 3 octobre). A fake news website impersonates Le Monde and Brut. Le Monde. https://www.lemonde.fr/en/pixels/article/2025/10/03/a-fake-news-website-impersonates-le-monde-and-brut_6746062_13.html
Vosoughi, S., Roy, D., & Aral, S. (2018). The spread of true and false news online. Science,
Wardle, C., & Derakhshan, H. (2017). Information Disorder: Toward an interdisciplinary framework for research and policymaking. Council of Europe.
Woolley, S. C., & Howard, P. N. (2019). Computational Propaganda: Political Parties, Politicians, and Political Manipulation on Social Media. Oxford University Press.
