Des impacts démesurés sur le territoire - transition énergétique

Une transition énergétique mal planifiée expose le territoire à des risques importants. Le développement de la production de 150 à 200 TWh supplémentaires d'électricité d’ici 2050, comme le suggère le gouvernement Legault, pose des défis environnementaux et sociaux d’une telle ampleur qu’ils seront parfois fort difficiles, voire impossibles à surmonter.

Pour générer 200 TWh supplémentaires d'électricité au moyen d'installations hydroélectriques seulement, il faudrait plus que doubler notre production actuelle d’hydroélectricité (182 TWh), ce qui causerait de nombreux problèmes. En termes de superficie, selon le ratio actuel, il faudrait des réservoirs qui couvriraient près de 24 000 km2, souvent en territoires autochtones, soit cinquante fois la superficie de l’île de Montréal. Le potentiel réel pour harnacher des rivières est aujourd’hui limité et les cours d’eau sur lesquels il serait possible de bâtir de nouveaux barrages sont de plus en plus éloignés. Les coûts de production augmenteraient alors substantiellement. Il faudrait aménager plusieurs milliers de kilomètres de lignes à haute tension et de voies terrestres dans le pergélisol de plus en plus instable et dans des milieux naturels fragiles. Les futurs développements toucheraient le territoire du caribou dont les populations sont actuellement en déclin marqué 88.

Si cette quantité d’énergie (200 TWh) était produite à partir d’éoliennes seulement, il faudrait dix-neuf fois la capacité éolienne actuelle (10,4 TWh). Produire cette énergie (ou 80 000 MW) exigerait de déployer les fermes de vent sur environ 30 000 km2 : l’équivalent de soixante fois la superficie de l’île de Montréal 89.

On compte présentement quarante parcs éoliens au Québec 90 et de nombreux appels d’offres sont à prévoir. Or, l’installation d’éoliennes provoque déjà une résistance dans certaines communautés locales. Avec une multiplication des projets, celle-ci pourrait augmenter. Les impacts de la présence d’éoliennes sur le territoire sont assurément moindres que ceux associés à des énergies fossiles, comme les sables bitumineux de l’Ouest canadien. Cependant, bien que l’énergie éolienne soit une source renouvelable, les parcs d’éoliennes sont des infrastructures qui nécessitent l’utilisation de matériaux non renouvelables (acier, béton, etc.). Les pales ont également une durée de vie limitée, en moyenne de vingt ans, et sont pour le moment difficiles à recycler 91. La construction et l’entretien des parcs éoliens crée une pression à la hausse pour lancer de nouveaux projets extractifs. De plus, il est à noter qu’en 2017, plus de la moitié des parcs éoliens étaient de propriété non québécoise 92.

Le développement prévu par le Plan pour une économie verte, axé sur l’électrification des voitures individuelles, exigera d’importantes quantités de matière et d’énergie. Il est responsable d'une bonne partie de l’augmentation de la consommation d’énergie prévue dans les prochaines années et d’une pression accrue pour l’exploitation de mines de lithium et de graphite nécessaires à la fabrication de batteries. Le nombre de claims miniers est en hausse importante 93. Ces droits exclusifs d'exploration du sous-sol québécois ont préséance sur tout autre usage du territoire et engendrent actuellement des problèmes importants de non acceptabilité sociale  concernant l'accès et l'administration du territoire94,95.

Il ne s'agit pas ici de discréditer les énergies renouvelables, mais bien de reconnaître les limites sociales et écologiques qui s’imposent dans leur déploiement.

Les médias rapportaient récemment qu’Hydro-Québec étudiait la possibilité de réactiver la centrale nucléaire Gentilly-2. Le déploiement du nucléaire créerait d’autres problèmes : une destruction des territoires où se trouvent les gisements d’uranium, un coût élevé de production, la génération et la gestion de déchets nucléaires pour lesquels il n’existe toujours pas de solution adéquate d’entreposage , la dangerosité et le coût élevé du démantèlement des réacteurs en fin de vie. Cette option bénéficie d’une très faible acceptabilité sociale au Québec 96. Or, pour produire les 200 TWh projetés à partir du nucléaire, il faudrait construire cinquante-et-une centrales comme Gentilly-2. Voulons-nous vraiment nous engager sur cette voie?

Un développement débridé de projets énergétiques pour soutenir le développement industriel envisagé par le gouvernement aurait des impacts démesurés sur le territoire en modifiant ses usages, en affectant la qualité de l’eau et des sols, en détériorant irrémédiablement les paysages, en détruisant des habitats naturels dans un contexte de déclin de la biodiversité.

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Intégré par Joël Nadeau, le 7 décembre 2023 09:25
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7 décembre 2023

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7 décembre 2023 12:28

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