Espace Quartiers de Transition en Commun conviait citoyen.ne.s et organismes à sa 4e grande rencontre, consacrée aux croisements entre alimentation et transition socioécologique. Les participant·e·s ont été acceuilli·e·s dans les locaux de l’organisme Petites-Mains situé dans le quartier de Villeray à Montréal, le 23 mai 2024. La soirée, organisée conjointement par la Coalition montréalaise des tables de quartier (CMTQ) et le Conseil du système alimentaire montréalais (Conseil SAM) avait pour objectif de : se questionner non pas sur nos habitudes individuelles, mais sur ce que nous pouvons faire collectivement, à l’échelle des quartiers, pour assurer une alimentation durable et saine pour toutes et tous.
Panel : « Comment agir ensemble pour une transition juste en alimentation?
Animation par Joakim Lemieux (CMTQ, Coalition montréalaise des Tables de quartier) et David Kaiser (DRSP, Direction régional de la santé publique)
- Nicolas Braesch, responsable de la distribution au Dépôt, centre communautaire d’alimentation (NDG)
- Karine Bernard, citoyenne membre du Comité d’action et de réflexion pour l’autonomie alimentaire (CARAA) du Carrefour solidaire (Centre-Sud)
- Sylvain Desjardins, citoyen membre du CARAA
- Marie-Hélène Pâquet, responsable du partage des connaissances – défi alimentaire à Chemins de transition
En guise d’introduction, Dr David Kaiser nous invite à voir l’alimentation comme un levier potentiel pour une révolution socio-écologique et à considérer l’alimentation durable comme nécessitant un équilibre entre la santé planétaire et la santé humaine. La nécessité de chercher de nouvelles logiques et façons de faire qui respectent les contraintes planétaires tout en garantissant notre droit commun à une alimentation saine et durable a été mise de l’avant. En adoptant une perspective équilibrée entre les relations humaines et les relations vis-à-vis des écosystèmes, il est possible de construire un système alimentaire qui soutient une révolution écologique et sociale, qui respecte les limites de notre environnement tout en assurant le bien-être de tous·te·s.La transition vers une alimentation durable n’est pas seulement une question de choix individuels, mais un défi collectif qui nécessite une réévaluation profonde de nos pratiques alimentaires.
Lors du panel les points suivants ont été abordé:
La sécurité alimentaire et le droit à l’alimentation sont liés à la garantie d’un accès équitable à des aliments sains, locaux et issus de l’agriculture durable pour tous.te.s, et ce peu importe le revenu. Aborder la sécurité alimentaire implique de trouver un équilibre entre la lutte contre l’insécurité alimentaire et la promotion d’une alimentation locale et durable. Les banques alimentaires ne doivent pas être une solution permanente, mais plutôt une aide ponctuelle, et des solutions plus durables doivent être mises en place pour garantir un accès digne et équitable à la nourriture. Pour assurer ce droit, il est crucial, d’une part, de valoriser les métiers agricoles, et d’autre part, il est nécessaire de créer des systèmes alimentaires qui ne dépendent pas uniquement de l’aide d’urgence, mais qui assurent un accès constant à des aliments sains et locaux.
L’éducation et la sensibilisation sont des leviers essentiels pour changer notre rapport face à la transition socio-écologique et l’alimentation. Il faut sensibiliser les jeunes générations quant à l’importance de l’alimentation durable. Des ateliers éducatifs dans les écoles et des initiatives communautaires peuvent inculquer aux enfants des compétences alimentaires et une conscience socio-environnementale dès leur plus jeune âge. Qu’est-ce que c’est le territoire ? Qu’est-ce que c’est l’environnement ? Comment s’y rattacher ? Si les enfants apprennent, l’impact est, d’une part, visible, mais aussi durable.En intégrant des programmes éducatifs sur l’alimentation saine et durable dans les écoles, nous pouvons préparer une génération consciente des enjeux alimentaires et environnementaux, capable de prendre des décisions informées.
La transparence des grandes entreprises alimentaires est essentielle pour permettre aux consommateur·trice·s de faire des choix informés et responsables.Nous devons exiger plus de transparence sur les étiquettes des produits alimentaires pour savoir exactement ce que nous consommons et ainsi faire des choix éclairés et agir en conséquence.En demandant plus de transparence de la part des entreprises alimentaires, nous pouvons encourager des pratiques plus responsables et durables dans l’industrie alimentaire, permettant ainsi aux consommateurs de contribuer activement à la transition vers une alimentation durable.
Une approche plus systémique de la transition socio-écologique est de mise ! Les crises alimentaires, sociales, environnementales et économiques sont interconnectées et nécessitent une approche systémique pour être résolues de manière cohérente et durable. Une approche systémique impliquerait de revaloriser les métiers agricoles, de promouvoir des pratiques alimentaires respectueuses de l’environnement et de repenser les structures économiques pour inclure des systèmes de tarification solidaire et de redistribution des richesses. Le revenu de base garanti, l’augmentation des prestations d’aide au revenu ou encore un soutien au logement abordable sont des solutions vers un système alimentaire durable. Il est aussi de mise d’inclure les personnes concernées, soit les personnes en situation d’insécurité financière dans les discussions et la mise en action des processus vers la transition. En ce qui a trait aux fermes et aux grandes instances agricoles, bien que ce soit difficile à imaginer dans un avenir proche, il serait favorable qu’elles se transforment en OBNL afin de favoriser des besoins autres que le profit.Les structures et les dynamiques du système capitaliste ont été nommées comme un frein à une alimentation saine et durable pour tous·te·s. Malgré tout, dans l’urgence d’agir, certains panélistes évoquent une possibilité de se réapproprier des méthodes capitalistes afin de pouvoir agir en utilisant le système dominant actuel pour le repenser.
En utilisant l’alimentation comme vecteur de consensus, nous pouvons engager les communautés dans des actions collectives et concrètes qui favorisent la durabilité et la cohésion sociale. Par son caractère rassembleur et consensuel, l’alimentation peut être un point de départ pour rassembler les communautés et mobiliser autour de projets concrets visant à promouvoir une alimentation saine et durable.Des projets communautaires tels que la production locale de fruits et légumes et l’organisation de repas partagés peuvent renforcer les liens sociaux.
Atelier de discussion autour des enjeux de l'allimentation et de la transition socio-écologique
Animé par Marie-Hélène Paquet (Chemins de transition) et Audray Fontaine (TeC /Campus de la transition écologique)
Après le panel, un atelier de discussion en petits groupes a été organisé pour aborder les sujets discutés. Chaque table disposait de questions, d’une mise en contexte et de pistes de réflexion pour lancer la conversation. Voici quelques exemples des questions suggérées : « Quel est le juste prix de l’alimentation saine et durable ? », « Comment les quartiers peuvent-ils se mobiliser pour insuffler un changement ? » ou encore « Quels sont les pouvoirs d’un quartier dans le prix de l’alimentation ? »
Faire évoluer les initiatives en alimentation à échelle territoriale. Lancement d’Espace Solutions
La deuxième partie de l’événement, présentée par Marlies Trujillo Torres (TeC) et Anne -Marie Aubert (CSAM), a été dédiée à l’importance de faire évoluer les initiatives existantes en alimentation à Montréal et comment nous pouvons y contribuer collectivement.
À ce propos, nous testions avec succès une nouvelle formule de l’Espace quartiers : L’Espace Solutions, qui, inspiré du co-développement, vise à faire émerger les besoins des quartiers et de pouvoir y répondre collectivement via la mise en place d’un espace sécurisé et horizontal de partage de savoirs et d’expertises.
À chaque table, un projet:
Dans ce cadre, 4 initiatives et 4 enjeux ont été exploré.es
- Un projet d’épicerie solidaire à Ahuntsic a été analysé sous les lunettes de la mixité sociale (présenté par Daphné Le Templier, Solon)
- Les fruits défendus, projet de glanage à Montréal, se demandait comment mobiliser les personnes habitant dans les quartiers excentrés (présenté par Hugo Martorell, citoyen impliqué)
- Cultures solidaires, projet de maraîchage local et éducation, voulait explorer la question de la pérennité de leur modèle. (présenté par Véronique Larouche, Ville en vert)
- Le café des habitudes, commerce du quartier, se questionnait sur comment briser l’isolement et être soutenu quand on a déjà fait la transition écologique en tant que commerce. (présenté par Joanna Nisenbaum, propriétaire)
Conclusion : La soirée nous a permis de mettre en lumière la complexité de notre transition vers une alimentation durable et la nécessité d’agir collectivement à l’échelle des quartiers. Les discussions ont souligné l’importance d’une approche éducative et systémique pour garantir le droit à une alimentation saine et durable qui respecte les contraintes planétaires. Des exemples concrets, implantés dans les quartiers, nous ont permis de prendre conscience que de nombreuses initiatives s’engagent déjà dans cette transition vers une alimentation durable à Montréal.