La concertation régionale en développement social au Québec à la fin de 2015

Cette note présente un état des lieux de la concertation régionale en développement social (DS) au Québec à la fin de l’année 2015, tel que documenté dans le cahier de recherche 16-01 du Réseau québécois de développement social (RQDS) et de la Chaire de recherche du Canada en organisation communautaire (CRCOC).

 

Documenter la situation

Suite à l'abolition des CRÉ et aux changements politiques et administratifs qui l'ont accompagnée, le RQDS et la CRCOC ont jugé pertinent de dresser un état de la situation des démarches de restructuration en DS. Ce portrait, basé sur les témoignages des représentant·es des démarches régionales lors d'une rencontre du RQDS en octobre 2015, vise à alimenter la réflexion et les décisions des acteur·ices du DS au Québec. Ce portrait s'avère partiel, car réalisé à un moment de transition et de restructuration des démarches régionales suite à l’abolition des Conférences régionales des élus (CRÉ) et à la redéfinition de la gouvernance régionale.

Le RQDS, fondé en 2005 à la suite du Forum de développement social de 1998, regroupe des comités régionaux de développement social et vise à promouvoir une vision commune du DS au Québec.

La CRCOC, quant à elle, se consacre à la production de connaissances sur l'organisation communautaire et son rôle dans le service public et le milieu communautaire.

 

L’impact des changements politiques sur le développement social au Québec à la fin de 2015

L’analyse réalisé à partir d'un portrait par région démontre que l’abolition des CRÉ et d’autres changements politiques et institutionnels ont un impact majeur sur les démarches régionales de développement social (DS) au Québec.

L’abolition des CRÉ, la fin du financement du PAGSIS, la fusion des CSSS en CISSS/CIUSSS, les coupes budgétaires, et le recentrage des institutions publiques sur leur mission sectorielle ont fragilisé les démarches régionales de DS.

Malgré ces difficultés, les acteur·ices du DS se mobilisent pour redéfinir la concertation régionale, trouver de nouvelles sources de financement, et s’arrimer avec d’autres concertations sectorielles.

L’implication des MRC, qui sont devenues des acteur·ices incontournables du développement des territoires, est essentielle pour la légitimité de ces démarches.

En conclusion, la restructuration des démarches régionales de DS est un processus complexe qui présente des défis et des opportunités pour les acteur·ices du DS au Québec.

Auparavant

  • Rôle des CRÉ: Les CRÉ jouaient un rôle central en DS, finançant des projets et des démarches régionales de concertation. Leur abolition a un impact majeur sur le financement et la reconnaissance du DS.
  • PAGSIS: Le Plan d'action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale (PAGSIS) a structuré la concertation en DS dans certaines régions en favorisant la création d'alliances régionales et supralocales.
  • Structuration supralocale: Le DS s'organisait également au niveau supralocal, notamment dans les MRC, créant une articulation entre le local et le régional.

Période de changements

  • Austerité budgétaire: L’austérité budgétaire a entraîné des compressions et un recentrage des ministères sur leur mission sectorielle.
  • Abolition des CRÉ: L’abolition des CRÉ a engendré une perte de financement, de cohésion régionale et de reconnaissance du DS.
  • Fusion des CSSS: La fusion des centres de santé et de services sociaux (CSSS) en centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS/CIUSSS) a un impact sur l'engagement des acteur·ices du réseau de la santé en DS.
  • Transfert de responsabilités: Le transfert de responsabilités vers les MRC et les municipalités soulève des questions quant à la place de la société civile dans la gouvernance du DS.
  • Transformation de la philanthropie: La fin du financement de QEF, AE et R2 par la Fondation Chagnon et le gouvernement du Québec oblige les démarches régionales à se restructurer. La Fondation Chagnon offre un soutien transitoire aux démarches régionales en DS.

Restructuration des démarches régionales en développement social

  • Redéfinition et restructuration: Les démarches régionales en DS sont engagées dans des processus de redéfinition et de restructuration.
  • Reconnaissance: La reconnaissance des démarches régionales par les acteur·ices locaux et régionaux, ainsi que par l’État, est essentielle.
  • Consultations: Certaines régions ont mené des consultations auprès de leurs membres pour se positionner.
  • Difficultés: La restructuration se heurte à des difficultés, notamment en raison du manque de soutien technique, du retrait de l’engagement régional et de l’augmentation des responsabilités des élus sans moyens adéquats.
  • Arrimage: Un effort d'arrimage des démarches régionales en DS avec les concertations sectorielles, notamment celles liées à AE, QEF et R2, est observé.
  • Rôle des MRC: Les MRC occupent une place importante dans la réorganisation de la gouvernance du DS. L’implication des préfets est essentielle pour la légitimité des démarches de concertation.

Nouveaux profils de la concertation régionale

Quatre modèles de restructuration des démarches régionales en DS sont identifiés:

  1. Reconstruction difficile: Ce modèle transitoire caractérise les régions où la concertation est restreinte, les discussions en cours et le financement incertain.
  2. Concertation à dominante régionale: Ce modèle se caractérise par une démarche structurée autour d’un projet régional et un arrimage avec les concertations sectorielles.
  3. Concertation à dominante territoriale: Ce modèle s'appuie sur les concertations supralocales, selon le modèle de l’ATI, avec un rôle de soutien de la structure régionale.
  4. Coopérative de services en développement régional: Ce modèle se caractérise par une offre de services aux MRC, avec une gouvernance assurée par les MRC.

Discussion et conclusion

Les démarches régionales en DS font face à de nombreux enjeux dans leur réorganisation, notamment l'austérité budgétaire, la perte de reconnaissance du DS, la difficulté de l'arrimage entre les différentes concertations et le rôle croissant de la philanthropie. Malgré ces difficultés, les acteur·ices du DS font preuve de créativité pour s'adapter aux changements. Le RQDS et la CRCOC poursuivent leur veille sur l'évolution de cette restructuration.

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Portrait des régions

Abitibi-Témiscamingue

  • Le comité d'intégration de l'Alliance régionale, mis en place suite à une mobilisation en 2010, a cessé ses activités depuis la fermeture de la CRÉ.
  • Trois initiatives visent à formaliser la concertation régionale: la communauté de pratique CommunAT, le Conseil régional de développement de l'Abitibi-Témiscamingue (CRDAT) et les regroupements locaux de partenaires de Québec en Forme (QEF) et d’Avenir d’enfants (AE).
  • La publication du troisième plan d’action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale et le financement transitoire de la Fondation Chagnon influencent les décisions à prendre.
  • Le principal défi est d'obtenir la reconnaissance d'une structure porteuse et légitimée par les organisations régionales.

Bas-Saint-Laurent

  • La démarche COSMOSS, un projet d’harmonisation des fonds AE, QEF et Réunir Réussir (R2), est en cours avec un plan intégré 0-30 ans par territoire de MRC.
  • La gouvernance de COSMOSS reste inchangée, mais une planification triennale sera développée.

Capitale-Nationale

  • La Table régionale en développement social, coordonnée par la CRÉ jusqu'en 2015, a permis la mise en place de 5 comités locaux avec une approche territoriale intégrée (ATI).
  • La Ville de Québec, QEF, AE, la DSP et Centraide travaillent à la mise en place d'une vision commune du développement du milieu.

Centre-du-Québec

  • Le Comité régional en développement social Centre-du-Québec (CRDS), actif depuis 17 ans, a développé une expertise en DS et est soutenu par 29 membres.
  • Centraide Centre-du-Québec est le nouveau fiduciaire et porteur de la démarche.
  • Des consultations auprès des partenaires et des élus ont été réalisées pour comprendre leur contexte et échanger sur le rôle du DS.
  • Le CRDS souhaite ancrer l'arrimage avec les démarches locales et consolider la concertation en lien avec différents enjeux sociaux.

Chaudière-Appalaches

  • La Commission régionale en développement social, chapeautée par la CRÉ, a permis de développer un portrait, une vision et un plan d’action.
  • Un noyau dur de partenaires continue de se rencontrer et une restructuration du comité régional de DS est en réflexion.

Côte-Nord

  • Une entente administrative entre la CRÉ et l'ASSS a permis la mise en place d'un réseau d'intervenant·es en DS entre 2002 et 2011.
  • Un groupe d'intéressés travaille à la mise en place d’une organisation autonome dédiée au développement des communautés (DC) de la Côte-Nord.
  • La vision de la démarche régionale s'articule, mais des actions importantes restent à mettre en œuvre.

Estrie

  • L'Alliance estrienne pour la solidarité et l’inclusion sociale vise à se faire reconnaître comme démarche régionale de DS/DC.
  • La concertation est bien structurée au niveau supralocal avec des démarches intersectorielles et territoriales.

Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine

  • Le Réseau solidaire pour le rayonnement des territoires (RESSORT) privilégie l’ATI par MRC pour mobiliser les partenaires.
  • Le RESSORT vise l’élaboration d’une vision commune des enjeux régionaux en DS et participe aux travaux d’arrimage et d’harmonisation des fonds.
  • Le RESSORT réfléchit à sa constitution en organisme à but non lucratif ou à une entente avec un nouveau fiduciaire.

Nord-du-Québec (Jamésie)

  • Le Réseau jamésien de développement social (RJDS), soutenu par l'Administration régionale Baie-James (ARBJ), regroupe de nombreux partenaires d'action.
  • Le retrait du financement de l'ARBJ en 2015 a entraîné la perte de la permanence du RJDS.
  • Un comité de réflexion stratégique, incluant l'ARBJ, travaille sur le renouvellement des structures de concertation régionales.

Lanaudière

  • La Table de partenaires du développement social de Lanaudière, une personne morale avec un conseil d'administration composé de partenaires régionaux et territoriaux, a perdu plusieurs partenaires financiers.
  • La Table a obtenu le soutien de Centraide, de la Fondation Chagnon et du CISSS de Lanaudière.
  • La vision de la Table est d'amener les MRC à soutenir des plans de développement des communautés dans une approche intégrée.

Laurentides

  • Le Conseil régional de développement social des Laurentides (CRDSL) est composé de représentant·es des 8 tables territoriales de DS.
  • Le CRDSL bénéficie du soutien financier des préfets, du CISSS, des Centraide Gatineau-Labelle-Hautes-Laurentides et Laurentides et de député·es de la région.
  • Un travail de sensibilisation des élus reste à faire.

Laval

  • La CRÉ de Laval était responsable des dossiers liés au DS, notamment la sécurité alimentaire.
  • Suite à l'abolition de la CRÉ, la Ville de Laval crée une nouvelle direction du développement social et communautaire.

Longueuil

  • Le Comité pour la solidarité et l’inclusion sociale de l’agglomération de Longueuil (COSISAL) a été créé pour gérer la contribution du Fonds québécois d'initiatives sociales.
  • L'agglomération souhaite se doter d'une vision transversale en DS et en réussite éducative.

Mauricie

  • Le Consortium en développement social de la Mauricie regroupe des partenaires régionaux et des représentant·es des comités territoriaux de DS.
  • Centraide héberge désormais les employées du Consortium.
  • Le Consortium souhaite identifier les besoins en DS des territoires et établir un dialogue avec les villes et MRC via la Conférence administrative régionale.

Montérégie-Est

  • La CRÉ coordonnait une dizaine de comités régionaux de concertation liés au DS.
  • La Coopérative de développement régional de la Montérégie a développé un projet de démarche régionale de DS.
  • Une entente d'aide financière transitoire a été conclue avec la Fondation Chagnon pour la mise en place d'un plan d’action 2017-2020.

Montréal

  • La concertation en DS est bien implantée au niveau local grâce à l’existence de 30 tables locales de concertation intersectorielles.
  • Le Forum régional sur le développement social de l’Île de Montréal est l’instance de concertation intersectorielle régionale.
  • La concertation en DS se poursuit malgré la disparition de la CRÉ, mais des défis restent à relever pour favoriser l’arrimage entre les instances régionales sectorielles.

Outaouais

  • La région est caractérisée par des disparités socioéconomiques importantes, mais les acteur·ices du DS sont actifs historiquement.
  • La Table en développement social et en soutien au développement des communautés de l’Outaouais est en cours de création.
  • Un forum régional en DS est prévu en mars 2016.

Saguenay-Lac-Saint-Jean

  • La concertation en DS se réalisait au sein de la CRÉ jusqu’à l’automne 2014.
  • La Conférence régionale des préfets est le nouvel organisme de concertation.
  • Les MRC sont devenues la porte d’entrée pour les demandes du milieu en DS.

Vallée-du-Haut-Saint-Laurent

  • La Commission de DS, Égalité, Cohésion (CDSÉC) de la CRÉ portait le DS régional depuis 2008.
  • Une concertation régionale intégrée en DS et réussite éducative est en cours de mise en place avec l'appui de 4 MRC et de plusieurs partenaires régionaux.
  • Une demande régionale de soutien financier a été déposée à la Fondation Chagnon.

 

Un état de situation partiel réalisé par le Réseau québécois de développement social (RQDS) et la Chaire de recherche du Canada en organisation communautaire (CRCOC)

Gédéon Verreault
Christiane Lussier
Denis Bourque

Cahier no 16-01

ISBN 978-2-89251-566-4 (version imprimée)
ISBN 978-2-89251-567-1 (pdf)

Mars 2016

La Chaire de recherche du Canada en organisation communautaire (CRCOC) a débuté ses activités le 1er janvier 2008. Elle est située à l’Université du Québec en Outaouais (UQO) et possède son propre site Internet : http://www.uqo.ca/crcoc/. Elle fut la première chaire en travail social reconnue par le programme des chaires de recherche du Canada http://www.chairs.gc.ca/. Ce dispositif de recherche se consacre à produire des connaissances visant le développement de l’organisation communautaire dans le service public et dans le milieu communautaire par la compréhension des conditions de succès et de renouvellement de cette pratique confrontée à la transformation des politiques et services publics, à celle des communautés ainsi que des mouvements sociaux. Renouvelée en 2013 pour une deuxième période de cinq ans, la chaire mène des travaux de recherche et de diffusion sur deux des quatre approches du modèle québécois de l’organisation communautaire (Bourque et al., 2007):

  • Développement local : identifier les nouvelles formes d’initiatives de développement local de type intégré, leurs retombées pour les communautés, ainsi que les conditions qui en favorisent la régulation participative et démocratique.
  • Socio-institutionnelle : analyser l’évolution de l’organisation communautaire dans le réseau public de santé et de services sociaux. Étudier l’incidence des programmes sur la pratique en organisation communautaire et identifier les conditions de succès de l’approche socio-institutionnelle participative.

La présente recherche s’inscrit dans les travaux de la Chaire visant à mieux comprendre la transformation des pratiques professionnelles ou métiers de soutien au développement de territoire; caractériser le territoire comme espace de développement soutenable en termes d’intégration et de transversalité des pratiques d’action collective dans le contexte de crise du modèle de développement; et aborder les pratiques professionnelles à partir de pratiques-terrain représentatives, innovantes et significatives.

La chaire favorise un renouvellement des pratiques basé sur les meilleurs processus favorisant le développement des communautés par l’accession des populations au rang d’acteurs sociaux. Elle souhaite associer les professionnels concernés, les organismes qui les emploient ainsi que les milieux où se pratique le développement de territoire à la définition, la réalisation et la diffusion des connaissances produites par la recherche. La CRCOC se consacre à la diffusion et à la valorisation des connaissances en publiant des cahiers, en rédigeant des articles et des ouvrages, en livrant des communications et des conférences, en organisant des séminaires, des activités de formation, de consultation et d’accompagnement.

Le Réseau québécois de développement social (RQDS) a été fondé à l’initiative de quelques responsables de démarches régionales en développement social. On nomme démarche régionale de développement social le fait qu’un ensemble d’organismes d’une même région administrative se regroupe sur une base intersectorielle, se mobilise ou se concerte dans le but d’améliorer ou de faire progresser les interventions régionales en réponse aux besoins formulés dans la région. Ces démarches régionales de développement social sont des lieux où la lutte contre la pauvreté se retrouve parmi les priorités d’intervention territoriale.

Ces démarches ont été créées dans la foulée des travaux liés au premier Forum de développement social tenu par le Conseil de la santé et du bien-être en 1998. Une dizaine de coordonnateurs de ces comités régionaux se sont réunis en 2003 à Montréal pour échanger sur leurs réalités et sur l’importance de développer une vision commune. Leur désir de réseautage et d’entraide a suscité les travaux menant à l’adoption en 2004 d’une vision commune désignée comme la plateforme du RQDS et à la constitution du RQDS comme OBNL à l’automne 2005.

Le Réseau québécois de développement social a un mandat principal de communauté de pratique en développement social, en soutenant ses membres qui interviennent pour améliorer les conditions de vie individuelles et collectives des citoyens. Les intérêts communs de ses membres sont la progression des démarches régionales de développement social et l’amélioration des pratiques. Le RQDS mène également des actions visant à promouvoir le développement social aux plans local, régional et national. À ces fins, le RQDS développe des alliances et des collaborations avec divers organismes.

Depuis sa fondation, le RQDS organise deux fois par année des rencontres de réseautage, de partage et de formation pour ses membres et ses partenaires. Il collabore aussi à plusieurs recherches et projets partenariaux, avec la préoccupation constante de rendre disponibles leurs résultats à l’aide d’outils adaptés aux acteurs du développement social. Il développe des partenariats dans le but de susciter une adhésion maximale à cette démarche mobilisante et structurante qu’est le développement social.

Sommaire du cahier

Suite à l’abolition des Conférences régionales des élus et à la redéfinition par le ministre des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire de la «nouvelle gouvernance régionale », les diverses démarches et structures de soutien au développement social à l’échelle des régions administratives du Québec sont contraintes de se redéfinir. Le RQDS a consulté ses membres régionaux et dressé avec ceux-ci un état de situation dont rend compte ce cahier. Il présente un aperçu forcément partiel, établi à un moment d’un processus de changement encore en cours, mais qui présente l’avantage de faire un tour de l’ensemble des régions administratives.

Le cahier propose d'abord une analyse transversale du contexte des démarches régionales en développement social avant la période de changement actuel. Il présente ensuite une analyse des transformations actuelles et de leurs effets sur ces démarches. Des questions et des hypothèses sont avancées quant aux enjeux soulevés par le repositionnement en cours du développement social au plan régional et local au Québec.

Le cahier offre l’avantage de documenter la façon dont les régions tentent de s’ajuster à la nouvelle conjoncture. Il propose une typologie des nouveaux profils que prennent les démarches régionales en développement social. Ce document se veut avant tout un outil pour soutenir la réflexion et les décisions de celles et ceux qui, depuis près de vingt ans, ont investi dans le développement social et souhaitent poursuivre leur action.

 

Liste des sigles et acronymes

AE - Avenir d’enfants

Alliance - Alliance pour la solidarité et l’inclusion sociale (les partenaires régionaux ou supralocaux dans le cadre du PAGSIS)

ARBJ - Administration régionale Baie-James

ASSS - Agence de la santé et des services sociaux

ATI - Approche territoriale intégrée

CDC - Corporation de développement communautaire

CISSS - Centre intégré de santé et de services sociaux

CIUSSS - Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux

CJE - Carrefour jeunesse-emploi

CLD - Centre local de développement

CRCOC - Chaire de recherche du Canada en organisation communautaire

CRD - Conseil régional de développement

CRDAT - Conseil régional de développement de l’Abitibi-Témiscamingue

CRÉ - Conférence régionale des élus

CRSSS - Centre régional de santé et de services sociaux

CSSS - Centre de santé et de services sociaux

DC - Développement des communautés

DS - Développement social

DSP - Direction de santé publique

EQ - Emploi-Québec

IRC - Instance régionale de concertation sur la persévérance scolaire et la réussite éducative

MAMOT - Ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire

MAMROT - Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire

MRC - Municipalité régionale de comté

MSSS - Ministère de la Santé et des Services sociaux

MTESS - Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale

PAGSIS - Plan d’action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale

PARSIS - Plan d’action régional pour la solidarité et l’inclusion sociale

PIC - Projet impact collectif

PSOC - Programme de soutien aux organismes communautaires

QEF - Québec en Forme

R2 - Réunir Réussir

RQDS - Réseau québécois de développement social


Introduction

Il s’est construit au cours des dernières années dans l’ensemble des régions du Québec un réseau de démarches régionales de concertation intersectorielle en développement social (DS). Ces démarches étaient financées par des ententes multipartenaires dont les Conférences régionales des élus (CRÉ) étaient fiduciaires et partenaires. Avec l’abolition de celles-ci et un ensemble de changements politiques et administratifs, ces démarches doivent se redéfinir et se restructurer. Il est apparu pertinent au Réseau québécois de développement social (RQDS) et à la Chaire de recherche du Canada en organisation communautaire (CRCOC) de réaliser et de diffuser un état de situation des efforts de restructuration de ces démarches.

Il faut noter que cet état de situation est partiel, car les réalités étudiées évoluent très rapidement dans le contexte actuel et un évènement, par exemple la reconnaissance ou non par les élus de la démarche, peut avoir un impact important sur son développement. Il est partiel aussi, car il a été réalisé sur le témoignage d’une personne par région ou d’un nombre limité de personnes à partir des témoignages des représentants des démarches régionales en développement social lors d’une rencontre du RQDS tenue le 29 octobre 2015. Des personnes ont aussi été ciblées pour témoigner dans les régions qui n’étaient pas présentes lors de cette rencontre (Abitibi-Témiscamingue, Capitale-Nationale et Laval). Tous les répondants ont validé le contenu de leur section et ont été invités à valider le contenu du document.

Le RQDS et la CRCOC considèrent que ce portrait peut être utile en premier lieu pour les démarches elles-mêmes, afin de s’alimenter de l’expérience des autres régions. Mais aussi pour les différents acteurs du développement social dans les régions, afin de leur fournir une vue d’ensemble des transformations en cours.

Nous présentons dans un premier temps un portrait de la situation dans chacune des dix- neuf régions du Québec, par ordre alphabétique. Puis, nous présentons une analyse transversale de la situation de ces régions. Nous en dégageons, entre autres, une typologie des profils que prennent actuellement ces démarches régionales en DS.

1.  Portrait des régions

Abitibi-Témiscamingue

En 2010, la CRÉ, l’Agence de la santé et des services sociaux de l’Abitibi-Témiscamingue et les directions régionales des ministères de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS), de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) et des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire (MAMROT) ont fait la tournée des 5 territoires de municipalité régionale de comté (MRC) de la région pour consulter sur les priorités territoriales et régionales qui devraient être retenues en DS. Ce fut une grande mobilisation qui a mené à la mise en place d’une Alliance régionale et de 5 Alliances territoriales de partenaires dans le cadre du Plan d’action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale (PAGSIS). Un comité d’intégration de l’Alliance régionale a joué le rôle, au cours des 5 dernières années, de table de DS animée par une professionnelle de la CRÉ.

Depuis la fermeture de la CRÉ, il n’y a pas eu poursuite de l’activité de ce comité et aucun des partenaires n’a pris l’initiative de convoquer une rencontre de suivi. Les coupes et la réorganisation gouvernementale de tous les ministères impliqués expliquent probablement ce temps d’arrêt. On peut penser que chacun attend que les réorganisations internes soient complétées avant de revoir la concertation intersectorielle. Entre temps, la priorité régionale en développement des communautés (DC), coordonnée par la Direction de santé publique (DSP) de l’Abitibi-Témiscamingue, a créé une communauté de pratique sur le DC, nommée CommunAT. Cette communauté de pratique, qui réunit des intervenants territoriaux et régionaux, a offert de contribuer à mettre en place une instance régionale en DS et d’en faire partie.

Également, une mobilisation citoyenne autour du développement régional a eu pour effet la remise en place du Conseil régional de développement de l’Abitibi-Témiscamingue (CRDAT), organisme prédécesseur de la CRÉ, avec comme principal objectif de s’assurer de la réalisation du Plan stratégique de développement régional 2014-2019, incluant le DS, en collaboration avec la Conférence des préfets.

Aussi, des échanges ont eu lieu entre la DSP et les acteurs régionaux et nationaux au sein de Québec en Forme (QEF) et d’Avenir d’enfants (AE) dans le but d’assurer la pérennité des objectifs poursuivis et de l’accompagnement des regroupements locaux de partenaires de ces organisations. Ces derniers pourraient contribuer à la mise en forme d’une table régionale en DS. Un comité a été mis en place pour évaluer la nature et la forme que prendra cet accompagnement dans un cadre de concertation intersectorielle, et pour faire des recommandations aux partenaires régionaux du PAGSIS et au CRDAT.

Ces trois initiatives ont comme intention de formaliser la concertation régionale en DS. La publication, à venir, du troisième plan d’action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale par le Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MTESS) s’inscrira également dans les facteurs influant sur les décisions à prendre dans ce dossier. La région n’a pas encore déposé de demande de financement à la Fondation Lucie et André Chagnon, mais dès la reconnaissance d’un lieu et d’un porteur de cette concertation en DS une demande devrait être faite. La Fondation Chagnon offre en effet, à partir de 2015, un financement transitoire d’environ un an aux démarches régionales en DS pour les aider à se restructurer. Ces dernières doivent trouver d’autres partenaires financiers pour compléter le levier financier de la Fondation Chagnon et sont encouragées à travailler à l’arrimage des concertations touchant le DS au palier régional (saines habitudes de vie, réussite éducative, etc.). L’instance régionale de concertation (IRC) sur la persévérance scolaire et la réussite éducative a été dissoute en août 2015, suite à la fin du financement. Les instances territoriales continuent leurs activités et seront invitées à faire partie de la concertation en DS.

Comme la réorganisation des directions régionales des ministères, incluant le Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS), n’est pas complétée et que la Conférence des préfets, la nouvelle table qui réunit les préfets de la région, n’a pas encore pris sa vitesse de croisière, le principal défi sera de placer formellement à l’agenda de ces organisations la démarche de concertation régionale en DS et d’obtenir la reconnaissance d’une structure porteuse et légitimée. Avec le travail actuel des trois initiatives coordonnées déjà mentionnées, on peut s’attendre à la mise en place d’un espace de concertation régionale en DS en cours de l’année 2016.

Bas-Saint-Laurent

Il n’y a pas d’organisation intégrée de concertation en DS dans le Bas-Saint-Laurent. On y retrouve la Communauté Ouverte et Solidaire pour un Monde Outillé, Scolarisé et en Santé (COSMOSS) qui a développé depuis 2004 une approche intégrée pour la clientèle des 0-30 ans, la Table régionale de concertation des Aînés et l’Alliance liée au PAGSIS (intégrée à COSMOSS dans trois territoires de MRC). La démarche COSMOSS est active dans les huit MRC du Bas-Saint-Laurent.

Le milieu désire poursuivre la démarche COSMOSS. Déjà, il y a un projet d’expérimentation d’une plus grande cohésion des approches qui vise l’harmonisation des différents fonds : AE, QEF et Réunir Réussir (R2). Une entente de partenariat 2015-2020 est sur le point d’être signée à ce niveau entre le CISSS, QEF, AE et la Fondation Chagnon. On déploiera un plan intégré 0-30 ans par territoire de MRC, avec un seul protocole d’entente au lieu de quatre. Le Collectif régional de développement qui réunit les préfets de la région en est le fiduciaire, mais l’instance COSMOSS garde la même gouvernance. En plus d’un représentant du fiduciaire, cette gouvernance est composée des directions régionales des ministères, du CISSS, des MRC, des partenaires liés aux ententes entre le gouvernement du Québec et la Fondation Chagnon (AE, QEF et R2) et de la Commission jeunesse du Bas-Saint-Laurent. La Table intersectorielle régionale sur les saines habitudes de vie, pour sa part, est un comité aviseur de la démarche COSMOSS.

COSMOSS ne souhaite pas s’incorporer pour ne pas affecter sa gouvernance régionale. Au niveau des territoires de MRC, un exercice de planification triennale sera développé durant la prochaine année. Cependant, le contexte d’austérité affecte les partenaires. Les premières planifications locales seront adoptées par les milieux à l’automne 2016.

Capitale-Nationale

Jusqu’en 2015, il existait dans la région de la Capitale-Nationale une Table régionale en développement social coordonnée par la CRÉ, mais la mobilisation et le fonctionnement de la Table étaient à revoir. Cette table a permis la mise en place de 5 comités locaux ayant une approche territoriale intégrée (ATI). Ces comités étaient appuyés par une entente régionale de lutte contre la pauvreté, la DSP de la Capitale-Nationale et Centraide Québec et Chaudière-Appalaches. La Ville de Québec, pour sa part, a adopté une vision de DS en 2013.

Malgré la fin du soutien financier aux comités locaux ATI, il existe une volonté de certains milieux de poursuivre la concertation locale et d’arrimer les différentes sources de financement régionales. Notons qu’une nouvelle table régionale sans structure administrative a été créée, le Forum régional des élus réunissant 2 représentants par MRC de la région. Au niveau de la Ville de Québec, il y a eu création d’un Bureau du développement communautaire et social et la Ville assume un leadership pour arrimer les soutiens aux concertations locales.

Actuellement, à Québec, la Ville, QEF, AE, la DSP et Centraide travaillent à la mise en place d’un lieu d’arrimage et de développement d’une vision commune du développement du milieu. Cela devrait permettre la concertation des différents fonds de soutien aux communautés, le partage d’information et le transfert des connaissances afin d’assurer la transition en prévision de la perte de QEF et d’AE.

Centre-du-Québec

Depuis dix-sept ans, le Comité régional en développement social Centre-du-Québec (CRDS) a développé une expertise importante au niveau de la connaissance des enjeux du DS, de la production d’outils pour soutenir les communautés ainsi que du soutien à divers projets locaux. Fort de l’engagement de vingt-neuf membres qui représentent onze organismes régionaux, huit secteurs sociaux de la région et cinq MRC, la démarche a permis d’agir en cohérence avec les acteurs locaux et régionaux. Depuis ses débuts, le CRDS était financé par une entente régionale en DS.

Suite à la fin de la dernière entente spécifique et à l’annonce de l’abolition de la CRÉ, les membres du CRDS ont entamé une démarche afin de développer une entente de collaboration pour renouveler la mobilisation régionale et supralocale en DS. Un comité stratégique a été créé afin de favoriser l’avancement des travaux et Centraide Centre-du- Québec a été identifié comme nouveau fiduciaire et comme porteur de la démarche. Une ressource a été embauchée pour réaliser des consultations auprès de partenaires concernés par le DS (Centre local de développement, MRC, Jeunesse, Aînés, etc.), afin de mieux comprendre leur contexte et d’échanger avec les élus sur le rôle du développement social dans le développement des communautés. Le DS considère les individus et les collectivités dans leur globalité et de façon intégrée. C’est dans cet esprit que les représentants du CRDS ont également échangé sur une offre de services potentielle du CRDS auprès des MRC.

Dans un deuxième temps, les représentants des Carrefours jeunesse emploi (CJE) et la Table régionale de l’éducation ont été rencontrés avec comme prémisse que les enjeux du DS ainsi que ceux de la persévérance scolaire, la réussite éducative, ainsi que l’offre de formation professionnelle et de formation technique dans la région s’inscrivent dans un continuum d’intervention où chacun des partenaires a un rôle à jouer. Il a été convenu avec ces partenaires que l’arrimage des actions est primordial pour la cohérence des démarches. Également, le CIUSSS est membre du comité stratégique de transition et souhaite soutenir la poursuite d’une démarche en DS au Centre-du-Québec.

Finalement, des approches auprès de chacun des comités locaux en DS membres du CRDS ont permis de dégager les besoins immédiats en termes de soutien et de collaboration. Ces rencontres de consultation ont permis de renforcer les objectifs de mobilisation souhaitée et les appuis pour poursuivre les actions du comité régional en DS. Le CRDS souhaite instaurer un mode de fonctionnement permettant d’ancrer l’arrimage avec les démarches locales et de consolider la concertation en lien avec différents enjeux : sécurité alimentaire, logement, transport collectif, revitalisation des milieux, occupation du territoire, services de proximité.

Plus particulièrement, dans la prochaine année, l’apport financier des partenaires permettra de soutenir une coordination et ainsi assurer le maintien et favoriser l’organisation de la présente mobilisation. Le mandat de la coordination sera de définir, avec les partenaires, la structure de concertation souhaitée, d’établir un plan de mise en œuvre de la démarche, d’harmoniser les plans d’action locaux et régionaux en collégialité avec les partenaires et les nouvelles alliances créées. Il visera également à redéfinir notre mode de fonctionnement ainsi qu’à travailler avec les bailleurs de fonds potentiels pour permettre à cette mobilisation régionale et locale de continuer le travail amorcé et de bonifier ses actions les plus porteuses.

Chaudière-Appalaches

Depuis plusieurs années, le DS est concerté en Chaudière-Appalaches. Au départ, cela s’est fait sous la forme du Groupe conseil en développement social et communautaire. En 2011, un projet de comité régional, la Commission régionale en développement social chapeautée par la CRÉ, a permis de développer un portrait, une vision et un plan d’action, donc des bases solides. Le comité comptait 27 partenaires, dont un élu, 14 collèges électoraux, 5 secteurs nommés par la CRÉ et 7 ministères. La présidente et la vice-présidente de ce comité siégeaient au conseil d’administration de la CRÉ.

Actuellement, un noyau dur de partenaires continue à se rencontrer, mais il n’y a plus d’assistance technique par la CRÉ. La moitié des partenaires ont manifesté un intérêt écrit à poursuivre leur implication au sein d’une démarche de concertation régionale en DS. Depuis le printemps, plusieurs questionnements ont été abordés en comité et des propositions sont sur la table. Les partenaires poursuivent leur réflexion visant une restructuration du comité régional de DS.

Côte-Nord

Entre 2002 et 2011, une entente administrative conclue entre la CRÉ et l’ASSS de la Côte- Nord a permis la mise en place et la coordination d’un réseau d’intervenants engagés en matière de DS. L’entente a aussi permis l’accompagnement de chantiers de DS à l’échelle des MRC, une présence dans plusieurs domaines liés au DS et la réalisation d’un évènement régional appelé L’Escale. Ce dernier s’est tenu à tous les deux ans à partir de 2003. Depuis le début de l’année 2012, les efforts de la CRÉ ont davantage été dirigés vers le Plan d’action régional pour la solidarité et l’inclusion sociale (PARSIS). Cette approche cible spécifiquement la lutte contre la pauvreté par des activités de mobilisation des territoires et de financement de projets. En décembre 2014, les directions générales de l’ASSS et de la CRÉ s’entendaient pour relancer la démarche régionale de DS et de DC.

Dans les efforts de relance de la démarche régionale de DS, il était important de voir le milieu s’associer au mouvement. Et c’est naturellement qu’une forme de contribution active s’est mise en branle à l’issue de L’Escale 2014. Au lendemain des annonces d’abolition des CRÉ et des ASSS, l’idée de mettre en place une organisation autonome et indépendante vouée au DC de la Côte-Nord faisait écho aux efforts de la CRÉ. Un groupe d’intéressés se met donc en place pour poursuivre le travail entrepris. Le résultat des travaux du groupe a permis de clarifier que les communautés et la région de la Côte-Nord ont le pouvoir d’agir collectivement sur leur développement, et ce, de manière globale, complémentaire et cohérente. Les intentions du groupe sont donc

  • de préserver, mailler et développer les expertises en DS/DC présentes sur la Côte- Nord,
  • de développer chez les acteurs du DS/DC une bonne compréhension de l’évolution des transformations en cours dans le contexte du DS/DC afin qu’ils fassent les meilleurs choix pour leur territoire,
  • de renforcer le sentiment de solidarité et la cohérence chez les acteurs du DS/DC,
  • de favoriser un arrimage des politiques publiques,
  • d’harmoniser ou influencer les politiques locales en matière de DS/DC,
  • et de développer une offre de service en soutien aux communautés en termes de DS/DC selon les besoins prioritaires et la capacité de mise en œuvre du groupe.

Il est permis de constater qu’une vision de la démarche régionale de DS s’articule, mais des actions importantes restent à mettre en branle, soit la rédaction d’un modèle d’affaires incluant la gouvernance, le développement d’outils de communication qui permettront de faire connaître le projet, la tenue de rencontres visant la reconnaissance des acteurs régionaux et territoriaux (CISSS, Fondation Chagnon, Assemblée des MRC, autres partenaires) et l’identification des actions complémentaires pertinentes.

Estrie

L’Estrie compte plus d’une démarche régionale qui touche de près ou de loin au DS/DC. Avec la fin anticipée de certaines démarches régionales (AE, QEF, R2, PARSIS, CRÉ), on constate une volonté de plusieurs partenaires du milieu de mettre en place une démarche régionale de DS/DC. L’Alliance estrienne pour la solidarité et l’inclusion sociale (initié par le PARSIS) est présentement en action pour se faire reconnaître comme telle, mais ce processus n’est pas terminé. Un mémoire pour proposer cette initiative a été déposé à la table regroupant les préfets de la région, la Table des MRC de l’Estrie de laquelle relève l’Alliance. Plusieurs acteurs sont pressentis pour s’impliquer dans une telle démarche, mentionnons seulement les Corporations de développement communautaires (CDC), le CIUSSS, les MRC, les Partenaires pour la réussite éducative, Centraide Estrie et les tables de concertation territoriales. Aussi, la concertation en Estrie est relativement bien structurée au niveau supralocal, la majorité des territoires comporte des démarches intersectorielles et territoriales. Le développement régional en Estrie pourrait être qualifié de segmenté et de fonctionnel.

Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine

La création du Réseau solidaire pour le rayonnement des territoires (RESSORT) découle d’une volonté des partenaires locaux et régionaux qui se sont réunis à l’occasion du Forum régional pour la solidarité et l’inclusion sociale en Gaspésie et aux Iles-de-la-Madeleine. Les partenaires ont privilégié l’approche territoriale intégrée (ATI) par MRC dans le but de mobiliser les partenaires sur une base intersectorielle. L’action du RESSORT vise entre autres l’élaboration d’une vision commune des enjeux régionaux en DS. Son intervention tient compte des constats exprimés par les partenaires concernant le travail en silo, l’intégration des pratiques et la multiplication des structures de concertation sollicitant toujours les mêmes acteurs et s’adressant aux mêmes populations. Au sein d’un comité composé des représentants régionaux des principaux bailleurs de fonds, le RESSORT participe aux travaux d’arrimage et d’harmonisation des fonds dans le but de mieux répondre aux besoins et caractéristiques des milieux. La gouvernance du RESSORT est assumée par des représentants des ATI de chaque MRC, d’organismes communautaires, d’Emploi Québec (EQ), du CISSS et de l’organisme fiduciaire.

Depuis l’abolition des CRÉ, RESSORT réfléchit à sa constitution comme organisme à but non lucratif ou à la signature d’une entente avec un nouveau fiduciaire. Les rôles et la pertinence du RESSORT sont liés aux préoccupations des mobilisations intersectorielles locales (ATI) qui, par leur action, contribuent à l’engagement et à l’adhésion des partenaires locaux à l’égard d’une démarche régionale en DS. De nombreux défis vont déterminer les orientations futures du RESSORT, notamment l’arrimage avec les mobilisations et instances de persévérance scolaire.

Nord-du-Québec, secteur Jamésie

Le Réseau jamésien de développement social (RJDS) existe depuis 1999. Le réseau a bénéficié successivement du soutien du CRD de la Baie-James, de la CRÉ et maintenant de l’Administration régionale Baie-James (ARBJ) qui remplace la CRÉ. Entre 2006 et 2014, deux ententes spécifiques (CRÉ, Centre régional de santé et de services sociaux (CRSSS), MAMROT, EQ) ont financé les travaux du RJDS. Le Réseau regroupe un nombre important de partenaires d’action (ex. CJE, Commission scolaire, EQ, MAMOT, Société d’aide au développement des collectivités, CRSSS, etc.). Soulignons que la présence autochtone importante sur le territoire explique la nécessité de conserver une structure de concertation de type CRÉ dans la région. Toutefois, la concertation régionale en développement social n’implique que les communautés jamésiennes, c’est-à-dire non- autochtones.

L’ARBJ a retiré en 2015 le financement permettant de soutenir la concertation en DS. Des sommes restent disponibles pour des projets de DS, mais elles demeurent sous le contrôle exclusif de l’ARBJ autant dans leur gestion qu’au niveau de leur attribution. Il n’y a plus de permanence au RJDS, seulement une personne du CRSSS, liée à la DSP, qui assume la présidence et la coordination. Ce retrait est vécu comme un recul du fait qu’on remette en question la nécessité d’avoir une structure de concertation pour soutenir le DS. Même si la Baie-James garde son Administration régionale, il est difficile d’en connaître les intentions pour l’instant, puisque sa structure et son mandat sont en transition. L’ARBJ a appelé les acteurs régionaux à une rencontre de concertation régionale qui s’est tenue en novembre. Plusieurs partenaires (EQ, MAMOT, CRSSS, Table régionale des organismes communautaires, CJE, saines habitudes de vie, persévérance scolaire, etc.) ont pris part à la rencontre et ont convenu qu’une réflexion s’imposait sur le renouvellement des structures de concertation régionales. L’ARBJ a fait valoir sa volonté de collaborer à l’exercice et agit à titre de partenaire sur le comité de réflexion stratégique. En plus de celle-ci, le comité est formé des instances suivantes : CRSSS, Groupe Neurones (persévérance scolaire), CJE, Réseau régional en organisation communautaire, APPUI Jamésie (proches aidants) et le Comité jamésien des saines habitudes de vie. De plus, des discussions sont en cours avec la Fondation Chagnon pour le dépôt éventuel d’un plan d’action annuel.

Le comité de réflexion a été formé et mandaté pour réfléchir à un modèle de concertation renouvelée, permettant d’harmoniser le plus possible les différents plans d’action, afin d’intégrer le tout sous l’égide du DS et ainsi favoriser une plus grande cohérence de l’action sur le terrain. Les défis actuels portent sur l’intégration des concertations, la connaissance et reconnaissance du DS (en particulier par les élus) et l’autonomie du RJDS dans ses prises de décision et sa capacité d’action. Des discussions sont en cours entre le RJDS et l’instance de concertation en persévérance scolaire afin de revoir leur mode de gouvernance pour une éventuelle fusion.

Lanaudière

La Table de partenaires du développement social de Lanaudière est une personne morale dont le conseil d’administration est composé de partenaires régionaux et de représentants territoriaux. Elle a bénéficié de 5 ententes spécifiques depuis 2000. La Table mobilisait une cinquantaine de partenaires autour de problématiques sociales liées à l’habitation, la sécurité alimentaire, le transport collectif, l’insertion sociale et professionnelle, etc. Elle soutenait les comités locaux de DS dans leur concertation, la connaissance des enjeux et le développement de projets. Elle avait aussi un mandat d’accompagnement du processus de priorisation de projets locaux dans le cadre du PARSIS et l’animation d’un mécanisme qui visait la mise en place d’arrimages dans le cadre de l’Alliance lanaudoise pour la solidarité et l’inclusion sociale. Les partenaires financiers de la Table étaient jusqu’en 2015, la CRÉ, EQ, l’ASSS de Lanaudière, Centraide, les deux Centre de santé et de services sociaux (CSSS) et le MAMOT. Ses partenaires d’action comptaient, en plus de ses partenaires financiers, plusieurs tables de concertation telles que la Table régionale des organismes communautaires de Lanaudière, la Table de l’éducation, l’IRC en réussite éducative, les regroupements régionaux et locaux de QEF, d’AE et des organismes régionaux et locaux tels que les Centre locaux de développement (CLD) et les Sociétés d’aide au développement des collectivités.

À la suite de l’annonce de l’abolition de la CRÉ, la Table des partenaires a envoyé une lettre aux six préfets pour leur offrir sa collaboration s’ils souhaitaient mieux connaître les actions en DS et les outils réalisés par la Table. Celle-ci a perdu plusieurs partenaires financiers puisqu’elle ne pouvait plus bénéficier d’une entente spécifique. Elle a pu obtenir à nouveau l’appui de Centraide, de la Fondation Chagnon et du CISSS de Lanaudière. Le temps de négocier ce financement a entraîné la mise à pied de l’équipe de 4 personnes entre mai et septembre 2015. De ces 4 ressources, 2 et demi ont pu être rembauchées. La vision de la Table est d’amener, d’ici 5 ans, les MRC à soutenir des plans de développement des communautés dans une approche intégrée, en travaillant avec les acteurs de leur milieu, et en ayant la préoccupation d’arrimage et de cohésion dans leur territoire et entre les six territoires. La Table souhaite d’abord réunir les acteurs du développement social qui se mobilisent au niveau du développement des jeunes enfants, de la réussite éducative, des saines habitudes de vie et ceux qui travaillent sur les problématiques liées au logement, à la sécurité alimentaire, à l’insertion socioprofessionnelle, au transport collectif et au vieillissement (sujets traités par les comités locaux de développement social). D’autres acteurs seront invités au fur et à mesure pour tendre vers le développement intégré.

Pour ce qui est de la gouvernance régionale, la Table a interpellé les acteurs socioéconomiques pour développer un argumentaire qui faisait valoir auprès de la Table des préfets la préoccupation de maintenir une gouvernance régionale intégrant des acteurs socioéconomiques. Deux activités qui ont réuni 60 et 40 participants ont abouti à la création d’un Groupe de 15 organisations régionales qui a travaillé une proposition, acceptée par les préfets, et qui intègre trois représentants socioéconomiques au comité de réflexion de la Table des préfets. Un grand forum régional est prévu à l’hiver 2016 où conférences, panels, ateliers serviront à faire valoir la valeur ajoutée d’un espace de dialogue régional sur des chantiers mettant en collaboration les élus et la société civile.

Laurentides

Le Conseil régional de développement social des Laurentides (CRDSL) a été créé en 2004 suite à l’abolition du CRD. Le Conseil est formé de représentants des 8 tables territoriales de DS et de certains autres partenaires (Centraide, CISSS, Moisson Laurentides, etc.). Les tables territoriales sont en général des organisations matures. Le CRDSL était financé jusqu’en 2015 par la CRÉ et le CISSS.

Une rencontre de chaque préfet avec les représentants territoriaux en DS a eu lieu pour leur expliquer individuellement et clairement la situation dans la région des Laurentides et l’opportunité qui leur était offerte par la Fondation Chagnon. Une rencontre à la Table des préfets a permis de récolter un appui financier de 1 500 $ par MRC pour un total de 12 000 $. Le CISSS, la DSP, Centraide Gatineau-Labelle-Hautes-Laurentides, Centraide Laurentides et des députés de la région appuient financièrement le CRDSL et participent à ses travaux.

Il y a une volonté d’arrimage avec l’IRC en réussite éducative. Plus largement on cherche à rallier toutes les démarches régionales thématiques sous un même parapluie. Il reste à faire un travail important de sensibilisation des élus.

Laval

C’est la CRÉ de Laval qui était responsable des dossiers liés au DS. La gestion s’y faisait par entente (saines habitudes de vie, réussite éducative, etc.). Les élus de la Ville formaient la majorité du conseil d’administration de la CRÉ, car Laval est une ville, une MRC et une région. La sécurité alimentaire était une démarche régionale importante depuis 2008 avec un leadership de la DSP de Laval. Il y avait beaucoup de concertations locales et régionales sectorielles et multisectorielles.

L’abolition de la CRÉ et la création du CISSS amènent des problématiques (abolition de structures décisionnelles, perte de financement, etc.), mais aussi une réflexion sur la gouvernance et un espace pour repositionner le DS. Les nouveaux élus à la Ville de Laval démontrent un leadership important en DS, entre autres, par la création d’un Service de la culture, des loisirs, du sport et du développement social et par une planification stratégique positionnant la Ville comme « leader en développement social et culturel ». Des échanges ont eu lieu entre le CISSS et la Ville. Des démarches sont en cours pour établir un coleadership entre la Ville et le CISSS dans le développement d’une concertation multisectorielle visant la réalisation d’une politique de DS.

La concertation devrait mener à la rédaction d’une Politique régionale en développement social incluant la définition des champs d’intervention et des cadres de référence afin d’arrimer un plan d’action pour la fin 2016 ou le début 2017. Cette concertation devra être en mesure de discuter des aspects stratégiques (connaissance, compréhension et vision communes) en même temps qu’elle gère les aspects opérationnels qui tendront à prendre beaucoup d’importance, en particulier avec le besoin de repositionner les différentes ententes. Elle devra être en mesure de prendre en compte les différents besoins et réalités des quartiers (territoires vécus ou administratifs). L’enjeu se situe aussi au niveau de la relation avec les partenaires : quels partenaires participeront à quels comités, afin d’éviter tout impair envers ceux-ci. L’enjeu de la communication sera également très important.

Longueuil

Longueuil est une agglomération exerçant les compétences de MRC qui regroupe 5 villes : Boucherville, St-Bruno-de-Montarville, Longueuil, Brossard et Saint-Lambert. Ainsi, son territoire d’action n’est pas modifié et l’agglomération, contrairement à d’autres régions, ne se voit pas contrainte de faire valoir l’importance de l’action territoriale. L’action y est très sectorielle et très efficiente, mais il y a peu d’intégration. En DS, l’alliance pour gérer la contribution du Fonds québécois d'initiatives sociales a mené à la création du Comité pour la solidarité et l’inclusion sociale de l’agglomération de Longueuil (COSISAL), avec des membres multisectoriels et un montage financier de plusieurs sources. Le financement se réalisait par projet provenant de concertations locales ou régionales. Il y avait une volonté du COSISAL et de la CRÉ de développer une approche plus transversale avant les annonces de 2014. En décembre 2015, le comité comptait deux CISSS, la CDC, les 5 villes, EQ, Centraide du Grand Montréal, la DSP Montérégie et des organismes communautaires.

La loi 28 a donné lieu à l’annonce de la fermeture de la CRÉ le 31 mars 2016, mais aussi du CLD et de Développement économique Longueuil. Les élus ont annoncé qu’il y aura une nouvelle instance de développement socioéconomique, qui doit être négociée entre les 5 villes. Ils ont affirmé que le DS serait attaché à cette instance le 1er avril 2016. Cette approche soulève le défi d’intégrer différentes cultures organisationnelles (développement économique, développement social, etc.). Des arrimages entre le local et le territorial seront à construire. Néanmoins, la situation de la page blanche permet un espace pour se réinventer. Elle permet, entre autres, de penser un rapprochement avec l’IRC en réussite éducative.

Mauricie

Le Consortium en développement social de la Mauricie constitue la démarche régionale de DS de cette région depuis sa mise en place en 2000. Le Consortium regroupe des partenaires régionaux et des représentants des comités territoriaux de DS présents sur les 6 territoires de la Mauricie (3 MRC et 3 villes exerçant les compétences de MRC). La CRÉ était fiduciaire de l’entente multipartite qui finançait la démarche en partenariat avec la DSP, EQ et Centraide Mauricie. L’entente actuelle en DS se termine le 31 mars 2016. Les 2 employées anciennement logées à la CRÉ sont maintenant hébergées à Centraide.

La transition en 2016-17 reste à définir. Il n’y a pas encore eu de demande déposée à la Fondation Chagnon. Les partenaires actuels de l’entente semblent vouloir poursuivre leur soutien au DS de la région, mais souhaitent l’implication des villes et MRC de la Mauricie dans une prochaine entente régionale. Par contre, cette implication reste incertaine étant donné la position des élus qui semblent davantage préoccupés par la nouvelle gouvernance territoriale et leurs propres enjeux territoriaux plutôt que par les préoccupations régionales.

Dans ce contexte, le comité de gestion du Consortium souhaite, d’ici le 31 mars 2016, connaître les besoins en DS des territoires et identifier des besoins communs qui pourraient faire l’objet d’actions relevant d’une démarche régionale. Le Consortium réalisera une consultation avec les responsables et quelques représentants des sept comités territoriaux. Cette initiative permettra d’outiller le comité de gestion pour établir le dialogue avec les villes et MRC via la Conférence administrative régionale. À voir si ce dialogue aboutira à une nouvelle entente.

Montérégie-Est

En Montérégie-Est, la concertation régionale en DS était portée par la CRÉ et son financement était assuré par des ententes ministérielles. Le Fonds de développement régional y contribuait tant pour la mise en œuvre de projets que pour la coordination d’une dizaine de comités régionaux de concertation liés aux enjeux de DS.

Actuellement, les préfets procèdent à la fermeture de la CRÉ et les sommes résiduelles seront transférées aux neuf MRC du territoire. Pour le moment, on ne prévoit pas la mise en place d’une concertation régionale réunissant les préfets, avec ou sans société civile, pour appuyer la réalisation de projets touchant une MRC et plus. La Coopérative de développement régional de la Montérégie a développé un projet visant à mettre en place une démarche régionale de DS, afin de consolider les concertations qui ont été mises en place au fil du temps sous l’égide de la CRÉ et qui étaient fragilisées à la suite de son abolition. Une entente d’aide financière transitoire a été conclue avec la Fondation Chagnon en septembre 2015 en vue de mettre en place les conditions propices à la réalisation d’un plan d’action 2017-2020 en DS et en persévérance scolaire et à l’identification de partenaires mobilisés avec un engagement financier. La vision de départ de ce projet est de réunir les acteurs communautaires et socioéconomiques de tous les paliers d’intervention, incluant le milieu municipal, dans le cadre d’un Forum des partenaires mobilisés et concertés, duquel découlera une Table de DS et d’innovation sociale pour une vision intégrée et transversale des interventions.

Pour ce faire, une Coopérative de solidarité régionale sera mise en place d’ici le mois de juin 2016 qui permettra de soutenir les activités de concertations régionales. Elle sera également une entreprise collective fournisseur sur une base volontaire de services d’accompagnement sur mesure en appui aux actions en DS sur le terrain. Les MRC pourront faire appel aux services de cette coopérative pour des besoins de toutes sortes en matière de DS. Il existe donc une volonté des partenaires de rester concertés. On parle d’une approche de courtepointe, reliant la réussite éducative, le bureau régional de la nouvelle Coopérative régionale de développement du Québec, le pôle régional d’économie sociale, etc. Il y a aussi de nombreux défis à relever, dont le positionnement et l’ancrage de la coopérative et l’adhésion du milieu municipal. Aussi, on ne parle plus de concertation, on parle d’ancrage régional.

Montréal

Le DS à Montréal, c’est densité, diversité et complexité. Il y a des centaines de groupes communautaires intervenant en DS, des dizaines d’instances de concertation sectorielles et intersectorielles, en plus de 12 démarches officielles de RUI (Revitalisation urbaine intégrée). Au niveau local, il y a une certaine forme de maturité en matière de DS, grâce entre autres à l’existence de 30 tables locales de concertation intersectorielles et multiréseaux, aussi appelées tables de quartier, nées pour plusieurs à la fin des années 1980. Un cadre de référence et de financement, L’Initiative montréalaise de soutien au développement social local, auquel contribuent Centraide du Grand Montréal, la Ville de Montréal et la DSP de Montréal, permet de soutenir ces tables de quartier sur une base pérenne. Au niveau régional, le Forum régional sur le développement social de l’Île de Montréal est l’instance de concertation intersectorielle en DS. Le Forum était initialement rattaché à la Conférence régionale des élus de Montréal, mais est devenu une organisation autonome en 2012. La Coalition montréalaise des tables de quartier, qui regroupe les 30 tables de quartier de Montréal, joue également un rôle en DS intersectoriel régional.

Malgré la disparition de la CRÉ, la concertation en DS continue à Montréal. Au palier local, la CRÉ n’avait aucune implication dans les tables de quartier, alors qu’au palier régional, le Forum pouvait déjà compter sur des soutiens autres que celui de la CRÉ. Par ailleurs, le travail en DS est plus morcelé au niveau régional que local et des défis restent encore à relever pour favoriser l’arrimage entre les diverses instances régionales sectorielles. Toutefois, Montréal compte plusieurs acquis solides en ce qui a trait au DS et au travail de concertation.

Outre leurs défis d’arrimage, les acteurs montréalais en DS surveilleront dans les mois à venir l’impact du nouveau statut de métropole sur le DS. Montréal aura-t-elle plus de pouvoirs, de fonds? Respectera-t-on les instances actuelles, tant au plan local que régional? Des questions se posent et une collaboration de tous les instants sera un gage de succès. D’autre part, une nouvelle organisation, Concertation Montréal réunissant élus et société civile, a succédé à la CRÉ. Avec une mission axée sur le développement régional via la concertation, il faudra voir comment se positionnera cette instance sur l’échiquier montréalais déjà bien garni. Aussi, le Forum donnera suite en 2016 aux stratégies proposées par les participants à la Biennale sur le développement social de Montréal 2015 qui s’est tenue en juin. Ces stratégies ont pour objectif principal de positionner le DS comme un élément moteur du développement de Montréal.

Enfin, notons qu’en octobre 2015, Centraide du Grand Montréal annonçait une nouvelle initiative de soutien au DC, nommée PIC pour Projet impact collectif. Dans l’esprit de sa stratégie de soutien global au DS local et de lutte contre la pauvreté dans les quartiers, Centraide est allé chercher un don exceptionnel, en surcroît de ses campagnes de financement habituelles, auprès de six fondations familiales, pour un montant total de 19,5 M$. Centraide investira ce montant au cours des cinq prochaines années dans les quartiers de Montréal, via les plans d’action de quartier, développés par les tables de quartier. Le PIC permettra de soutenir divers éléments en lien avec un plan de quartier, tels que : actions d’organismes communautaires contribuant à la réalisation du plan de quartier, projets collectifs émanant du plan de quartier, mobilisation et participation citoyenne, évaluation, développement de compétences, démarche de planification de quartier en vue d’établir un plan d’action collectif, etc. Les 30 tables de quartier de Montréal ont manifesté l’intérêt de leur quartier pour le PIC. Centraide devrait pouvoir soutenir une quinzaine de quartiers, l’idée étant d’injecter des sommes significatives afin de ne pas diluer l’impact.

Outaouais

L’Outaouais est caractérisé par la présence de disparités socioéconomiques importantes. En contrepartie, les acteurs du DS sont particulièrement actifs historiquement dans la région. Ainsi, au cours des dernières années, plusieurs projets importants ont été réalisés en concertation, entre autres le Portrait des communautés de l’Outaouais, l’adoption par la ville de Gatineau d’une politique de DS, la création de tables locales de DS qui couvrent l’ensemble du territoire de l'Outaouais, et l’adoption d’un plan régional de lutte à la pauvreté fortement décentralisé afin de répondre aux besoins des milieux.

Les processus de concertation régionale en DS qui ont permis ces réalisations, se retrouvent maintenant à un moment charnière en raison des transformations du contexte social et des modifications des modes de gouvernance. Les moyens de concertation et d’action doivent donc être redéfinis et c’est à l’intérieur de cette démarche que s’insère le projet de création de la Table en développement social et en soutien au développement des communautés de l’Outaouais. Il s’agit en fait d’une transformation de la Table des partenaires du portrait des communautés, une table regroupant déjà depuis 2009 plusieurs partenaires en DS qui ont démontré leur capacité de travailler ensemble par la réalisation du portrait. Ils envisageaient d’élargir leurs actions depuis quelque temps, notamment par la création d’un observatoire du développement de l’Outaouais et ils invitent maintenant d’autres partenaires à se joindre au groupe.

L’objectif général du projet de nouvelle Table est de rassembler les forces vives de l’Outaouais œuvrant en DS afin de créer une concertation permettant l’optimisation des actions locales, territoriales et régionales dans une perspective de réduction des inégalités sociales, de développement durable et de développement des communautés. Une première action d’envergure entreprise en ce sens est la tenue d’un forum (Rassemblement pour le DS en Outaouais) dès mars 2016 pour dégager les enjeux complexes prioritaires, proposer diverses actions et créer des liens pour agir en synergie sur ces enjeux. Des activités préparatoires au forum porteront, entre autres, sur l’exploration de la situation en cours et des besoins de collaboration auprès des acteurs tandis que les activités en suivi du forum porteront principalement sur la structuration des actions retenues en Outaouais. Des activités en lien avec le Portrait des communautés et un éventuel observatoire du développement de l’Outaouais se poursuivent également.

Saguenay-Lac-Saint-Jean

La concertation en DS se réalisait au sein de la CRÉ jusqu’à l’automne 2014, par le biais de 21 comités sectoriels. La démarche PARSIS avait permis d’amorcer un arrimage entre les secteurs, entre autres par le développement d’une vision commune. Les partenaires du milieu communautaire travaillent en étroite collaboration afin de maintenir un lien constant entre eux. La situation géographique de la région avec sa vaste étendue de territoire rend parfois les maillages difficiles.

À la suite de l’annonce de la fermeture de la CRÉ, les préfets se sont dotés d’un nouvel organisme de concertation, la Conférence régionale des préfets. Certains ministères ne veulent pas s’associer à la nouvelle organisation, il semblerait que ce soit une consigne gouvernementale. Les démarches relatives aux aspects légaux sont en cours et les élus progressent lentement quant à la définition de la mission et de la structure de fonctionnement. Les préfets ne partagent pas tous la même vision quant au rôle que devrait jouer cette nouvelle organisation et aux secteurs qui y seront représentés. Les MRC savent qu’elles sont maintenant la porte d’entrée pour toutes les demandes du milieu, notamment en DS. Se doter d’une planification régionale avec des spécificités par territoire devient nécessaire pour assurer un développement régional cohérent.

Soulignons qu’il existe des craintes dans le milieu face à la fin du Fonds québécois d’initiatives sociales et de la Politique de la ruralité, et au sort des redevances pour l’énergie en lien avec les municipalités dévitalisées.

Vallée-du-Haut-Saint-Laurent

Dans la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, le DS régional était porté par la Commission de DS, Égalité, Cohésion (CDSÉC) de la CRÉ de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, et ce, depuis septembre 2008. Cette commission était formée de plusieurs partenaires dont les CSSS (4), les CDC (5), des Élus (2), le MAMOT, le MTESS, l’ASSS de la Montérégie, QEF, Engagement jeunesse, un représentant Jeunesse, un représentant Aînés et un représentant Égalité. En DS, la CRÉ travaillait sur plusieurs dossiers notamment en saines habitudes de vie, conciliation travail-famille, camp de jour, amélioration des mesures de soutien aux personnes handicapées dans leur projet de vie, en plus de faire la réalisation de 7 ententes majeures signées avec le gouvernement du Québec dans les domaines suivants : solidarité et inclusion sociale, économie sociale, égalité, immigration, personnes aînées, transport collectif et réussite éducative et sociale.

En prévision de la fermeture de la CRÉ le 31 mars 2016, des pourparlers ont été entrepris avec les préfets des 5 MRC de la région pour la mise en place d’une concertation régionale intégrée en DS et réussite éducative. À ce jour, 4 MRC (MRC des Jardins-de-Napierville, MRC du Haut-Saint-Laurent, MRC de Beauharnois-Salaberry et MRC de Roussillon) sont mobilisées autour du DS et de la réussite éducative de même que les partenaires régionaux suivant : le CISSS de la Montérégie-Ouest, la DSP de la Montérégie, AE, QEF et Loisir et Sport Montérégie. Cette concertation assurera la mobilisation et la concertation des acteurs-clés régionaux et territoriaux en DS et réussite éducative afin de développer une vision commune et partagée des défis et des enjeux dans le but de répondre aux besoins des communautés. Bref, elle offrira, à moindre coût, un espace d’échange ainsi qu’un lieu de mise en commun. Les MRC contribuent financièrement à la concertation et une demande régionale de soutien financier a été officiellement déposée à la Fondation Chagnon.

La prochaine année sera consacrée à la réalisation des démarches suivantes : poursuivre les représentations afin de mobiliser les partenaires à la nouvelle concertation régionale en DS et réussite éducative, mettre sur pied le comité directeur, rédiger et faire adopter les règlements généraux, faire la rédaction du plan d’action et élaborer un cadre de référence. Dans la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, en termes de conditions gagnantes, on note l’approche territoriale intégrée (ATI) prônée par la CRÉ Vallée-du-Haut-Saint-Laurent dans les dossiers de DS ainsi que l’intégration déjà effective des dossiers en DS et réussite éducative au niveau régional.

2.  Analyse transversale

Les démarches régionales en DS possèdent chacune leur forme propre, issue de leur historique et de leurs réalités régionales particulières. Pour bien comprendre les transformations que connaissent actuellement ces structures, nous soulignons quelques éléments de contexte ayant un impact important sur la forme que prenaient ces démarches. Nous reviendrons ensuite sur les changements politiques actuels qui créent le besoin de restructuration des démarches régionales. Nous traiterons de la manière dont se passe cette restructuration dans les différentes régions. Et finalement, nous présenterons une typologie préliminaire des nouveaux profils que prennent les démarches régionales en DS.

Contexte des démarches régionales en développement social

En termes de contexte, trois éléments semblent prendre une importance particulière, soit le rôle des CRÉ, celui du Plan d’action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale (PAGSIS) et la structuration du DS au niveau supralocal. Le concept de territoire supralocal, rendu parfois par le terme territorial, fait référence aux territoires intermédiaires entre le local et le régional au sens des régions administratives. On parle surtout de territoires de MRC, mais il peut s’agir aussi d'arrondissements, par exemple à Montréal, ou de villes exerçant des fonctions de MRC comme l’agglomération de Longueuil. Le local pour sa part fait référence aux municipalités en dehors des agglomérations et aux quartiers en milieu métropolitain. Néanmoins, cette distinction entre le local et le supralocal n’est pas définitive.

Les CRÉ, mises en place en 2004, avaient graduellement pris de plus en plus d’importance en DS et pour la concertation en DS au niveau des régions. Par la signature d’ententes spécifiques avec des ministères et des partenaires nationaux et régionaux, les CRÉ finançaient des projets dans différents secteurs liés au DS (immigration, aînés, réussite éducative, etc.). Elles pouvaient aussi financer la concertation dans ces secteurs ainsi que les démarches régionales en DS. Ces démarches régionales étaient, pour environ la moitié des régions, animées par les CRÉ, par le biais de commissions ou de tables régionales en DS. L’autre moitié était constituée de tables autonomes, ayant ou non une personnalité morale, financées en partie ou en majorité par des ententes spécifiques. Notons cependant le cas de l’Estrie où il n’y a eu financement de la CRÉ qu’à compter de 2014 dans le cadre de l’Alliance issue du PAGSIS. Les CRÉ agissaient en tant que fiduciaires et partenaires de ces ententes. On comprend donc l’impact de l’abolition des CRÉ sur ces démarches, impact sur lequel nous reviendrons.

Le PAGSIS a joué un rôle important pour la structuration de la concertation en DS dans certaines régions. Un volet du PAGSIS impliquait une concertation régionale et supralocale pour définir les projets de lutte à la pauvreté à mettre en œuvre sur les territoires. En Abitibi-Témiscamingue, par exemple, cela a amené une grande mobilisation qui a permis de créer des alliances au niveau des MRC et une alliance régionale qui jouait le rôle de concertation en DS. À Longueuil et en Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, le PAGSIS a aussi suscité la création d’un comité intersectoriel de concertation en DS. Cette dernière région a aussi opté pour une approche territoriale intégrée (ATI) et la mise sur pied de comités supralocaux. Dans d’autres régions, le PAGSIS a permis un meilleur arrimage entre les différents secteurs d’action en DS. Notons cependant le cas de la Côte-Nord où le PAGSIS est venu remplacer, avec des résultats qui n’ont pas été très structurants, une démarche régionale en DS. On voit donc que le PAGSIS a eu une influence sur la forme qu’a prise la concertation en DS dans certaines régions.

Notons finalement que dans certaines régions la concertation en DS est structurée essentiellement au niveau régional, tandis que dans d’autres régions elle l’est aussi au niveau supralocal. La relation entre les concertations supralocales et régionales varie d’une région à l’autre, mais chaque concertation supralocale délègue en général un représentant au palier régional. Cette structure à deux niveaux a évidemment un impact sur la restructuration que connaissent les démarches régionales en DS.

Période de changements

À l’automne 2014, le gouvernement du Québec annonçait une série de mesures, dans un cadre d’austérité budgétaire, ayant un impact sur le DS et la concertation en DS au Québec. Soulignons en particulier l’abolition des CRÉ, la fusion des CSSS au niveau régional dans des CISSS/CIUSSS et le transfert de responsabilités vers les MRC et les municipalités. Ces mesures ont eu différents effets dont le recentrage des ministères sur leur mission sectorielle et la génération d’un climat d’incertitude peu propice à l’engagement des acteurs locaux et régionaux dans des démarches concertées. Il faut noter aussi d’autres éléments qui s’ajoutent au contexte de changement, en particulier l’annonce de la fin du financement de R2, QEF et d’AE, ainsi que l'annonce du soutien transitoire offert par la Fondation Chagnon aux démarches régionales en DS.

La fermeture des CRÉ, confirmée par l’adoption du Projet de loi 28 en avril 2015 (Québec, 2015, chapitre 8), s’est réalisée à vitesse variable dépendamment des régions et se terminera en mars 2016 dans les derniers cas. Cette abolition est celle qui a le plus d’impacts sur le DS, car elle implique la perte des fiduciaires et d’un ensemble d’enveloppes budgétaires finançant des projets dans des secteurs du DS (immigration, aînés, réussite éducative…), la concertation dans ces secteurs, ainsi que la concertation globale en DS comme telle. De plus, elle amène la fin des activités de concertation régionale prenant place à la CRÉ, en particulier celle en DS. L'abolition des CRÉ signifie aussi la perte d'un partenaire majeur du DS lié à l'appareil gouvernemental et une certaine fragilisation de la reconnaissance du DS au niveau de l'action publique. Notons que cette abolition concorde aussi avec la fin du PAGSIS qui couvrait la période 2010-2015, fin qui met un terme au financement des concertations régionales qu’étaient les alliances pour la solidarité et l’inclusion sociale du PAGSIS. Un nouveau plan d’action gouvernemental pour la solidarité et l’inclusion sociale est cependant attendu à moyen terme sans que l’on sache quelles modalités ni quel financement il comportera.

Au-delà de l’impact financier, l’abolition des CRÉ amène souvent une perte de cohésion régionale. On observe dans plusieurs régions un mouvement de repli des différents acteurs vers les territoires de MRC. La politique gouvernementale remet en question la légitimité même des régions administratives en établissant la « nouvelle gouverne régionale » au niveau des MRC, générant une confusion sur la notion du territoire que désigne le terme région puisque les régions administratives sont maintenues, mais réduites aux conférences administratives régionales (CAR). La loi 28 (Québec, 2105, chapitre 8) modifie ainsi les articles de la Loi sur le ministère du Développement économique et régional et de la Recherche :

126.2. Une municipalité régionale de comté peut prendre toute mesure afin de favoriser le développement local et régional sur son territoire. […]

126.3. Une municipalité régionale de comté peut conclure, avec les ministères ou organismes du gouvernement et, le cas échéant, avec d’autres partenaires, des ententes concernant son rôle et ses responsabilités relativement à l’exercice des pouvoirs que lui confère l’article 126.2, notamment pour la mise en œuvre de priorités régionales et l’adaptation des activités gouvernementales aux particularités régionales.

Dans cette loi, le local désigne le niveau municipal et le régional, le niveau MRC. Cette décision n’est pas de nature à encourager la participation de MRC dans des projets de développement régional et peut même constituer un obstacle à cette participation.

La fusion des CSSS dans des CISSS/CIUSSS dont le territoire se rapproche, hors de Montréal et de la Montérégie, des régions administratives, a également un impact majeur. Les CSSS étaient des acteurs importants du DS et de la concertation en DS au niveau supralocal, comme les Agences régionales de santé et de services sociaux et les directions régionales de santé publique (DSP) l'étaient au niveau régional dans plusieurs régions. Ce changement de gouvernance aura assurément un impact sur la façon dont les CISSS/CIUSSS interviendront en DS. Souhaiteront-ils s’engager, et de quelle façon, dans des démarches supralocales et régionales de concertation en DS? Notons aussi les coupes importantes (plus de 30 %) dans le budget de la Santé publique qui était un acteur clé du DS dans plusieurs régions.

Les fusions et les coupes dans ces institutions amènent une période de transition peu propice à leur engagement à court terme dans la restructuration de démarches régionales en DS. L’incertitude touche plusieurs autres acteurs du milieu (les commissions scolaires, les MRC, les CLD, les organismes communautaires) et se transforme, au final, en une période d’incertitude généralisée qui affecte la capacité des acteurs locaux et régionaux à s’engager dans des projets concertés de DS ou dans des démarches régionales en DS.

Il est possible que les CISSS/CIUSSS et les DSP régionales répondent aux nouvelles contraintes budgétaires en se recentrant sur leur mission sectorielle plutôt que de privilégier une approche concertée. Ce risque de recentrage des institutions publiques sur leur mission première affecte aussi les différents ministères, les autres institutions publiques locales ou régionales, telles les directions régionales d’Emploi-Québec, et même les organismes communautaires. Dans certaines régions, les directions régionales de ministères réduisent ou se retirent de tout engagement dans les démarches régionales en DS. On note aussi, dans au moins une région, la réticence d’un gestionnaire d’une institution publique à siéger sur le conseil d’administration d’une organisation ayant un statut de personne morale. Cela semble relever d’une réticence à compromettre l’administration publique dans l’exercice d’une responsabilité civile. On constate à cet égard que, dans une autre région, un CISSS a établi un moratoire sur la participation de gestionnaires à des conseils d'administration d'organismes à but non lucratif. Le principal motif justifiant ce moratoire est le nouveau rôle de bailleur de fonds du CISSS, notamment, pour le Programme de soutien aux organismes communautaires (PSOC). Ce rôle était auparavant confié aux Agences de santé et de services sociaux. Un comité rattaché au Centre d’éthique de cet établissement est actuellement mandaté pour réfléchir sur les balises qui devraient être édictées si ce type de représentation est de nouveau autorisé.

L’abolition des CRÉ et l’absorption de plusieurs CLD par les MRC se font dans une optique de transfert de responsabilités vers les municipalités et les MRC. Néanmoins, et c’est un problème récurrent, les fonds ne suivent pas ce mouvement. Les municipalités ont vu leurs transferts provinciaux amputés de 10 %; les MRC récupèrent les compétences de développement local et de soutien à l’entrepreneuriat, mais avec des coupures de 55 % des budgets des CLD. Cependant, avec ces transformations le gouvernement positionne les MRC en acteurs imputables et incontournables du développement des territoires. Notons que ce mouvement se fait en partie au détriment de l’expertise de la société civile qui s’exerçait dans les CRÉ et les conseils d’administration des CLD.

La structuration des rapports entre les MRC au niveau de la région administrative semble vouloir prendre la forme d’une table régionale des préfets. Une grande majorité des régions se dote d’une telle forme de concertation entre MRC. Le statut, personne morale ou non, de ces tables est variable. On compterait 9 régions où une telle table est constituée. La composition de ces tables peut varier, même si plusieurs tables sont composées de 2 élus par MRC (le préfet et un autre maire). Au moins une région ne semble pas vouloir créer une telle instance. Au niveau des villes de Montréal et Laval, ainsi que de l’agglomération de Longueuil, l’organisation régionale reste stable. Dans quelques régions, les tables des préfets ont démontré une ouverture à s’adjoindre un certain nombre de représentants de la société civile. On revient donc à un modèle de concertation régionale élus-société, mais de taille réduite.

Le transfert de responsabilités liées au développement économique et au développement social vers les élus locaux soulève plusieurs enjeux. C’est la conception de la démocratie et de la place de la société civile qui sont en jeu, démocratie représentative cohabitant avec démocratie participative. Les élus doivent-ils décider seuls de l’orientation du développement? La société civile est-elle en mesure de faire valoir son expertise auprès des élus? La société civile joue-t-elle un rôle co-décisionnel ou strictement consultatif? Un exemple est parlant : dans une région, la table de préfets accepte de s’adjoindre des membres de la société civile, mais désire les choisir alors que la société civile propose plutôt de désigner elle-même ses représentants. Autre enjeu, les élus fonctionnent dans le cadre d’un horizon de temps relativement court entre les élections alors que le développement se réalise sur un horizon relativement long. Aussi, le travail des élus est habituellement assez tangible, contrairement au développement (et en particulier au développement social) qui peut prendre des formes plus intangibles (renforcement de l’identité, des liens entre les partenaires, de la qualité de vie, etc.).

Néanmoins, le problème le plus important semble être le risque d’iniquités interterritoriales. Les territoires où les élus n’auront pas une préoccupation de développement social seront désavantagés par rapport aux territoires où les élus seront proactifs. Et même dans ce dernier cas, la richesse différenciée des territoires, en l’absence de régulation et de politiques redistributives étatiques, risque de mener à des iniquités interterritoriales. On peut s’attendre à voir se concrétiser un développement social à géométrie variable selon les territoires.

En plus de ces changements politiques et institutionnels, le milieu du DS connaît une transformation de l’action de la philanthropie. Avec la fin du partenariat qui avait été l’objet de controverses, la Fondation Lucie et André Chagnon et le Gouvernement du Québec ne renouvèleront pas dans les prochaines années le financement des trois fonds liés à ce partenariat (QEF, AE et R2). Les regroupements locaux de partenaires de ces sociétés de gestion se retrouvent donc orphelins de financement. D’un autre côté, à la demande de plusieurs acteurs nationaux et régionaux, la Fondation Chagnon offre à partir de 2015 un soutien transitoire d’environ un an aux démarches régionales en DS dans le but d’alléger le choc provoqué par l’abolition des CRÉ, de maintenir l’expertise et de donner la chance aux démarches de se restructurer. Ces dernières doivent trouver d’autres partenaires financiers pour compléter le levier financier de la Fondation Chagnon et sont encouragées à travailler à l’arrimage des concertations touchant le DS (saines habitudes de vie, réussite éducative, etc.) au palier régional. Du financement transitoire est aussi offert aux instances régionales de concertation (IRC) sur la persévérance scolaire et la réussite éducative liées à Réunir Réussir.

Avant d’analyser la restructuration des démarches régionales en DS, soulignons que cet ensemble de changements, même s’il peut générer certaines opportunités, implique une diminution de la capacité des démarches régionale en DS d’assurer la concertation régionale, d’appuyer les concertations supralocales et de concrétiser le DS dans les régions. L’abolition et la réorganisation des partenaires, la période de transition qui en découle, le retrait de l’engagement régional, le recentrage de certains ministères sur leur mission première, l’augmentation des responsabilités des élus sans moyens adéquats, la fin des Fonds QEF, AE et R2 sont tous des éléments qui, en fragilisant les partenaires, limitent la capacité des concertations à se restructurer et à réaliser leur mission en DS.

Restructuration des démarches régionales en développement social

Ce double contexte, la structure différenciée des concertations et la période de changements se combinent pour donner des résultats multiples. En ajoutant la réalité géographique des régions urbaines et des régions rurales, nous avons une diversité de dynamiques auxquelles doivent faire face les démarches régionales en DS dans leur restructuration. On note, à cause de ces réalités variées, que les politiques nationales n’ont pas les mêmes effets partout. Néanmoins, la mobilisation des acteurs pour la poursuite de la concertation est généralisée, même si l’implication des institutions publiques et des élus varie beaucoup d’une région à l’autre.

Actuellement, les démarches régionales en DS sont engagées dans des exercices de redéfinition et de restructuration, quand ce n’est pas dans la création d’une nouvelle structure comme telle. Cette redéfinition est en soi un espace de réflexion et de négociation entre les acteurs sur la forme que prendra la concertation régionale en DS. Les questions de la légitimité des démarches régionales, de leur rôle et de leurs liens avec le palier local sont au centre de cet exercice. La reconnaissance des démarches régionales par les acteurs régionaux et locaux est la condition principale de leur actualisation. Certaines démarches régionales en DS rencontrent des difficultés à établir des mécanismes de collaboration avec des acteurs locaux, que ce soit des élus locaux ou d’autres acteurs du milieu. La reconnaissance peut et doit aussi venir de l'État qui, en abolissant les CRÉ, a fragilisé une certaine reconnaissance du DS comme part de l'action publique. Des représentations sont enclenchées par le RQDS auprès du gouvernement sur la place du DS au Québec.

Quelques régions ont mené ou entendent mener des consultations auprès de leurs membres afin de mieux se positionner. Seules les régions de Montréal et du Bas-Saint- Laurent semblent avoir fait les ajustements nécessaires et continuer sous la même forme leurs actions concertées. Certaines régions sont actuellement sans concertation régionale en DS, mais il est intéressant de noter que toutes (à l’exception de la Capitale-Nationale) s’activent pour en développer ou en consolider une. La ville de Québec développe un projet de concertation sur son territoire, mais sans s’arrimer, pour l’instant du moins, aux autres MRC de la région de la Capitale-Nationale. Il est évident que le développement et la consolidation des démarches régionales en DS se font de façon progressive, car il est très difficile dans le contexte actuel de planifier à long terme. Prenons l’exemple de l’Outaouais qui se structure autour de l’organisation d’un forum régional en DS comme une première étape d’une démarche collective. L’absence de soutien technique rend plus difficile la reconstruction dans certaines régions.

Les régions de Montréal et du Nord-du-Québec, secteur Jamésie, conservent l’équivalent d’une CRÉ, le CSSS de Laval couvrait déjà le territoire régional et les élus de Longueuil semblent vouloir combler le vide créé par l’abolition de la CRÉ. Toutefois, même lorsque les structures ne sont pas abolies, elles connaissent des transformations importantes de leur fonctionnement. Aussi, leur support au DS n'est pas automatique. Soulignons en particulier le cas de la Jamésie où l’Administration régionale a retiré son financement à la démarche régionale en DS pour ensuite se joindre à un exercice visant le renouvellement de la concertation régionale. On constate que les grandes villes s’en tirent mieux que les régions rurales.

L’abolition des CRÉ a un impact majeur sur la concertation régionale en particulier dans les régions où la démarche se tenait sous l’égide de cette organisation. Peu de ces démarches ont la capacité de se restructurer. Dans la grande majorité des cas, ces régions doivent créer une nouvelle démarche de concertation régionale. Il semble aussi que dans les régions où les démarches avaient un historique plus important (plus de 10 ans) et dans celles où elles étaient autonomes par rapport à la CRÉ, la transformation prend plutôt la forme d’un maintien ou d’une restructuration.

Ces changements n’ont pas que des effets négatifs. Dans certaines régions, cette page blanche permet un espace pour créer une démarche qui n’existait pas, pour augmenter la reconnaissance du DS ou pour repenser la gouvernance du DS sur le territoire.

On observe dans les régions un effort important d’arrimage de la démarche régionale en DS avec les concertations plus sectorielles et en particulier celles liées aux trois fonds établis par le gouvernement du Québec et la Fondation Chagnon (AE, QEF, R2). D’une part, la Fondation Chagnon souhaite une vision régionale davantage intégrée. D’autre part, les regroupements locaux de partenaires de QEF et d’AE et les IRC en réussite éducative sont particulièrement interpellés par la restructuration des démarches, car ils sont eux-mêmes dans une période de consolidation quant à leur avenir. La restructuration des démarches régionales en DS est un moment propice à des efforts d’arrimage. Dans l’ensemble, cet arrimage semble vouloir se concrétiser, même si dans plusieurs régions l’arrimage avec certains regroupements n’est pas un succès, du moins pour l’instant.

Dans toutes les régions, les acteurs se mobilisent pour redéfinir la concertation régionale en DS et trouver une façon de la financer. Les regroupements locaux de partenaires liés à QEF et à AE ainsi que leurs pendants régionaux comme les tables intersectorielles régionales sur les saines habitudes de vie et les IRC en réussite éducative s’impliquent en fonction du rapprochement existant entre leur concertation et celle en DS. Nous avons déjà noté le rôle plus large de la Fondation Chagnon. L’appui financier qu’elle apporte est crucial pour plusieurs démarches, en leur donnant du temps pour réaliser leur restructuration. Centraide, pour sa part, est un partenaire financier dans plusieurs régions et devient même le fiduciaire de la démarche dans au moins deux régions. Dans les régions où elles sont présentes, il faut noter l’implication importante des concertations supralocales en DS en regard de la restructuration régionale.

Au niveau des institutions publiques, leur engagement est variable. Les CISSS/CIUSSS sont impliqués dans la redéfinition et le soutien humain ou financier de plusieurs démarches régionales en DS. Les DSP régionales s’impliquent et peuvent même jouer un rôle de leader dans certaines régions. Notons que, dans au moins une région, une DSP refuse d’appuyer la nouvelle démarche en DS. Certaines directions régionales des ministères semblent ne pas appuyer les nouvelles démarches, quand on ne note pas une certaine opposition. Emploi- Québec qui était un partenaire important avant 2014 dans la plupart des démarches régionales en DS serait dans certaines régions plutôt en retrait.

Les MRC occupent une place particulière dans la réorganisation de la gouvernance du DS car elles sont les seules instances politiques supralocales. L’abolition des CRÉ implique une plus grande proximité entre les démarches de DS et les élus des MRC et des municipalités. L’implication des préfets et plus largement des élus locaux ou du moins la reconnaissance qu’ils accordent aux instances de concertation, est essentielle pour la légitimité des démarches de concertation en DS. Certaines démarches régionales se questionnent (ou se sont questionnées) à savoir si elles doivent rester indépendantes ou s’associer aux Tables des préfets, comme fiduciaires ou comme responsables de la concertation régionale en DS. Dans plusieurs régions, les élus appuient activement les démarches en DS.

La restructuration des concertations régionales en DS va de pair avec celle des concertations supralocales dans les régions concernées. Les concertations supralocales vivent aussi les impacts des changements politiques avec les transitions en cours au niveau du réseau de la santé, des CLD et des MRC.

Les nouveaux profils de la concertation régionale en DS

Nous proposons ici une certaine typologie des profils que semblent vouloir prendre les démarches régionales en DS. Elle s’inspire d’une analyse de Richard Sévigny (2015), représentant de la démarche régionale de DS de l’Outaouais, présentée dans le cadre d’un cours à l’Université du Québec en Outaouais. Nous proposons quatre modèles permettant de classifier les différents exercices de restructuration. Le premier, la reconstruction difficile, est transitoire. Les deux suivants sont des formes plus permanentes, soit le développement d’une démarche de concertation régionale intersectorielle axée plutôt sur une vision de développement de la région ou plutôt sur une vision de développement supralocal. Le quatrième modèle, une entreprise de services en DS, est une nouvelle forme en expérimentation. Notons que les modèles ne sont pas exclusifs. Les régions peuvent connaître une réalité transitoire et s’orienter vers un modèle plus permanent. Plusieurs régions se trouvent aussi dans une forme hybride entre les modèles 2 et 3, ayant une concertation intersectorielle avec une vision à la fois régionale et supralocale.

1)  La reconstruction difficile

Dans certaines régions, que cela soit à l’intérieur de la CRÉ ou à partir d’une instance autonome, un fonctionnement très restreint de la concertation régionale en DS est possible jusqu’au 31 mars 2016, généralement grâce au suivi de gestion lié au Fonds québécois d'initiatives sociales. Dans d’autres régions, il n’y a plus de ressource en soutien et les démarches fonctionnent grâce à l’implication des participants. Dans ce profil, les prochains modèles de concertation restent encore à définir, des discussions sont en cours et la recherche de financement se fait actuellement auprès des membres et des MRC, mais généralement rien n’est encore confirmé. Ces régions rencontrent souvent des difficultés importantes de construction de ces nouveaux modèles, soit en raison de difficultés politiques (concurrence ou manque de leadership) et parfois aussi de difficultés administratives. Ainsi, certaines régions font face à une nouvelle inadéquation de territoire entre le territoire des MRC et le territoire de desserte du réseau de santé avec la création des CISSS/CIUSSS. Notons aussi la perte de l’expertise avec le départ de plusieurs ressources de coordination ou d’accompagnement. Dans des régions, il est à prévoir qu’il n’y aura pas, à court terme, de concertation régionale reconnue par tous.

Il est possible que la disparité des situations et des besoins entre les territoires de MRC de ces régions (urbain et rural, ou rural et rural très éloigné), qui diminue le sentiment d’appartenance à la région, rende plus difficile la reconstruction de la démarche régionale de DS. La période de changement aura mis en évidence la faiblesse du sentiment d’appartenance de différents acteurs à la région.

2)  Le modèle de la concertation à dominante régionale

Certaines régions sont déjà bien avancées dans la structuration d’une démarche de concertation régionale nouvelle ou renouvelée. Cette démarche de concertation en DS se situe dans un projet régional, avec un plan d’action régional. Elle joue un rôle d’initiatrice et de coordonnatrice de projets régionaux. Notons que ces régions peuvent avoir des concertations territoriales en DS, mais la concertation régionale se structure principalement autour d’un projet régional, plutôt que sur une coalition de projets territoriaux. La nouvelle structure en DS inclut habituellement un certain niveau d’arrimage et même de fusion avec les concertations des secteurs du DS soutenues historiquement par les trois fonds des sociétés de gestion créées par le gouvernement du Québec et la Fondation Chagnon (QEF, AE et R2). Ces concertations se sont assurées, dans l’ensemble, d’une certaine reconnaissance des élus. Il semble que ce profil soit plus courant chez les démarches régionales en DS possédant une certaine ancienneté, soit plus de 10 ans.

3)  Le modèle de la concertation à dominante territoriale

Certaines régions misent sur les concertations supralocales en DS, selon généralement le modèle de l’approche territoriale intégrée (ATI). Dans ce modèle, la structure de concertation régionale en DS sert de soutien aux concertations territoriales qui établissent elles-mêmes un plan d’action et ciblent des priorités d’intervention sur leur territoire. Ces priorités peuvent toucher plusieurs domaines (persévérance scolaire, lutte à la pauvreté, etc.). Une fois ces priorités identifiées, la concertation des différents bailleurs de fonds (Québec en forme, persévérance scolaire, pacte fiscal, etc.) est favorisée afin d’atteindre les cibles visées. Ce modèle serait privilégié dans les régions où les concertations territoriales étaient bien établies.

4)  Le modèle de la coopérative de services en développement régional

Au moins deux régions s’orientent vers la mise sur pied d’une entreprise de services professionnels en soutien à la concertation et au développement territorial. Avec l’abolition des CRÉ, les différentes concertations liées au DS (réussite éducative, économie sociale, sécurité alimentaire, etc.) sur le territoire pourraient avoir avantage à se partager les services de soutien professionnel. Les MRC pourraient aussi avoir besoin de services professionnels pour la gestion de leurs dossiers en DS. Cette approche vise aussi à conserver l’expertise professionnelle existant sur le territoire.

Ce profil a pu émerger dans des régions qui combinaient une expertise forte des accompagnateurs de démarches régionales liées au DS et peu d’intérêt de la part des élus pour le DS et la concertation régionale ou une difficulté des élus à organiser une telle concertation. Il est possible que les partenaires aient une volonté ou une capacité moindre de s’impliquer dans le développement d’une démarche régionale en DS.

Discussion et conclusion

Comme on peut le constater, ce portrait se situe au centre d’une tempête. Les acteurs sont en mouvement. On entrevoit des changements majeurs, mais il faudra attendre avant d’obtenir un portrait plus stable de la situation. Déjà on peut remarquer que les acteurs font preuve de créativité pour apporter des réponses adaptées à leur région. Ainsi, les nouvelles démarches régionales en DS prennent une diversité de formes. Elles vont évidemment continuer leurs réflexions et leurs efforts de restructuration dans les prochains mois.

En conclusion, soulignons un ensemble d’enjeux auxquels font et feront face ces démarches dans leur réorganisation. En premier lieu, le contexte d’austérité affecte tous les acteurs et cela rend, et rendra, plus difficile leur implication tant financière qu’en termes de ressources humaines, dans des concertations et des actions concertées. Il existe même un risque d’échapper des enjeux par manque de ressources. Ensuite, afin de compenser la fragilisation d'une certaine légitimité du DS qui découle de l’abolition des CRÉ, les démarches devront réussir à s’assurer un certain niveau de reconnaissance autant des organismes locaux et régionaux, des élus locaux, que de l'État. La nouvelle légitimité des démarches régionales de DS se construira à travers l’interaction de ces acteurs. Celle-ci passe nécessairement par la connaissance et la reconnaissance du DS et du palier régional par ces acteurs, ce qui exigera un grand effort de pédagogie. Soulignons aussi le rôle particulièrement important pour l’avenir du DS des élus des grandes agglomérations (Montréal, Laval, Longueuil et Québec) en raison des pouvoirs qu’elles concentrent. De plus, le contexte de transition amène une difficulté à mettre la restructuration des démarches à l’agenda des acteurs politiques et institutionnels, en particulier des MRC, des CISSS/CIUSSS et des Commissions scolaires. Finalement, les attentes envers l’intégration des différentes concertations régionales liées au DS ne sont pas toujours réalistes.

Il sera important aussi de questionner le rôle que prendra la philanthropie dans la restructuration des démarches régionales de DS et plus largement dans le DS au Québec. La Fondation Chagnon affiche une volonté de jouer un rôle plus important dans le soutien à une approche de développement des communautés. On voit aussi de nouvelles expériences comme celle de Centraide avec son Projet impact collectif à Montréal.

Terminons en soulignant que les changements actuels apportent beaucoup de pertes, mais il s’en dégage aussi des opportunités que les démarches régionales en DS travaillent à saisir. Le RQDS et la CRCOC entendent aussi continuer leur veille sur l’évolution de cette restructuration des démarches régionales en DS, afin de mieux la comprendre et de partager cette information avec les démarches régionales et territoriales en DS et leurs partenaires.

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Sévigny, Richard (2015), Émergence de nouveaux modèles d'organisation en développement social, présentation dans le cadre d'un cours de Denis Bourque et Dominic Foisy, Université du Québec en Outaouais.

pdf La concertation régionale en développement social au Québec à la fin de 2015

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1 mars 2016

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Pour citer cette note

Véronique Larose, Emily Mack, Joël Nadeau, Anne-Sophie Thomas, Gédéon Verreault. (2016). La concertation régionale en développement social au Québec à la fin de 2015. Praxis (consulté le 14 juin 2025), https://praxis.encommun.io/n/8xDi3_uwRnh1No69plE93C0cyhw/.

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