JDSO 2023 - Une méthodologie de l'ouverture et de l'imprévisibilité

Crédit: Melanie Lambrick

Cette note est un témoignage de Emmanuelle Chartrand réalisé suite à sa participation à la Journée des savoirs ouverts 2023. Pour voir l'ensemble des témoignages, accédez au carnet Témoignages des participant·es à la Journée des savoirs ouverts 2023.

En conduisant vers le Parc Lafontaine cette journée-là, dans le trafic, je me demande qui seront les personnes participantes à la Journée des Savoirs ouverts. La pensée me traverse : est-ce essentiellement un autre événement scientifique, porté par des chercheuses·eurs, hermétique aux autres secteurs de l’innovation sociale ? à la population générale ?

Dans le cadre de mon mémoire, je m’intéresse, entre autres, aux questions des injustices épistémiques et de la non participation des groupes marginalisés aux espaces réflexifs qui permettent la coproduction de savoirs collectifs. Je ressens toujours un inconfort d’aller aborder ces idées dans des événements ou des espaces académiques qui reproduisent habituellement ces rapports d’exclusion.

J’ai hâte de vivre des expériences différentes, me disais-je en conduisant.

Au début de notre animation, ma collègue et moi prenons le pouls du groupe : qui vient du milieu de la recherche ? Qui vient du milieu communautaire ? D’où venez-vous ?

Une étonnante diversité des milieux et des rôles composent alors notre groupe. J’étais agréablement surprise.

Animer un atelier comporte une part significative de risque. Le niveau de convenance de notre proposition sera-t-il le bon en regard des caractéristiques des personnes participantes ? De leurs besoins et de leurs intérêts ? Dans le cadre de ma formation en psychoéducation, j’ai appris à planifier des structures d’animation de façon exhaustive, à organiser des activités qui anticipent les moindres réactions des personnes en difficultés d'adaptation que nous accompagnons. On m’a appris à décrire dans le détail les caractéristiques des personnes qui seront présentes, à documenter intégralement leurs besoins et à mettre en œuvre les meilleures pratiques cliniques qui y répondent de façon optimale.

Et je crois pourtant qu’il est important de sortir de la logique de la prévisibilité et de la surplanification des activités de coconstruction si on aspire réellement à créer des espaces de savoirs ouverts. Ouvrir les portes qui demeurent traditionnellement érigées au devant de ces rencontres nécessite une part importante de flexibilité et d’adaptation. Pourtant, j’ai l’impression qu’on dispose de peu de repères collectifs pour réellement savoir comment s’y prendre.

Saviez-vous que l’objet disciplinaire de la psychoéducation est l’adaptation ? Les psychoéducatrices·eurs sont des spécialistes de l’adaptation.

J’ai l’impression qu’il s’agit plutôt d’une adaptation théorisée.

Devant le groupe qui participait à notre atelier à la Journée des savoirs ouverts, j’ai compris que le plus important dans ma planification de l’atelier, c’était ma posture. C’était mon repère qui me permettait de réellement mettre en action cette adaptation tant recherchée.

Je ne connaissais pas les personnes qui étaient devant moi, peu leur milieu d’appartenance, encore moins leurs expériences. Mais j’avais envie de nous faire vivre un moment d’échanges autour d’une notion fondamentalement humaine : le prendre soin.

Et malgré nos parcours différents, un constat s’impose à nous alors que nous réfléchissons ensemble à cette expérience qui émerge avant tout de l’intime : la représentation expérientielle du « prendre soin » nous est collectivement peu accessible. Colonisée par les savoirs académiques et professionnels, son substrat semble difficilement saisissable en ce jeudi après-midi.

Mais à travers des cartographies du soin composées d’exemples qui émergent du vécu de chacun·e de nous, je sens que l’on touche ensemble à quelque chose d’important.

Et c’est dans cette méthodologie de l’humilité, de la rencontre, de l’inconnu et de l’expérience que je reconnais véritablement le sens de l’approche psychoéducative permettant une adaptation réelle, vécue; une ouverture des savoirs.

J’ai hâte de revivre ce type d’expériences, pensais-je en conduisant sur le chemin du retour. 

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Intégré par Emmanuelle Chartrand, le 11 décembre 2023 11:01

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Publication

11 décembre 2023

Modification

14 décembre 2023 09:26

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