
C'est lors d'une journée très chaude de juillet qu'un contingent de Projet collectif s'est rendu jusqu'à la Maison Parent-Roback pour découvrir le centre de ressources spécialisées Co-Savoir. Nous y avons rencontré des chasseuses de trésors, des exploratrices de la mémoire collective, des combattantes contre le dogme de la nouveauté, des mages de l'accessibilité, et, nous l'espérons, des complices pour de futures aventures.
Il fait bon de se retrouver enfin à l'ombre, parmi les rangées de livres en cette journée caniculaire. Quelques membres de l'équipe de Co-Savoir, dont Fanny et Mariette, s'exclament avec enthousiasme en voyant débarquer notre petit groupe - pas moins de sept membres de l'équipe de Projet collectif (mais nous ne sommes pas dans une quête pour aller jeter un anneau magique dans un volcan).
Après nous être présentées, nous entamons notre visite des lieux. Nous nous déplaçons de bureau en bureau, nous nous faufilons entre les rayons, Fanny et Mariette nous parlent avec passion de leurs nombreux projets, nous leur posons une tonne de questions, nous dévions des sujets pour mieux y revenir. Le temps file et nous comprenons que notre mission - découvrir Co-Savoir- ne pourra être remplie en une seule visite. Et c'est très bien ainsi.
« On s'amuse en disant qu'on est la matĂ©rialisation de tous les onglets qu'on garde ouverts dans notre navigateur », lance Mariette Ă la blague.Â
À la fois centre documentaire, centre de ressources spécialisées et bibliothèque, Co-Savoir (anciennement le CDÉACF), se spécialise dans la documentation et l’information en l'alphabétisation, en éducation des adultes ainsi que dans la condition des femmes. Le centre, qui célèbre ses 40 ans cette année, est un « carrefour d'échanges et un espace d'expression qui a pour fonction de collecter, de diffuser, de promouvoir et de rendre accessibles, en français, les savoirs et les savoir-faire » au Québec et dans les communautés francophones du Canada.
Sortir de la logique de la nouveauté
Fanny, chargĂ©e de projet dans le volet condition fĂ©minine, nous explique que Co-Savoir suit les intĂ©rĂŞts et besoins de ses membres dĂ©posants quand vient le temps de garnir ses rayons et de dĂ©velopper des ressources. Ça me faire penser Ă une phrase de notre codirecteur et collègue Vincent Chapdelaine dans son billet « Suis-je toujours un bibliothĂ©caire? »: « Les bibliothèques devraient ĂŞtre beaucoup plus participatives et centrĂ©es sur leur communautĂ© — c'est aussi ça, "briser le paradigme du document".»Â
đź’ˇ Pour en savoir plus sur le paradigme du document.
En plus des monographies, les collections comprennent du matĂ©riel de formation, des rapports d'organismes, des jeux Ă©ducatifs, et plus encore (leur catalogue compte plus de 30 000 titres). Parmi les services offerts, on compte la consultation, le prĂŞt et l'aide Ă la recherche, la crĂ©ation de minibibliothèques avec et pour les groupes en alphabĂ©tisation, les trousses didactiques, les formations et la veille informationnelle. Le milieu communautaire aurait besoin d'un centre d'archives, les organismes veulent se rappeler leur histoire, nous fait-on remarquer; ils peuvent toutefois en apprendre un peu plus dans la documentation de Co-Savoir.Â
« On essaie de sortir de la logique de la nouveautĂ© », prĂ©cise Fanny. Dans cet ordre d'idĂ©e, leurs pratiques d'Ă©lagage sont moins agressives qu'ailleurs; on est vĂ©ritablement dans le care du document, et, quelque part, de la mĂ©moire.Â

Aller Ă la rencontre de l'autre
Au fil de la visite, nous découvrons que Mariette mène une double vie: bibliothécaire et chasseuse de trésors. Beaucoup de matériel pédagogique créé par des groupes en alphabétisation n'est pas numérisé et n'est disponible qu'en version papier. Mariette se déplace donc dans ces organismes pour récolter ce matériel. Le centre joue ainsi un rôle important dans la transmission de ces outils populaires; ils sont récoltés, archivés, catalogués et mis en valeur.
Nous oublions trop souvent l'importance d'aller Ă la rencontre physique des gens, du soin de cette prĂ©sence physique qui a Ă©tĂ© bouleversĂ©e pendant, et Ă la suite de la pandĂ©mie. Et nous oublions Ă©galement que le papier, c'est aussi une forme d'accessibilitĂ©.Â
Nous prenons place Ă une table pour discuter autour de thĂ© et de croissants et l'Ă©quipe nous montre quelques-uns des jeux Ă©ducatifs qui peuvent ĂŞtre empruntĂ©s par des organismes, une autre ressource formidable du centre. Je ne peux m'empĂŞcher de poser la question: c'est une grande et large vocation que de s'intĂ©resser Ă deux milieux aussi vastes que l'alphabĂ©tisation/l'Ă©ducation des adultes et Ă la condition des femmes; y a-t-il des difficultĂ©s, une sorte de tension? Fanny rĂ©pond qu'elle voit la chose comme Ă©tant symbiose entre les deux milieux. Ă€ sa fondation, le centre Ă©tait vouĂ© Ă la collecte, l'organisation, l'animation et la diffusion de l'information documentaire et des outils technologiques sur l'Ă©ducation des adultes et sur la condition fĂ©minine. Sa double mission s'inscrit donc toujours dans ce sillon historique. Tout est dans tout, comme on dit.Â
Il est presque midi, et il nous reste beaucoup à nous dire et à découvrir sur nos organisations respectives. Vous faites quoi, vous, à Projet collectif? Nous nous embarquons aussi dans une longue (et belle) aventure si nous racontons tout. Même si notre vocation est différente, je ne peux m'empêcher de remarquer une ressemblance entre Co-Savoir et Projet collectif dans cette image de pléthore d'onglets ouverts, avec nos myriades de projets, d'initiatives, de partenariats et de mandats.
Nous nous promettons une deuxième partie Ă cette visite Ă l'automne – et de troquer les croissants pour des croustilles (nous avons mentionnĂ© une tradition ludique de notre Lac-Ă -l'Ă©paule de l'estivation, le festival de la croustille de Jouvence, ce qui a piquĂ© la curiositĂ© de l'Ă©quipe). Nous repartons Ă©merveillĂ©es par tant de ressources, et aussi, de rĂ©silience, nos tĂŞtes bouillonnantes d'idĂ©es et de rĂ©flexions. Co-Savoir, c'est beaucoup d'onglets prĂ©cieux qu'on ne veut pas fermer, avec raison.Â
Au-delĂ de la dĂ©couverte du centre en lui-mĂŞme (et de la transmission de traditions un peu farfelues, mais, surtout, magiques), le but de notre visite Ă©tait aussi de crĂ©er des liens avec l'Ă©quipe, de se rappeler cette importance cruciale d'aller Ă la rencontre de l'autre, qui est aussi au cĹ“ur de la mission de Projet collectif. C'est dans cette rencontre mĂŞme que nous reconnaissons nos propres dĂ©fis, rĂŞves, possibilitĂ©s, notre propre humanitĂ©.Â