Immédiatement sous la ligne de flotaison de l'iceberg se trouve le premier niveau d'explication de la crise du logement : les tendances.
Il est très fréquent de chercher des explications simples aux problèmes complexes. Dans le cas du logement, on dit généralement qu'il y a crise car il y a trop de personnes et pas assez de logements.
Ce qu'on oublie souvent c'est :
- 1) le fait qu'il y a bien 3 grands groupes d'acteurs et non 2 pouvant expliquer la situation de crise observée : les gens, les bâtiments mais aussi l'argent.
La Financiarisation du logement est une tendance galopante dans nos quartiers centraux ces dernières années et nos premières itérations du jeu montrent que les gens n'en ont que très peu conscience. (Voir aussi : Le parc immobilier de Montréal se retrouve entre les mains des financiers)
- 2) le fait qu'une approche comptable ne suffit pas pour décrire les changements observés chez ces 3 types d'acteurs.
En effet, à nombre égal de bâtiments, de budget disponible et de personnes à loger :
- Que se passe-t-il si le but premier d'un propriétaire de type entreprise à numéros est de maximiser ses profits et d'avoir pour cela un maximum de bâtiments mais aussi un maximum de locataires qui ne veulent pas conserver leurs logements longtemps ? (Ces nouveaux logements sont souvent peu adaptables, sans lumière ou verdure suffisante et ne permettent pas d'accueillir un conjoint ou une famille. On les quitte par conséquent plus souvent et cette rotation plus grande facilite l'emballement des loyers);
- Que se passe-t-il si les baby boomers propriétaires arrivent massivement à une étape de leur vie qui leur impose de quitter le logement qu'ils ont occupé des décennies durant et qu'ils veulent eux-aussi maximiser leurs profits au détriment des jeunes générations ? (on assiste effectivement en ce moment à un transfert de patrimoine sans équivalent dont on ne connait pas les impacts sur la capacité des autres générations à se loger);
- Que se passe-t-il si toutes les personnes vivant ensemble décident de vivre seules ? (L'isolement croissant est effectivement une tendance);
- Que se passe-t-il si tous les propriétaires de duplex en font des résidences unifamiliales ou si tous les enfants occupent plusieurs maisons en même temps au lieu d'une ? Le nombre de m2 par personne y compris avec l'augmentation des familles recomposées augmente effectivement. Les canadiens sont même des champions mondiaux des pièces vides par habitant avec 2,6 pièces par habitant en moyenne. Non pas tant parce que les canadiens habitent de plus en plus seuls mais parce qu'ils consomment encore plus de m2 que les américains !
- Que se passe-t-il si un fort % de nos bâtiments doit être démoli ou rénové en même temps parce qu'on a bâti tous ces bâtiments sans soin à la même époque et qu'on ne les a pas suffisamment entretenus ensuite ?;
- Que se passe t-il si vous avez un bon salaire mais que votre situation géographique ou personnelle vous oblige à des dépenses extraordinaires pour être en mesure de satisfaire vos autres besoins essentiels (d'alimentation, de transport, de santé...) ?;
- etc.
En plus des chiffres, il faut donc AUSSI considérer ce que ces 3 acteurs sont, font et deviennent.
Pour savoir s'il y a eu changement et que celui-ci concerne bien nos deux quartiers, il est par ailleurs nécessaire d'apporter des preuves les plus solides possibles à ce qu'on avance (données statistiques et de recherche notamment). Sans ces preuves, il est difficile, par exemple, d'affirmer que Centre-Sud et Hochelaga-Maisonneuve sont des quartiers qui accueillent un nombre croissant d'étudiant-es, de travailleurs temporaires ou de réfugiés et que ça pose des problèmes de logement au reste de la population.
Pour savoir si on pourra conserver ou non une carte tendance dans le jeu, on doit pouvoir s'appuyer sur l'outil annexe "Cartable des pièces à conviction". Cet outil, spécifique aux quartiers considérés, également collaboratif et amélioré en continu, est mis à disposition des participant-es en même temps que le jeu.