Cette note résume des discussions soulevées lors de la 2e phase du processus de recherche-action « Aller du bord de l'exclusion » effectuée par COSMOSS entre 2013 et 2015, dans le but de proposer des moyens et outils pour mieux rejoindre les personnes vulnérables et éloignées des services de soutien.
De nombreuses stratégies indirectes ont été identifiées lors de la recherche-action, à commencer par le fait de faire appel aux personnes clés de la communauté. C’est-à-dire, recruter des personnes intermédiaires dont le leadership, officiel ou non, est reconnu. Elles peuvent alors devenir des personnes pivots, des « antennes » dans le milieu. Recourir à l’entourage, comme des voisins ou des amis, ou encore proposer des activités « prétextes » (comme une aire de jeux destinée aux enfants pour rencontrer les parents) sont également des stratégies qui se sont avérées gagnantes. La contribution aux dépenses occasionnées par la participation des personnes à des activités ou services est également mentionnée comme favorisante.
Faire appel aux personnes clés de la communauté
Faire appel à des personnes intermédiaires dont la communauté reconnaît le leadership, que ce soit de manière implicite pour leurs qualités personnelles, ou de façon plus visible étant donné les fonctions qu’elles occupent, permet souvent « à ceux qui étaient plus réservés et isolés de s’ouvrir », car « ce sont des gens en qui ils ont déjà confiance » :
💬 « Ces gens-là sont non menaçants parce qu’ils vivent déjà avec les citoyens du village, ils sont déjà bien ancrés, puis les gens des municipalités leur font déjà confiance, ils sont déjà impliquésou sur les services des loisirs, ou comme directeur de la municipalité, ou chef pompier ». (Entrevue 4)
Par conséquent, avoir des « antennes » dans la communauté, développer « un regard ou une lecture pour chacun des villages » pour savoir comment s’y prendre, car « c’est à renouveler tout le temps, les gens changent », et pouvoir disposer d’un réseau diversifié de contacts permettent decibler les personnes les plus pertinentes selon l’objectif poursuivi. Le curé, la direction de la municipalité, des membres de l’équipe de bénévoles de la bibliothèque ou de la joujouthèque sont quelques-uns des exemples mentionnés par les répondants. Ce que font ces derniers semble néanmoins moins important que la façon dont ils le font.
💬 « […] mon but étant de créer un lien avec les personnes qui travaillent au dépanneur, car ellesconnaissent tout le monde qui vient là, donc elles peuvent savoir si Monsieur X qui vient chercherune pinte de lait, ça fait deux ou trois fois qu’il n’a pas l’air bien. Eux peuvent me référer ». (Entrevue 2)
Recourir à l'entourage
Interpeler le voisinage direct des personnes visées s’avère également un moyen évoqué par des répondants pour briser l’isolement, diffuser l’information, ou référer à du soutien.
💬 « C’est qui la personne la plus proche? Ah, personne… OK, elle a personne, pas d’enfants. Elle as-tu un voisin? Qui fait la référence? Ah bien, c’est le voisin qui nous en a parlé? Ah, dans ce cas, on peux-tu parler avec le voisin et s’allier avec le voisin? Puis de voir comment, il la connaît bien plus que nous. ». (Entrevue 13)
Dans certains cas, les répondants suggèrent aux personnes qui leur font part de difficultés vécues par leurs proches de tenter de convaincre ces derniers d’entrer en contact avec eux, ou de les accompagner à la ressource. Dans un autre ordre d’idées, des intervenants rapportent demander à des représentants impliqués dans des démarches de concertation de recruter eux-mêmes des personnes directement concernées par les problématiques traitées.
Passer par des activités indirectes (prétextes)
Mettre en place des activités, qui font office de prétextes pour attirer de façon détournée une population cible dans l’optique d’en rejoindre une autre, apparaît un procédé profitable, selon des répondants. Dans certains cas, le prétexte utilisé est réfléchi et conçu de façon à répondre à un objectif prédéterminé, par exemple de sensibiliser la population de tout le territoire d’une MRC sur les ressources et les services existants :
💬 « On avait besoin d’un produit d’appel, ça prenait ça […] Ça a été simple, j’ai appelé les directeurs ou ceux qui organisaient les festivals : “j’ai un mur d’escalade mobile, est-ce que je peux venir m’installer? C’est quand, les temps familiaux, etc.? ” Tu arrives trois heures avant, tu montes ton mur, tu installes tout, le panneau des ressources. Les enfants viennent grimper, les parents viennent jaser, parfait! » (Entrevue 4)
Dans d’autres situations, l’activité est conçue spécifiquement pour ouvrir une porte, « et ensuite, on ouvre à autre chose ». Celle-ci ne fait pas nécessairement partie de la programmation régulière; elle devient « un prétexte finalement » pour attirer une population cible vers les services offerts. Quelquefois, une action entreprise de façon quelque peu fortuite génère des retombées imprévues.
💬 « Le tricot a apporté beaucoup, c’est assez incroyable. Projet tricotage : première rencontre cette année, nous étions 12. Dans notre idée, on veut faire du tricot graffiti […] Il y avait des femmes que je n’avais jamais vues, qu’on a connues grâce au tricot, qui ont connu d’autres femmes, et qui connaissent maintenant la totalité de [l’organisation]. Y’en a qui ont commencé [un programme], d’autres des activités ». (Entrevue 1)
En savoir plus
🟣 Poursuivre la lecture vers l'entretien sur les stratégies de visibilité
🟠 Consulter l'entretien sur les stratégies directes pour joindre les personnes
🟢 Accéder au résumé des éléments de discussion de la recherche-action
