Comment initier des changements de comportement significatifs dans des milieux urbains diversifiés?
La création de liens et d’espaces de parole entre les communautés et les organisations qui leur rendent service est un levier crucial de la transformation des quartiers et des pratiques.
Le 13 mars 2025, à l'occasion d'un atelier durant l'Expo Montréal en commun, des représentant·es de Solon, Collectif Récolte et Hoodstock ont fait découvrir, en s'appuyant sur des cas concrets, leurs méthodologies et apprentissages pour changer les habitudes de la population, impliquer des parties prenantes et réaliser des projets inclusifs.
L'activité a permis de réfléchir collectivement aux défis et aux conditions de succès des approches «par et pour» comme outils de transformation des quartiers.
📌 Cette note fait partie de la synthèse des ateliers de l'Expo Montréal en commun qui a eu lieu le 13 mars 2025 au Palais des congrès de Montréal.
🎤 Les panélistes
Daphné Le Templier
SolonMaryse Paquette
Collectif RécolteFatima Gabriela Salazar Gomez
Hoodstock
Les organisations porteuses
🏘️ Solon
Solon est un collectif montréalais qui accompagne des projets citoyens autogérés dans leurs quartiers. Né d'une initiative de voisin·es souhaitant agir autrement, Solon est devenu un organisme à but non lucratif.
Il intervient principalement dans trois domaines :
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Les tiers-lieux et espaces collectifs : Solon soutient la création d'ateliers de vélo communautaires, d'épiceries solidaires et d'espaces tels que l’Espace des possibles dans le quartier de la Petite-Patrie, qui est maintenant autonome. Il existe un espace similaire à Ahuntsic.
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La mobilité : Des projets comme LocoMotion, qui est devenu une OBNL indépendante, sont issus de ce volet.
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La concertation autour de la transition socioécologique : Solon initie et accompagne des initiatives dans divers quartiers montréalais.
🥗 Collectif Récolte
Le Collectif Récolte est une entreprise d’économie sociale qui travaille sur la sécurité alimentaire et l'alimentation locale, durable et solidaire. Ils mettent en place des initiatives innovantes dans le monde alimentaire.
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Leur programme phare, Levier Solidaire, accompagne les organismes communautaires ayant des projets axés sur la sécurité alimentaire auprès des populations vulnérables.
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Le Collectif Récolte a mené une réflexion pour mieux inclure les communautés marginalisées, notamment les communautés autochtones, dans leurs actions. Ils ont établi un partenariat important avec la Coop Nitaskinan pour faciliter ce travail.
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Un exemple de projet est leur collaboration avec All Nations Gathering Place à Kahnawake, qui œuvre pour la sécurité alimentaire des communautés autochtones à travers la production, la transformation et la distribution alimentaire.
✊🏾 Hoodstock
Hoodstock est un organisme communautaire situé à Montréal-Nord, né d'un collectif militant à la suite des manifestations suite au décès du jeune Fredy Villanueva. Devenu un OBNL, sa mission vise à éliminer les inégalités systémiques, sociales et raciales que vivent les communautés racisées et noires.
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Hoodstock implique directement l'embauche de personnes issues du quartier pour la mise en place de ces projets.
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L'organisation mène également des actions en justice réparatrice, organise un camp artistique pour les enfants demandeurs d'asile et un projet de travail de milieu.
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L'approche « par et pour » est au cœur de leur démarche, assurant l'implication des communautés locales dans leurs projets.
L'approche « par et pour » incarnée dans les pratiques
👂 Se mettre à l'écoute des besoins locaux
L'approche «par et pour» est fondamentale dans les projets de Solon, en particulier dans les tiers lieux. Elle se déploie en accompagnant des quartiers et en mettant en place des espaces où les initiatives sont autogérées par la communauté.
Dans le quartier de la Petite-Patrie, l’Espace des possibles est né d'une collaboration avec des acteurs locaux et il est désormais géré de manière autonome par les citoyen·nes, répondant directement aux besoins du quartier.
À Ahuntsic, l'approche a consisté à se mettre à l'écoute des besoins locaux. La communauté faisait face à un désert alimentaire, l’Espace des possibles dans ce quartier a pu donner les moyens à la communauté de s'organiser, menant à la création d'un collectif d'achat et d'une épicerie solidaire.
L'agilité, la flexibilité et l'identification des bonnes personnes dans la communauté sont des leviers essentiels pour Solon.
💬 Aller directement à la rencontre des communautés
Pour le Collectif Récolte, l'approche «par et pour» est née d'une autocritique reconnaissant qu'ils soutenaient principalement les organismes les plus établis via des appels à projets, excluant des communautés marginalisées, notamment autochtones.
Le déploiement de leurs projets se traduit désormais par un engagement proactif auprès de ces communautés, avec un accent sur l'écoute, l'humilité et l'adaptation de leurs méthodes.
Pour travailler avec les communautés autochtones, ils ont établi un partenariat clé avec la Coop Nitaskinan et ont privilégié la rencontre directe des communautés plutôt que les appels à projets.
Cette approche demande de prendre le temps de bâtir des relations de confiance et d'adapter les outils et méthodes de travail à la réalité des partenaires.
🫱🏾🫲🏿 Privilégier la création d'emplois rémunérés pour les communautés marginalisées
Pour Hoodstock, l'approche «par et pour» est essentielle et inscrite dans la genèse même de l'organisme : « Rien pour nous sans nous! ».
Elle se déploie concrètement par l'embauche de personnes issues directement du quartier de Montréal-Nord pour la mise en place de leurs projets. Par exemple, le projet de mobilité active par le vélo a embauché neuf personnes, dont sept sont de Montréal-Nord, racisé·es ou noir·es, issues directement ou indirectement de la communauté immigrante.
Hoodstock privilégie la création d'emplois rémunérés pour les communautés marginalisées plutôt que de se reposer sur le bénévolat, reconnaissant les inégalités économiques existantes.
Pour cette organisation, cette approche «par et pour» permet d'intégrer des réflexions plus riches et d'éviter les angles morts, car les personnes qui vivent dans le quartier au quotidien apportent une expertise unique.
L'approche «par et pour» : quels défis et quels leviers?
Délais, manque de reconnaissance, contraintes de financement… mais aussi agilité, engagement citoyen et alliances solides. Les trois organisations partagent les défis concrets rencontrés sur le terrain et les leviers qui leur ont permis de faire avancer leurs projets en restant fidèles à leurs valeurs.
🕝 Relever le défi du temps
Pour Solon, un défi majeur est que déployer une approche véritablement «par et pour» prend un temps considérable.
Leurs conseils pour la mise en place d'une approche « par et pour »:
Il est crucial de prendre le temps nécessaire au déploiement d’un projet et de trouver les bons intermédiaires au sein de la communauté pour les appuyer.
Il est souvent judicieux d’aller à la rencontre des gens et des initiatives déjà existantes.
L'agilité et la flexibilité sont des postures essentielles et elles constituent des leviers qui facilitent l’action.
Avoir des élu·es et des fonctionnaires qui croient aux projets et qui sont prêts à expérimenter, est également un levier important.
L'idée est d'apprendre ensemble et de faire confiance à l'agentivité des résident·es.
🚧 Déjouer les barrières pour connecter avec les communautés
Au départ, le principal frein rencontré par le Collectif Récolte a été le manque de connexion avec les communautés autochtones. Leur approche par appels à projets favorisait les organismes établis, excluant des groupes marginalisés. Ils ont ainsi décidé d’aller directement à la rencontre des communautés. Ils ont adopté une approche d'écoute, d'humilité et d'adaptation.
Un autre frein a été les limites territoriales imposées par les bailleurs de fonds, comme dans le cas du projet Salim qui visait Montréal, alors que leur partenaire autochtone principal était à Kahnawake.
La différence de moyens financiers et de structure des organismes partenaires a également été un défi.
La flexibilité dans leurs méthodes de travail et l'ajustement du financement pour tenir compte des besoins des partenaires ont aussi été des leviers déterminants.
👥 Construire une réponse citoyenne aux freins structurels
Un frein majeur a été le manque de vision claire de la part des élu·es de l'arrondissement concernant la mobilité durable et active à Montréal-Nord.
L'inconstance des ressources humaines au sein du comité de mobilité de l'arrondissement a également représenté un obstacle.
Cependant, plusieurs leviers ont permis à Hoodstock de faire face à ces défis:
La création de l'Association pour la mobilité sécuritaire de Montréal-Nord, un regroupement citoyen mobilisé pour des aménagements sécuritaires, a montré un engouement communautaire.
Le plan de développement social de Montréal-Nord, issu d'une consultation citoyenne priorisant la mobilité durable, a aussi été un levier important.
L'implication active de citoyen·nes motivé·es et expert·es au sein des comités a facilité le recrutement de personnel compétent et ancré dans la communauté.
