Forum régional sur l'immigration : Sur l'adéquation entre l’offre et la demande en emploi

Cette note fait partie du Portrait et diagnostic de la situation dans la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent (2008) et est complémentaire au chapitre sur les Cinq conditions essentielles à l'intégration des personnes immigrantes.

 

Synthèse des constats et données sur la quatrième condition optimale de succès : L'adéquation entre l'offre et la demande en emploi

 

Malgré des fermetures d’usines et le départ de grandes entreprises, le territoire de la CRÉ peut offrir des emplois dans plusieurs secteurs de la fabrication et des services, et ce, dans plusieurs créneaux d’avenir. Il faut cependant en prendre conscience et le faire savoir. On reconnaît que l’immigration peut jouer un rôle efficace à plusieurs égards sur le marché du travail qu’il s’agisse de réduire les effets de la pénurie de main-d’œuvre ou de combler le nombre de postes vacants. Mais, il faut éliminer certaines barrières et établir des liens efficaces entre les organismes en emploi et en immigration de même qu’avec les entreprises pour assurer une bonne adéquation entre l’offre et la demande.

 

Des secteurs à considérer

La Vallée-du-Haut-Saint-Laurent semble être en pleine reconversion économique, des secteurs traditionnels tels que le caoutchouc ou le textile qui cèdent la place à des créneaux prometteurs dans le domaine de la métallurgie, de la plasturgie et du transport et de la logistique ou de l’environnement. L’agriculture et l’agroalimentaire sont également en demande de main-d’œuvre. Le secteur des services et du commerce de détail représente plus de deux mille emplois dans la région. Voici un bref aperçu des entreprises et des emplois présents dans la VHSL :

  • Le transport et l’entreposage regroupe 822 entreprises et 4 950 emplois.
  • La construction compte 1 369 entreprises et 3 735 emplois (4 % de l’emploi total de la CRÉ et 26 % des emplois de la Montérégie).
  • La fabrication compte 629 entreprises et plus de 17 000 emplois. Ce secteur représente seulement 19 % des emplois au total par rapport à 23 % en Montérégie. À noter: Beauharnois-Salaberry compte 5 700 emplois dans ce secteur pour 27 % de sa population active.
  • Le secteur de l’agriculture compte 787 établissements et quelque 5 570 emplois (6 % de l’emploi total de la CRÉ et 32 % des emplois de la Montérégie).
  • Parmi les sous-secteurs de la fabrication, la CRÉ compte 101 entreprises dans le secteur de la transformation métallique (deuxième, usinage compris, et troisième transformation) qui fournissent 2 350 emplois. Si on ajoute les 58 entreprises (2524 emplois) des secteurs apparentés (première transformation, matériel de transport, grossistes), on obtient alors un grand total de 159 entreprises et 4 874 emplois.
  • La fabrication d’aliments et de boissons compte 72 entreprises (2 485 emplois).
  • La fabrication de meubles regroupe 60 entreprises qui créent 590 emplois.
  • La fabrication de machines compte 56 entreprises pour 785 emplois.
  • Parmi les sous-secteurs des services, la CRÉ compte 1 371 commerces de détail (13 880 emplois).
  • Les services professionnels, scientifiques et techniques comptent 804 entreprises pour 3 865 emplois.

 

Des conditions de travail et des exigences inégales

Si on retrouve des emplois de qualité dans la région, il reste que les conditions de travail sont différentes d’un secteur à l’autre. Par exemple, le secteur de l’agriculture est constamment à la recherche d’employés, mais surtout sur une base saisonnière.

 Le secteur agricole, souvent saisonnier, offre des emplois qui ne correspondent pas toujours aux compétences des immigrant·es, et ne leur permettent pas nécessairement de sortir de la précarité. Le secteur de la transformation propose des emplois de manœuvre fluctuants, mais aussi des postes techniques et professionnels, bien que les entreprises n'aient pas toujours les moyens d'embaucher à ce niveau. Le secteur de la chimie offre de bonnes perspectives pour les personnes hautement qualifiées, contrairement à d'autres secteurs comme la plasturgie, le bois et la métallurgie où l’environnement de travail peut être moins intéressant. Le secteur des services représente près de 70 % des emplois locaux. Malgré des emplois de qualité, il y a un manque de main d'œuvre qualifiéeé Les PME ont des difficultés à intégrer les immigrant·es, car elles n'ont pas de structure d'accueil et recherchent une efficacité immédiate

 

Les vocations spécifiques des MRC de la région

Chacune des MRC a des besoins spécifiques en termes d’emploi, compte tenu de la concentration d’entreprises qui y sont établies. Voici un survol de la situation par MRC.

Beauharnois-Salaberry

La MRC de Beauharnois-Salaberry a une économie qui reposait traditionnellement sur la grande industrie, mais ce secteur est en déclin. La cessation récente de production de pneus chez Goodyear en est un exemple frappant. 

La région compte 1 650 entreprises et 21 415 emplois, dont la majorité (près des deux tiers) se situent dans le secteur des services. Le secteur manufacturier est toutefois important, représentant le tiers des emplois avec 5 705 postes. Les sous-secteurs principaux sont la transformation métallique, les produits chimiques, les plastiques, les composites, les produits du bois et les meubles. On y trouve aussi de nombreuses entreprises de sous-traitance en usinage et produits métalliques.

Malgré un taux de chômage élevé, il y a une pénurie de main-d'œuvre qualifiée. L'agriculture est bien structurée, mais la transformation est limitée et il est difficile de recruter et de fidéliser des employés. Le territoire agricole, qui représente 77 % de la MRC, est principalement axé sur la culture du maïs-grain et l’industrie laitière. La MRC possède un réseau hydrographique utilisé pour l'énergie (centrale de Beauharnois) et le tourisme, et le canal de Beauharnois divise la région en deux. La spécificité de la MRC est donc ce mélange entre un secteur industriel en difficulté et un secteur agricole important et structuré.

Vaudreuil-Soulanges

La MRC de Vaudreuil-Soulanges connaît une forte vitalité économique, avec une croissance notable dans les secteurs industriel et commercial. Le territoire compte 2 607 entreprises et 22 950 emplois, principalement dans les services (76%), la fabrication (15%) et le secteur primaire (9%)1. La fabrication est axée sur les produits en papier, les machines, et les produits informatiques, électroniques et électriques.

Les secteurs du transport, de la logistique, de l'environnement, de la santé et de l’aéronautique sont également présents. L’agriculture, avec près de 500 entreprises, se concentre sur la production de céréales, de protéagineux, de fourrage, la production laitière et bovine. Un besoin en travailleur·es spécialisé·es, scolarisé·es et expérimenté·es est souligné pour soutenir le développement des entreprises.

Roussillon

La MRC de Roussillon concentre le tiers des emplois de la région dans le secteur de la fabrication, avec une prédominance pour la métallurgie (produits métalliques, machines, matériel de transport). On y trouve aussi des entreprises dans la fabrication de produits en bois, minéraux non métalliques, en papier, et dans l'imprimerie. Le secteur agroalimentaire est également présent, avec une production axée sur les légumes, les céréales, les oléagineux et l'élevage. La MRC compte 3 218 entreprises et 32 530 emplois, dont la majorité (76 %) se situent dans le secteur des services.

Les domaines principaux sont l'enseignement, les services aux entreprises et le commerce de gros. On y trouve aussi une forte concentration dans le transport et l'entreposage. La MRC fait face à un manque de travailleurs spécialisés, notamment en soudure, et dans certains emplois agricoles.

Au total, le territoire des Roussillon compte 3 218 entreprises et 32 530 emplois (36 % de tous les emplois de la CRÉ).

Les Jardins-de-Napierville

La MRC des Jardins-de-Napierville est une région essentiellement agricole, avec 97% du territoire dédié à cette activité. Elle accapare 34% de la production agricole de la région. Le secteur maraîcher y est important avec la culture d'une centaine de légumes, ainsi que l'agrotourisme. La production est concentrée pendant l'été et génère souvent des surplus.

Le secteur des services y est moins présent que dans le reste du Québec. On y dénombre 1 085 entreprises et 8 185 emplois. Environ 24% des entreprises locales sont dans le secteur primaire. La MRC fait face à une pénurie de main-d'œuvre dans la fabrication et la production, due au vieillissement de la population. Les emplois adaptés aux profils des personnes immigrantes y sont moins nombreux. )

Le Haut-Saint-Laurent

La MRC du Haut-Saint-Laurent est caractérisée par une prédominance rurale et agricole, avec 67 % de la population vivant dans des zones agricoles. L'agriculture occupe 93 % du territoire et représente environ 20 % des emplois. Les secteurs principaux sont le maïs, le soya, l'élevage, les cultures maraîchères, la pomiculture et l'acériculture. La MRC compte 694 entreprises et 6 290 emplois, dont environ 17 % dans la fabrication et un peu plus de la moitié dans les services. Le secteur des services y est plus faible comparé au reste du Québec. La région fait face à des défis de relève et de recrutement de main-d'œuvre. Les emplois adaptés aux profils des personnes immigrantes y sont moins nombreux. On note une bonne diversification dans la production agricole.


L’impact des départs à la retraite

L’immigration peut répondre à court comme à moyen terme au phénomène des départs massifs à la retraite. Bien qu’elle puisse répondre en partie aux besoins urgents, il faut éviter les chocs et planifier les besoins. On peut, par exemple, favoriser les départs progressifs (temps partagé avec les nouveaux employés) et le partage de connaissances entre les employés potentiels et les futurs retraités en planifiant des périodes de transition.

  • 83 000 travailleurs devraient prendre leur retraite entre 2006 et 2010 en Montérégie et environ 30 000 sur le territoire de la CRÉ. La demande excédentaire de main-d’œuvre peut engendrer une hausse des salaires ou encore favoriser l’adoption de stratégies de concentration des activités ou de mécanisation. Mais, elle peut aussi encourager le retrait de certains marchés.
  • Quoi qu’il en soit, 44 000 postes devraient être créés, suivant une hausse moyenne annuelle de 1,3 %, en Montérégie.

 

Les besoins différents des PME

Les petites entreprises du secteur de la transformation vont généralement s’opposer aux grandes entreprises en matière d’immigration, notamment parce qu’elles n’ont pas les ressources pour faciliter l’accueil et l’intégration des personnes immigrantes. Voici les motifs invoqués : l’absence de structure d’accueil au sein des petites entreprises rend difficile l’intégration des personnes immigrantes.

En plus, les petits entrepreneurs vont souvent exiger une efficacité initiale de 100 %, parce que leur marge de manœuvre est mince. Ils considèrent que l’embauche d’une personne immigrante peut représenter un risque plus élevé pour un petit entrepreneur que pour une grande entreprise.


Les obstacles liés à la langue et aux compétences

Dans le secteur des services, en particulier le commerce de détail, la langue représente un obstacle important pour les personnes immigrantes. Les employeurs s'inquiètent souvent de la réaction de leur clientèle face à des employé·es qui ne maitrisent pas le français. En ce qui concerne les compétences, les employeurs ont des perceptions partagées quant à la reconnaissance des acquis à l'étranger.

  • Les problèmes de langue sont une préoccupation majeure pour les employeurs, surtout dans le secteur des services où le contact avec la clientèle est fréquent.
  • La formation acquise à l'étranger n'est considérée comme équivalente à celle acquise au Canada que par la moitié des employeurs, bien que ce pourcentage augmente chez ceux qui ont déjà embauché des immigrant·es.
  • La vérification de l'expérience de travail acquise à l'étranger est une difficulté soulignée par les employeurs.
  • Les personnes immigrantes peuvent se retrouver dans des emplois tremplins, pour lesquels elles sont surqualifiées, avec des salaires plus bas.
  • Le processus de reconnaissance des acquis est long et ardu, ce qui peut être frustrant pour les travailleur·euses immigrant·es.

Des personnes immigrantes bien formées

Les immigrants sont pourtant nombreux à posséder une formation intéressante pour les secteurs des services professionnels, scientifiques et techniques. Cette expertise pourrait être valorisée au profit des entreprises locales (par exemple, en lien avec l’environnement). Rappelons quelques chiffres éloquents :

  • Sur les 36 228 personnes admises au Québec en 2007, 33,8 % d’entre elles possédaient plus de 17 années de scolarité (16,5 % pour l’ensemble des Québécois). Quelque 31,4 % des immigrants possédaient entre 14 et 16 années d’études (16 % pour l’ensemble des Québécois).
  • Seulement 2,9 % des immigrants admis détenaient moins de 6 années de scolarité (25 % pour l’ensemble des Québécois) et 15 % entre 7 et 11 années (22 % pour l’ensemble des Québécois).


La participation au marché du travail

L'immigration est considérée comme un atout pour le marché du travail, les travailleur·euses immigrant·es pouvant combler des besoins en main-d'œuvre, apporter des compétences complémentaires et ouvrir de nouveaux marchés grâce à leurs connaissances linguistiques. Pour les immigrants, il est souvent question d'emploi tremplin, qui doit être temporaire afin de faciliter l'accès à un emploi de meilleure qualité. 

  • Plus de 86,5 % des hommes immigrants admis en 2007 et 65,4 % des femmes avaient l'intention de rejoindre la population active.
  • 43 % des personnes admises appartenaient à la catégorie des nouveaux travailleurs.
  • 16,3 % des immigrants projetaient de trouver un emploi dans le secteur des sciences naturelles et appliquées.
  • Selon le recensement de 2006, le taux de chômage des immigrants récents était d'environ 18 % au Québec, comparativement à 6,3 % pour la population née au Canada.
  • Le taux d'emploi des nouveaux immigrants de 25 à 54 ans n'était que de 59 %, soit un écart de 23 points de pourcentage par rapport à la population née au Canada.
  • Les hommes immigrants travaillent surtout dans le secteur des sciences naturelles et appliquées, tandis que les femmes sont plus nombreuses à projeter de travailler dans les affaires, la finance et l'administration.

L’intégration en emploi selon l’origine

Selon l’Enquête sur l’établissement des nouveaux immigrants, la facilité d’intégration en emploi n’est pas la même selon les origines. Par exemple, les gens provenant de l’Europe de l’Ouest et des États-Unis ont davantage de chance de travailler que les autres groupes au cours de leurs premières années d’établissement. Quant à ceux du Maghreb, ils sont défavorisés durant leur première année, mais leur situation s’améliore au fil du temps.

Les personnes provenant des régions d’Europe de l’Est et de l’Ex-URSS, d’Asie de l’Est et de l’Océanie de même que d’Asie de l’Ouest et du Moyen-Orient sont défavorisées quant à leurs chances nettes d’occuper un emploi alors que ceux qui proviennent de l’Amérique (autre que les États-Unis) et ceux qui sont originaires de l’Afrique (autre que le Maghreb) sont défavorisés dès leur première année. Dans ce dernier cas, la situation ne s’améliore pas au fil du temps et tend même à se détériorer.

Défis à relever

  • L’accès à des informations justes.
  • Les exigences linguistiques.
  • Reconnaissance des diplômes et des compétences acquises à l’étranger.
  • La méconnaissance de la culture des entreprises québécoises.
  • L’inadéquation entre les emplois disponibles et les aspirations personnelles.

 

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Intégré par Eve Chevalier, le 18 février 2025 15:43

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Localisation

Montérégie, QC, Canada

Publication

18 février 2025

Modification

18 février 2025 15:43

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Pour citer cette note

Véronique Larose, Emily Mack, Joël Nadeau, Anne-Sophie Thomas, Gédéon Verreault. (2025). Forum régional sur l'immigration : Sur l'adéquation entre l’offre et la demande en emploi. Praxis (consulté le 29 avril 2025), https://praxis.encommun.io/n/KuqKC7CF9wUnBxXSy0PZSwTF25E/.

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