Un manque de vision qui pourrait causer une hausse douloureuse des tarifs

Plusieurs menaces planent et font craindre une pression à la hausse sur les tarifs :

⦿ La révision de la tarification
Au début du mois de mai 2023, le ministre Pierre Fitzgibbon s’appropriait le concept de sobriété énergétique, en l'interprétant de façon erronée et en l’associant à une révision possible de la tarification résidentielle d'Hydro-Québec afin « d’ajuster les comportements » des Québécois·es 75. Par ailleurs, certain·es des expert·es consulté·es par le gouvernement estiment que le processus actuel d’établissement des tarifs ne donne pas un signal de prix encourageant l'économie d'énergie et que cela est problématique dans un contexte où l’efficacité énergétique doit être mise au premier plan 76. Pour sa part, le PDG d’Hydro-Québec a affirmé en octobre 2023 que l’électricité est devenue un « actif précieux » et que les tarifs de la société d’État devraient donc être augmentés dans les prochaines années 77. Hydro-Québec présentait en novembre 2023 son Plan d'action Vers un Québec décarboné et prospère 78 qui prévoyait des investissements pouvant atteindre 185 milliards de dollars, sans préciser qui paierait la facture. Enfin, bien que M. Legault affirme que la loi limitant pour le moment l'augmentation des tarifs d'électricité à 3 % par année sera respectée, messieurs Sabia et Fitzgibbon semblent moins convaincus que les tarifs ne devraient pas augmenter 79. Ces divers indices s’accumulent pour faire craindre que le projet de loi annoncé pour l’automne 2023 remette en question la tarification relativement abordable d’Hydro-Québec;

⦿  L’attribution abusive de blocs d’énergie à des projets énergivores
Il est inacceptable de dilapider des TWh imaginaires en les octroyant à des industries énergivores pour qui l’utilisation d’hydroélectricité considérée comme « verte » est une plus-value. On crée ainsi, en toute connaissance de cause, une rareté énergétique. On utilise ensuite le spectre de la hausse de tarifs pour « ajuster les comportements des Québécois·es » et forcer l'économie d'énergie. Aussi, la vente d’électricité à nos voisins du Sud précarise la position d’Hydro-Québec dans son devoir de distribuer cette énergie aux citoyen·nes qui ont payé pour la produire;

⦿ L’interfinancement remis en question
La fin de l’interfinancement a été réclamée par plusieurs intervenants proches du monde des affaires 80,81,82,83. Au Québec, les entreprises se plaignent de la situation actuelle, mais oublient qu’elles bénéficient de tarifs très avantageux, si on les compare à ce qui leur en coûterait ailleurs en Amérique du Nord;

⦿ L’abolition du bloc patrimonial
Le bloc patrimonial est régulièrement remis en question par divers protagonistes 84,85. L'Institut économique de Montréal revenait à la charge avec cette proposition d’abolition lors des consultations 86;

⦿ L’entente Énergir-Hydro
Cette entente prévoit qu'Hydro-Québec, fournisseur d’hydroélectricité, versera des compensations financières à Énergir, distributeur de gaz naturel. C’est grâce au processus de la Régie de l’énergie que des organismes ont pu demander que les coûts de l’entente ne soient pas refilés aux client·es d’Hydro-Québec et ont eu gain de cause 87;

⦿ La marge de profit et les garanties exigées par le privé
Afin de satisfaire la demande d'électricité du Québec qui va au-delà de la production historique (le bloc patrimonial), Hydro-Québec doit conclure des accords d'approvisionnement avec des fournisseurs d'électricité à la suite d'appels d'offres. Tous les producteurs peuvent soumissionner, y compris Hydro-Québec et les entreprises privées. Bien que Pierre Fitzgibbon affirme que le privé est plus efficient, la privatisation peut avoir un effet à la hausse significatif sur les tarifs d'électricité. Les bénéfices de la vente d’énergie d’un distributeur public reviennent à la communauté, tandis que l’entreprise privée a un impératif de rentabilité; les dividendes sont distribués aux propriétaires ou aux actionnaires, pas à la population. Ces actionnaires peuvent délocaliser leurs revenus et ainsi appauvrir le Québec;

⦿ Une transformation du système énergétique chaotique et mal planifiée
Le manque de vision et de planification adéquate pour l’avenir énergétique peut engendrer des coûts et une pression à la hausse sur les tarifs. Ce phénomène s’amplifie lorsque le gouvernement fait de mauvais choix et s’avance sur des pistes qui seront éventuellement abandonnées. Les retards dans la mise en place de projets énergétiques, leur annulation ou les ajustements nécessités par une forte opposition occasionnent des coûts importants et font perdre un temps précieux.

Une hausse des tarifs pourrait donc être imposée à cause de choix discutables de la part de notre gouvernement. Elle affecterait de façon disproportionnée les ménages à faible revenu et augmenterait la précarité énergétique. Nous devons nous assurer que les tarifs restent équitables et stables, évitant ainsi les disparités régionales, notamment en assurant une planification adéquate. Il faut aussi confier la discussion sur la fixation des tarifs à la Régie de l’énergie, en considérant la nécessité de restaurer son rôle initial. Elle pourra ainsi déterminer chaque année si les hausses demandées par les distributeurs d’énergie sont justifiées.

✳️ Revendication liée
Contre une augmentation des tarifs résidentiels d’électricité qui accentuerait la précarité et risquerait de ralentir la transition énergétique

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Intégré par Joël Nadeau, le 7 décembre 2023 09:22
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7 décembre 2023

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