1. L’ESS en quelques mots
En France, l'ESS représente 10 % du PIB et compte environ 200 000 entreprises et structures et 2,38 millions de salariés. La loi sur l’ESS du 31 juillet 2014 a dressé un cadre normatif clair pour le secteur. Elle reconnaît l’ESS comme étant un mode d’entreprendre et de développement économique dont certains principes de gestion sont intégrés aux différents statuts juridiques des entreprises d’économie sociale. Ces principes distinctifs sont :
- La gouvernance participative et démocratique;
- La primauté de l’intérêt collectif ou sociale du projet;
- La non-lucrativité ou lucrativité limitée des projets : la recherche de rémunération du capital ne s’applique pas.
2. Les acteurs de l’ESS
Selon ces principes énumérés plus hauts, plusieurs catégories d’entreprises font partie de l’ESS
- Les associations (en France, régies par la loi 1901);
- Les mutuelles, à but non lucratif – codifiées par des lois différentes selon qu’elles sont des mutuelles soins ou de santé ou bien des mutuelles d’assurances de biens et de personnes;
- Les coopératives;
- Les entreprises commerciales d’utilité sociale : à statut commercial, ces sociétés doivent respecter les principes fondateurs de l’ESS et prioriser la finalité sociale par rapport à leurs objectifs économiques;
- Les fondations de personnes ou d’entreprises.
La loi de 2014 a aussi entériné la création d’un Conseil supérieur de l’ES. C’est une organisation qui comprend des membres de différents ministères, de réseaux des collectivités territoriales, de syndicats de salariés, de l’ESS, etc. Le Conseil est un espace où les membres essaient de générer des consensus sur les grands enjeux vécus par l’ESS. C’est aussi un espace de plaidoyer.
3. Trois niveaux historiques d’acteurs
- L’économie sociale s’est d’abord organisée au début des années 1980. Pour la première fois, il y a eu un ministre chargé de l'économie sociale (Michel Rocard), ce qui a amené à la création d’un Institut de financement pour le développement de l'économie sociale. À l’époque, L’ES se situe entre le secteur public et le secteur privé et elle regroupe principalement les coopératives et quelques mutuelles. Le but était de défendre des structures qui ont des statuts de société de personnes, soit principalement les coopératives.
- Une deuxième étape (1990-2000) voit l’émergence de l’économie solidaire qui est plus axée sur les projets plutôt que la défense de statuts juridiques. Plusieurs secteurs d'activités se sont développés pour former l’économie solidaire, par exemple les entreprises d'insertion (souvent avec des activités de recyclage, de réemploi ou d’économie circulaire…) C'est le moment où se sont développés de nouveaux outils de financement qu’on peut regrouper sous le terme de finance solidaire.
- La troisième étape coïncide avec l’arrivée de l'entrepreneuriat social. Inspirée de la culture Anglo-saxonne, l'idée est de valoriser l'entrepreneur qui entreprend et amène une certaine innovation sociale. Selon ce mouvement, il est possible d’entreprendre avec une finalité sociale, sans toutefois faire de l’économie sociale ou solidaire. La loi sur l’ESS de 2014 a mis dans un seul périmètre ces trois composantes historiques. Il y a donc des gens ont des entreprises qui leur appartiennent et qui font partie de l'économie sociale et solidaire s'ils ont un agrément ESUS – soit un agrément en tant qu’entreprise sociale d'utilité sociale.
4. Un nouvel acteur : les entreprises à mission
Depuis 2019, la loi PACTE a introduit le concept d'« entreprises à mission » en France. Ces entreprises sont des sociétés commerciales qui peuvent définir une mission d'intérêt général en plus de leur activité principale (comme la fabrication de voitures) pour montrer leur engagement envers des enjeux sociaux. Ce nouveau type d’organisation, dont la mission d’intérêt général est inscrite dans les statuts de l’entreprise, ajoute de la complexité pour comprendre l’écosystème de l’ESS, car il existe maintenant à la fois l'économie sociale et solidaire (ESS) et ces nouvelles entreprises à mission. Bien que la mission sociale soit un des liens entre les deux types de structures, l’approche par rapport au capitalisme n’est pas la même. Ainsi, une organisation de soutien à l’économie sociale, Impact France, soutient à la fois les entrepreneurs sociaux et des entreprises à mission comme KMPG. Certains acteurs pensent que cette réalité pourrait amener à diluer l’impact et la spécificité de l’ÉSS.
Au regard de cette complexité, il devient important de clarifier la notion de l'impact – à savoir comment les entreprises à mission et les organisations de l'ESS mesurent et rendent compte de leur contribution à des objectifs sociaux et/ou écologique. Si l’évaluation d’impact est souvent incontournable pour obtenir des financements et des budgets, certains acteurs de l’ESS sont contre la notion d’impact car ils estiment que les mesures d'impact se concentrent trop sur des critères quantitatifs et ne reflètent pas suffisamment des aspects qualitatifs comme le bien-être, le bien-vivre et le bonheur des personnes.