Pour cette 5e Grande rencontre de l’Espace quartiers TeC : l’équité territoriale dans un contexte de transition socioécologique à Montréal !
Espace Quartiers de Transition en Commun conviait citoyen.ne.s et organismes à sa 5e Grande rencontre de l’Espace quartier, consacrée à : l’équité territoriale dans un contexte de transition socioécologique à Montréal. Les participant·e·s ont été acceuilli·e·s dans les locaux de l’organisme Petites-Mains situé dans le quartier de Villeray à Montréal, le 23 octobre 2024.

Reconnaissance territoriale présentée par Léa Ilardo :
L’évènement commence par une reconnaissance territoriale personnalisée, faite par Léa Ilardo. Léa Ilardo a introduit le concept d’équité territoriale, en soulignant l’importance de reconnaître les inégalités historiques liées à l’occupation des terres. Elle a rappelé que la justice territoriale commence par une reconnaissance de ces injustices et par une volonté de s’engager dans des actions réparatrices.
Présentation du travail sur la Vision de TeC, JEDI et le lien avec l’équité territoriale par Simon Thibodeau et Alexis Curodeau-Codère
La vision de TeC repose sur un engagement envers la transition écologique et citoyenne, en mettant l’accent sur les principes de JEDI : justice, équité, diversité et inclusion. Ce cadre est essentiel pour aborder les questions d’équité territoriale en tenant compte des enjeux environnementaux et sociaux. L’objectif est de créer un espace où les dimensions de justice sociale et écologique se croisent et s’enrichissent mutuellement, en dépassant les cloisonnements traditionnels entre ces domaines.
Simon et Alexis soulignent l’importance de la reconnaissance des écosystèmes et des communautés locales dans cette démarche. Ils évoquent la nécessité de sortir des approches fragmentées pour travailler à une vision globale qui intègre tous les acteurs, y compris les peuples autochtones, souvent marginalisés dans les discussions sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire.

Atelier Brise-Glace :
Un atelier participatif a été organisé pour permettre aux invité·e·s de la soirée d’explorer ensemble les concepts de transition socioécologique et de justice sociale en utilisant leur créativité et des exemples concrets de l’évolution du territoire montréalais. Chacun·e a été invité à choisir un lieu, un édifice ou une infrastructure symboliques d’un quartier qu’il connaissait bien, représentant un élément marquant dans son évolution. Iels ont pris un moment pour choisir un symbole, puis ont fabriqué une maquette avec les matériaux disponibles. Ensuite, iels ont partagé leur symbole, leur quartier d’attache et ont positionné chaque création à l’endroit approprié sur une carte de Montréal.
Cet atelier a permis de stimuler la réflexion collective sur la transition socioécologique et la justice sociale en encourageant la créativité des participant·e·s, tout en favorisant l’échange de perspectives locales sur l’évolution de Montréal, contribuant ainsi à une meilleure compréhension des enjeux d'équité territoriale!
Évolution historique des Quartiers par Léa Ilardo de Vivre en Ville :
Lea Ilardo de Vivre en Ville a exploré l’évolution des quartiers et l’équité territoriale à travers une perspective historique et sociale. Elle a introduit l’idée d’une approche territoriale de l’équité, qui se concentre sur les inégalités liées aux lieux de vie, plutôt que de se focaliser uniquement sur les individus. L’enjeu est d’identifier les milieux et d’élaborer des pistes d’action pour réduire les disparités.
L’équité territoriale implique que tous les territoires ne sont pas égaux, avec des inégalités systémiques qui affectent certaines populations plus vulnérables. Ces iniquités sont souvent liées à l’accès limité à des ressources de proximité, à une mobilité réduite, et à des problèmes environnementaux comme la pollution. Certains quartiers sont touchés de manière disproportionnée par ces défis.
Un élément central de l’intervention l’impact du lieu de vie sur la santé et la qualité de vie. Lea souligne que la santé des individus n’est pas uniquement influencée par des facteurs personnels, mais aussi par leur environnement immédiat et les personnes vulnérables sont particulièrement affectées par la configuration de leur quartier, car elles ont moins de moyens pour chercher un logement ailleurs.
La crise du logement, la crise climatique et d’autres transformations sociales remettent en question la manière dont les territoires sont gérés et comment les vulnérabilités doivent être prises en compte dans les solutions futures. Un des constats importants est que certaines populations vivant dans des quartiers plus riches peuvent tout de même faire face à des problématiques de pauvreté, mais ces besoins sont parfois invisibilisés.
Enfin, Lea Ilardo a fait référence aux quatre types de justice essentiels pour construire une société plus équitable :
- Justice spatiale de distribution : répartition équitable des ressources et services.
- Justice de reconnaissance : valorisation des identités et des besoins spécifiques des communautés.
- Injustice procédurale : question du pouvoir de décision, qui a voix au chapitre.
- Justice de contribution : garantir que tout le monde puisse participer à la société.
Elle termine alors en soulignant que la pandémie de COVID-19 a intensifié ces inégalités et que les réponses aux problématiques territoriales doivent être plus inclusives et adaptées aux réalités locales.

Équité pour les Populations racisées par Juste Rajaonson du Conseil Interculturel de Montréal :
Le rapport « Réduire les inégalités territoriales et prévenir les discriminations dans l’espace urbain » aborde les enjeux de la disparité territoriale en mettant l’accent sur les populations racisées et immigrantes à Montréal. Juste Rajaonson, membre du Conseil interculturel de Montréal et professeur à l’UQAM, présente les grandes lignes de ce rapport dans un cadre synthétique, soulignant qu’il est avant tout un messager et qu’une approche plus large nécessite d’amplifier les messages à travers divers canaux de diffusion. L’objectif est de sensibiliser les élus et de jouer un rôle de courroie de transmission pour que ces problématiques soient mieux prises en compte.
Le rapport met en lumière plusieurs facteurs corrélés aux inégalités territoriales, tels que le revenu, l’accès à la santé et le statut migratoire. Ces éléments affectent directement les quartiers périphériques de Montréal, où les populations immigrantes et racisées sont souvent plus vulnérables, en raison notamment du manque de services de base et des difficultés d’accès à des ressources essentielles. À ce titre, cinq axes sont identifiés pour lutter contre ces disparités, parmi lesquels la mobilité occupe une place prépondérante. Il est crucial d’améliorer l’offre de transport collectif et actif, non seulement dans les zones centrales, mais aussi dans les quartiers excentrés, qui abritent une part importante des nouveaux arrivants. Une tarification sociale différenciée pourrait également aider à rendre ces services plus accessibles, notamment pour les jeunes et les personnes âgées, mais aussi pour les nouvelles·aux immigrant·e·s.
L'accès au logement constitue un autre axe stratégique pour lutter contre les inégalités. Le rapport propose d’acquérir des bâtiments dans les secteurs vulnérables aux spéculations immobilières, notamment dans les quartiers où les prix sont les plus bas. Cela permettrait de lutter contre la gentrification et de protéger ces zones de l’influence des promoteurs immobiliers. En parallèle, les discriminations sociales et raciales doivent également être abordées, car les populations les plus défavorisées sont souvent confrontées à des préjugés qui limitent leurs opportunités, notamment dans l’accès à un logement décent ou à l’emploi.
Enfin, la transition socioécologique est présentée comme un axe transversal, bien qu’il soit mis en dernier dans le rapport. Il est rappelé que les priorités immédiates de survie et de mobilité doivent passer avant les préoccupations liées à la transition écologique. Cependant, il est essentiel d’inclure les populations les plus marginalisées dans cette transition, notamment en leur offrant des opportunités de participation rémunérée, ce qui contribuerait à l’inclusion sociale tout en répondant à des besoins urgents.
En somme, le rapport insiste sur la nécessité d’adopter une approche territoriale ciblée pour mieux comprendre les enjeux spécifiques des quartiers vulnérables et des populations racisées à Montréal, tout en prenant en compte les ressources limitées et les besoins urgents des communautés locales.
Quartiers Inclusifs et Résilients par Jessyca Cloutier de la Ville de Montréal :
Jessyca Cloutier a présenté la stratégie Quartiers Inclusifs et Résilients (QIR) de la Ville de Montréal, lancée il y a plus d’un an pour lutter contre les inégalités sociales à l’échelle des quartiers. Cette approche repose sur une gouvernance partagée, impliquant étroitement les communautés locales, car ce sont elles qui comprennent le mieux leurs propres réalités. L’objectif est de renforcer la résilience des quartiers vulnérables à travers des actions ciblées et une agilité dans la mise en œuvre des projets, en tenant compte des changements rapides des territoires.
La Ville utilise 23 indicateurs socio-économiques pour identifier les zones les plus vulnérables et prioriser les interventions. L’approche se base sur l'intégration des apprentissages dans les plans d’action, afin de mieux adapter les stratégies aux besoins réels des quartiers. Par exemple, dans le Nord-Est, l'objectif est d'améliorer les conditions de vie des élèves dans les nouvelles écoles et de créer un pôle alimentaire. À Sainte-Marie, l’initiative vise à renforcer la sécurité et à améliorer le sentiment de bien-être des résidents, avec un projet autour du pôle Frontenac.
Enfin, la Ville met en place une structure de gouvernance partagée, où trois services municipaux sont co-responsables, et privilégie des projets pilotes pour tester et ajuster les interventions en temps réel.

Le cas du quartier Saint-Michel présenté par Dominique Perreault de la Table Vivre Saint-Michel en Santé:
Dominique Perreault, directrice de la Table Vivre Saint-Michel en Santé, a présenté la situation du quartier Saint-Michel, un quartier enclavé à Montréal qui illustre bien les défis liés aux inégalités territoriales et à la mobilité. Le quartier abrite 57 330 habitant·e·s, parmi lesquels 46,5 % sont d'origine immigrante et 22,3 % vivent en dessous du seuil de pauvreté. La population est répartie en trois secteurs très différents : l’est, l’ouest et le sud, chacun ayant ses propres caractéristiques et défis. Par exemple, le quartier de l’est est marqué par une forte densité de population, de forts ilots de chaleurs, une absence d’infrastructures culturelles et une situation difficile pour les enfants, suite à la fermeture du centre communautaire.
Le quartier est traversé par plusieurs grandes artères, dont l’autoroute 40, qui représente un danger pour la mobilité, surtout pour les piétons et cyclistes. Le boulevard Saint-Michel et Pie-X, bien que des axes de passage ne desservent pas efficacement les résidents, en particulier les personnes âgées, les jeunes et les familles. Le transport en commun est mal adapté, avec des délais de trajet longs, des bus souvent en retard, annulés ou indisponibles la fin de semaine. L'implantation du SRB (Service Rapide Bus) ne répond pas aux besoins du quartier.
De plus, une des grandes entraves majeure du quartier est la Carrière Francon, un immense espace de 1800 mètres de long et 400 mètres de large, utilisé en hiver pour le dépôt de neige et en été comme entrepôt municipal et centre d’entraînement pour camions. Ce site, au cœur du quartier, est une source importante de nuisances sonores et d’activités industrielles, perturbant la vie des résident·e·s. Les jeunes, par exemple, doivent faire de longs trajets pour se rendre à l’école secondaire, car il n’y en a pas dans l’est du quartier. Une corrélation a même été établie entre le décrochage scolaire des jeunes et les difficultés liées au transport.
De plus, unes des grandes entraves majeure du quartier est la Carrière Francon, un immense espace de 1800 mètres de long et 400 mètres de large, utilisé en hiver pour le dépôt de neige et en été comme entrepôt municipal et centre d’entraînement pour camions. Ce site, au cœur du quartier, est une source importante de nuisances sonores et d’activités industrielles, perturbant la vie des résident·e·s.
Pour répondre à ces enjeux, plusieurs projets sont en cours. La Table de quartier de Saint-Michel milite pour la création d’une passerelle reliant la rue Robert et Pie-X, afin de mieux connecter les secteurs du quartier. Ils souhaitent également transformer la neige en ressource plutôt qu’en déchet, à l’image de la reconversion de la carrière Miron qui est devenu le parc Frédérique-Bach. En outre, un projet innovant de traitement des neiges usées et la création d’un lieu multiservice sont envisagés pour améliorer les conditions de vie dans le quartier.
À Saint-Michel, plusieurs projets ont émergé grâce à la mobilisation citoyenne, mettant en avant l'engagement local pour transformer le quartier. Pour les habitant·e·s, la transformation passe d’abord par leur participation active, essentielle à la création de solutions durables et adaptées aux réalités locales.
Dominique Perreault a conclu en évoquant des perspectives positives pour Saint-Michel, notamment le lancement d'un portrait de la mobilité et des discussions politiques sur les enjeux de transport. Elle a aussi mentionné la poursuite du projet de reconversion de la Carrière Francon et le développement d'une serre chauffée par lixiviat, un projet innovant pour la production alimentaire durable.
Conclusion
La rencontre s’est terminée par un moment de réflexion collective, où chaque participant·e a été invité·e à partager une idée ou un apprentissage qu’il retient de cette rencontre. Plusieurs ont exprimé leur intérêt à poursuivre les discussions et à s’impliquer dans des actions concrètes pour favoriser une transition socioécologique juste et équitable à Montréal.
La 5e Grande rencontre de l'Espace Quartiers TeC a permis d'explorer l'équité territoriale dans le cadre de la transition socioécologique à Montréal, en réunissant citoyen·ne·s et organismes pour discuter des inégalités sociales et environnementales à l’échelle des quartiers. Les interventions ont mis en lumière l'importance de la reconnaissance des injustices historiques, de l'inclusion des communautés locales dans les processus décisionnels et de l'adaptation des solutions aux réalités spécifiques des quartiers vulnérables. Des exemples concrets, comme celui du quartier Saint-Michel, ont illustré les défis de la mobilité, du logement et de l'accès aux ressources. Les participant·e·s ont exprimé leur désir de poursuivre les échanges et de s'engager dans des actions locales pour favoriser une transition juste et équitable, contribuant ainsi à un avenir plus inclusif et résilient pour Montréal.
Pour retrouver les photos de l'événement, c'est ici!