Cette note est une synthèse de réflexion sur le rôle d’accompagnement de la transformation numérique qui rassemble différentes connaissances (gestionnaires et agent·es de développement culturel numérique (ADN)) pour qu'elles soient accessibles et facilement utilisables par les membres du Réseau ADN et le milieu artistique et culturel. Ces connaissances sont le fruit d’ateliers de réflexion basée sur des perceptions et ne représentent pas un exercice de prise de position ou de décision.
Le carnet regroupe 3 fiches de connaissances:
- La transformation numérique: fondement du Réseau ADN
- Les étapes de la transformation numérique au sein du Réseau ADN
- L’accompagnement de la transformation numérique au sein du Réseau ADN
La présente fiche de connaissance no1 est une synthèse de réflexion sur la transformation numérique qui rassemble différentes connaissances (gestionnaires, chercheur·euses et expert·es) pour qu'elles soient accessibles et facilement utilisables par les membres du Réseau ADN et le milieu artistique et culturel.
Description générale
Créé en 2019 par le ministère de la Culture et des Communications (MCC), en collaboration avec la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) et le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ), dans le cadre du Plan culturel numérique du Québec (PCNQ), le Réseau ADN regroupe une cinquantaine d’agent·es de développement culturel numérique (RADN) avec un but commun: contribuer au virage numérique du milieu culturel et accélérer sa transformation numérique.
En février 2023, Projet collectif et Sporobole (0/1 Hub numérique) ont formé le Consortium PC01 et uni leurs forces pour la coordination du RADN. Il porte la vision initiale du RADN, toujours d’actualité, de favoriser la mise en commun de problématiques, la mise en œuvre de solutions collectives durables, ainsi que le développement de projets structurants. La mise en place d’une communauté de pratique réunissant les ADN, portée par les valeurs d’ouverture, de partage et de collaboration, s’inscrit également dans cette vision.
L’apport d’ADN, travaillant aux quatre coins du Québec pour 58 organisations du secteur artistique et culturel, permet l’accompagnement de la transformation numérique. Ce mandat s’articule autour de 4 axes1: la veille, la concertation, la formation et la coordination de projet. À travers ces axes, l’ADN doit accompagner ces organisations dans la transformation numérique. Depuis le déploiement du Réseau, l’affirmation du leadership numérique du milieu culturel, le maillage et la collaboration entre les régions et les secteurs sont notables. En effet, depuis 2019, de nombreux projets numériques ont été réalisés dans les différents secteurs, territoires et au sein des organismes participants.
Le Réseau fait toutefois face à certains défis, dont l’instabilité causée par un taux de roulement important dans les postes d’ADN et l’incertitude qui plane à chaque fin de cycle quant à la reconduction de son financement. Autre élément de préoccupation, tant pour les ADN que pour les gestionnaires: le manque de repères sur les orientations du Réseau et sur le rôle des ADN. Enfin, certain·es gestionnaires questionnent la place coercitive ou affranchissante de la transformation numérique au service des organisations.
Le Réseau ADN regroupe des organismes du secteur artistique et culturel ayant des missions et des enjeux différents, dont le niveau de maturité numérique et la portée du mandat d’accompagnement de la transformation numérique varient. Selon les enjeux et les choix stratégiques définis par chacun, la transformation numérique vise soit les membres ou clientèles du secteur ou territoire desservi, soit l’organisme, ou encore les deux (double portée).
À ce sujet, le sondage réalisé en mai 2024 auprès des ADN indique que près de 70 % des répondant·es perçoivent que leur mandat d’accompagnement a une double portée, une hausse importante par rapport au portrait réalisé en 2021 (46 %). Cette double portée complexifie le mandat d’accompagnement de l’ADN, tout comme c’est le cas pour les postes mutualisés d’ADN qui doivent accompagner plus d’un organisme dans leur transformation numérique.
Extrait d’un sondage réalisé auprès des ADN - mai 2024 (26 répondants)
Quelle est la portée de ton mandat d'accompagnement de la transformation numérique?

C’est pourquoi il est important de définir la transformation numérique dans toute sa diversité et sa complexité de points de vue et d’y jeter les premières bases de réflexion.
Qu’est-ce que la transformation numérique du point de vue des gestionnaires ?
Lors de la rencontre du 2 mai 2024, une trentaine de gestionnaires des organismes membres du RADN ont proposé des énoncés basés sur leur expérience. Voici ce qui a émergé à la suite de cette rencontre:
- La transformation numérique débute par des processus internes dans toute organisation avant d’être mise en œuvre à plus grande échelle;
- La transformation numérique implique un apprentissage des technologies;
- Une transformation est une répercussion de la dématérialisation (nouveaux formats, nouveaux contenus, nouvelles plateformes), des changements de comportements des publics et des nouveaux défis en termes de visibilité;
- La volonté de transformation numérique exprimée à travers le RADN, provenant d’une mesure gouvernementale (Mesure 120), est un projet qui a été vécu par les organismes membres du RADN comme une contrainte imposée, ou parfois, comme une opportunité;
- Un processus crucial d’utilisation de la technologie afin d’atteindre des objectifs organisationnels ou sectoriels;
- Une transformation pour faciliter la pleine expression de la vie culturelle.
Les gestionnaires s'entendent pour affirmer que la transformation numérique est unique à chaque organisation, secteur ou territoire. Certain·es ont souhaité y apporter une couleur régionale et d’autres, un regard organisationnel ou sectoriel. Sans surprise, plusieurs chercheur·euses confirment ce propos.
La transformation numérique: ce que le monde de la recherche et les milieux d’expertise ont à dire
Comme mentionné précédemment, « le premier constat [des chercheur·euses est] qu’il existe non seulement de nombreuses définitions du phénomène, mais aussi que celles-ci divergent quant à la nature, la portée et la réelle complexité de ladite transformation. »2
Le·la gestionnaire et son ADN doivent ainsi définir le sens qu’ils y accordent (la nature et la finalité), la portée (organisationnelle, sectorielle ou territoriale) et la complexité.
Au niveau de sa complexité, « ce qui importe alors est donc de déterminer si la transformation numérique envisagée vise principalement à:
- soutenir la proposition de valeur existante de l’entreprise grâce à une innovation incrémentale (ou de « continuité ») soutenue par les TI;
- ou plutôt à permettre de revoir les fondements du modèle d’affaires grâce à une innovation plus radicale (ou de « rupture ») dont les retombées sont potentiellement plus importantes pour la compétitivité et la performance de l’entreprise (Raymond et al., 2023) ».
Toutefois, si vous ne souhaitez pas remettre sur la sellette cette question épineuse, rabattez-vous sur la définition du Lab Culture (Culture pour tous) :
« Le terme se réfère à la fois aux changements liés à l’arrivée de nouvelles plateformes technologiques qui influencent nos activités et nos actions qu’à la façon d’interagir avec les publics et clientèles. Les outils et avancées technologiques ont des répercussions sur l’organisation interne de votre équipe de travail (et sa gouvernance) et sur la création, la production et la diffusion. »
Exemples de projets de transformation numérique
Plusieurs initiatives réalisées par les ADN expriment les diverses facettes d’un projet de transformation numérique. Un premier exercice de réflexion a permis de déterminer ce qu’est un bon projet de transformation numérique.
Critères de sélection d’un bon projet de transformation numérique
Du point de vue des gestionnaires, il faut prendre en compte plusieurs critères avant d’intégrer un projet au plan de travail d’un·e ADN. Voici ceux qui ont été identifiés :
- L’impact du projet: L’impact est l’effet anticipé d’un projet numérique. Il représente également la finalité du projet. Le·la gestionnaire peut utiliser le critère d’impact pour questionner l’ADN ou pour préciser les impacts visés d’un projet de transformation numérique.
- La faisabilité: Le caractère de ce qui est faisable et réalisable. Le·la gestionnaire peut utiliser ce critère afin d’évaluer les ressources humaines, financières et matérielles nécessaires à sa réalisation.
- La pérennité et la viabilité: Dans le contexte dans lequel évolue le RADN, le·la gestionnaire peut identifier ce critère afin d'évaluer la durée d’un projet à court terme ou les conditions de succès d’un projet à plus long terme.
- Les objectifs SMART: Ce critère peut permettre au·à la gestionnaire de définir des objectifs mesurables permettant de bien encadrer le projet.
Les gestionnaires ont également mentionné deux critères incontournables, soit: l'adéquation avec la mission et les valeurs organisationnelles ainsi que l'adéquation avec les besoins exprimés par les membres ou la clientèle. Ces indicateurs feront l’objet d’une mention spéciale dans la fiche de connaissance sur les étapes de transformation numérique.
De l’intention à l’action | 3 questions à se poser

Est-ce que j’ai échangé avec mon ADN sur la définition et la vision de la transformation numérique?
Est-ce que j’ai échangé avec mon ADN sur la portée de la transformation numérique au niveau organisationnel, sectoriel ou territorial ?
Est-ce que j’ai un état de la situation en main (ex. diagnostic organisationnel ou portrait sectoriel ou territorial) me permettant de définir les priorités d’action de mon ADN ?
Regard des ADN
Ce contenu est issu de l’activité Dialogue sur la transformation numérique: perceptions et résonances animée par Annie Chénier le 22 mai 2024 lors de la 11e édition de la Rencontre nationale du RADN à laquelle 34 ADN ont participé.
Définition de la transformation numérique
Tout comme les gestionnaires, les ADN ont été invité·es à définir la transformation numérique. Voici le résultat:
- Identification de solutions innovantes centrées sur l’humain par un processus itératif.
- Démarche collaborative et stratégique d’optimisation des processus grâce à l’écosystème numérique.
- Processus d’accompagnement et d’implantation d’un changement basé sur l’ouverture et l’itération.
- Évolution stratégique des pratiques numériques basée sur les besoins d’un milieu.
- Démarche éthique et adaptée aux besoins et aux objectifs d’une partie prenante, dans laquelle l’humain et les outils sont au centre du processus de façon continue.
Rétroaction des ADN sur le contenu de la fiche no 1
- Demande de précision au sujet de l’énoncé qui fait référence à une contrainte imposée.
- Ainsi les ADN ont pris conscience que la pertinence de la transformation numérique n'est pas acquise dans toutes les organisations participant au RADN.
- Questionnement au sujet des objectifs SMART : ce critère de sélection, priorisé par les gestionnaires, aussi utilisé par des bailleurs de fonds dans certains programmes, est difficilement applicable dans leur travail selon les ADN. À titre d’exemple, les résultats de référencement ne peuvent être quantifiés.
- Ainsi les ADN prendront conscience de la pertinence de développer un langage commun et de nouvelles pratiques associées à la gestion de projet numérique.
- Au sujet du critère d’impact: l’accès aux outils nécessaires pour mesurer l’impact est limité en raison de leur coût. Une participante témoigne que ces outils peuvent coûter de 10 000 $ à 20 000 $ par projet.
Notes
1. Pour plus d’information sur les 4 axes, vous pouvez consulter le Wiki des ADN.
2. Mieux définir la transformation numérique pour mieux l’accompagner
Ce contenu a été développé lors de la rencontre du 2 mai 2024 sous Creative Commons CC BY-NC-SA 4.0. sauf si mention de références ou crédits.