L’évaluation de performance ou d’apparence en entreprise ?

Imaginez-moi: Je suis cadre dans une entreprise réputée du CAC 40. En prenant mon café ce matin, j'ai feuilleté mon évaluation de performance annuelle, un rituel devenu aussi prévisible que décevant. Mes forces ? Empathie, organisation, bonne humeur. Mes faiblesses ? Indécision et passivité lors des réunions. Cela m'a fait sourire amèrement, car j'avais prédit presque mot pour mot ce que ce document contiendrait.

Qui suis-je ?

Vous avez un biais. Est-ce que c’est inoffensif ? Non. Est-ce que c’est traitable ? Oui. Soyez soulagé·e, demain votre leadership sera en bonne santé !

La majorité d’entre vous ont imaginé une femme, et tout le problème s’y résume.

Les mots sont puissants. Ils peuvent soit construire, soit détruire. Dans le contexte des évaluations de performance, ils façonnent la trajectoire professionnelle de manière indélébile. Qui, alors, mérite une promotion ? La réponse devrait reposer sur la compétence et non sur les stéréotypes. En reconnaissant que vous êtes sujets à des biais, comme chacun·e d’entre nous, vous faites le premier pas vers une structure organisationnelle équitable.

Choisiriez-vous une personne analytique ou empathique pour un rôle de direction ?


Les mots choisis dans les évaluations de performance ne sont pas anodins. Ils ont un impact direct sur qui se voit offrir une promotion. À compétence égale, les femmes seront souvent décrites par des termes comme "coopérative" ou "empathique", et par conséquent se retrouveront moins fréquemment en lice pour des rôles de leadership comparées à leurs homologues masculins, fréquemment décrits comme "analytiques" et "compétents", synonymes d’un bon leadership.

Vous avez deviné son genre, et ce n’est pas anodin !

Marie, cadre d’une entreprise du CAC 40, a pu prédire son évaluation comme vous avez pu deviner son genre, car cela ne rend pas compte de ses compétences professionnelles. Et elle le sait. Marie a donc été à l’initiative d’un comité de révision des évaluations de performance pour ouvrir le débat sur cette question et construire une politique d’évaluation reflétant ses compétences et non les idées reçues sur son genre. Pour ce faire, elle devait démontrer qu’il s’agissait d’un problème systémique et qu’elle n’était pas de mauvaise foi. Alors, comme elle, invitez votre comité ou vos RH à mettre cet exercice en place, simple et sans appel, il permettra de déterminer rapidement si votre processus d'évaluation est biasé :

  • 1ère étape: Reprendre de manière anonyme l’ensemble des évaluations de performances. 
  • 2e étape: En toute honnêteté, si vous êtes déjà en mesure de déterminer le genre de l’employé·e, c’est que les évaluations sont sujettes aux biais inconscients.
  • 3e étape: Regardez si des termes différents sont systématiquement utilisés pour des performances similaires en comparant les évaluations des hommes et des femmes.
  • 4e étape: Notez la différence de format entre les évaluations : les femmes auront tendance à recevoir une rétroaction axée sur le maintien de leur position, tandis que les hommes recevront des rétroactions axées sur leur avancement professionnel.

La langue française est-elle restreinte ou est-ce le vocabulaire que nous choisissons ?

Une étude récente révèle qu’un usage disproportionné de mots négatifs se retrouve dans les évaluations de performance des femmes par rapport aux hommes. Des termes positifs abondent pour ces derniers, tandis que pour les femmes, les qualificatifs se limitent souvent à des aspects non liés au leadership (voir le tableau ci-dessous).

Les termes employés dans les évaluations de performance :

Cette différence suggère une influence profonde du déséquilibre des genres dans les rôles à hautes responsabilités. Par exemple, au Québec, Statistique Canada indique que seulement 33 % des femmes sont à des postes de direction en 2020. [Lien vers la source] Cette constatation viendra alimenter les débats sur la discrimination positive et l’instauration des quotas obligatoires dans les entreprises. Les stéréotypes de genres ne sont pas les seuls freins à la mise en place des meilleurs talents de notre organisation, il faut également inclure d'autres axes de diversité, tels que l'âge et l'origine ethnique, dans l'évaluation des performances.

Reconnaître, s'outiller et agir pour une organisation saine et équitable permet de retenir les meilleurs talents, d'augmenter sa rentabilité et ses profits.

Alors, quel sera votre premier pas ?

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Intégré par Morgane Huber, le 16 février 2024 12:12

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23 janvier 2024

Modification

29 février 2024 14:57

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