2. L’état de la veille au Québec - forces et enjeux

💡 Contexte
Cette note fait partie du carnet Veille - enjeux, leviers et stratégies. Elle s’inscrit dans une série de notes présentant la synthèse d’une rencontre exploratoire qui a eu lieu à l’automne 2024. 

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Nous ne prétendons pas dresser un portrait exhaustif de l'état de la veille au Québec. Ce que nous vous proposons découle de nos travaux autour et pendant la rencontre exploratoire menée à l’automne 2024. Cette dernière a porté sur le processus de construction de la veille au Québec ainsi que les forces et les enjeux qu'on y rencontre. Ces constats préliminaires offrent toutefois un aperçu d’ensemble que nous espérons enrichir collectivement dans les mois à venir, à travers, entre autres, une communauté de pratique.

Un panorama en construction

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Notre rencontre de l'automne dernier a ressemblé des personnes œuvrant en éducation, recherche, observatoire, entreprise, économie sociale, innovation sociale, développement des communautés, action communautaire, jeunesse, culture, habitation, philanthropie, santé publique ou transition socioécologique. Ceci nous permet de constater que la veille est pratiquée dans une grande variété de milieux. 

Les activités de veille s’exercent aussi au sein d’organisations de toutes tailles — ministères, institutions, entreprises privées, réseaux sectoriels, OBNL, coopératives ou initiatives citoyennes —, avec une diversité marquée de profils et de niveaux d’expertise des personnes qui la portent : des débutant·es aux expert·es, parfois appuyé·es par des coachs.

Si, dans certains cas, la veille est assurée par un individu dédié, elle est plus souvent intégrée aux responsabilités portées par une équipe, avec des niveaux d’investissement individuel très variables selon les personnalités, les contextes et les ressources. Certaines organisations misent alors sur une mise en commun des observations menées par chacun.e de leurs membres pour bâtir un portrait collectif des enjeux suivis.

Sans surprise, le degré de structuration des pratiques diffère considérablement. Dans certains milieux, la veille est reconnue et ses activités sont bien greffées aux processus. Ailleurs, elle reste informelle, improvisée, voire invisible, ce qui rend complexe la réalisation de ces différentes phases. Peu importe le degré de structuration, plusieurs expriment le souhait de mieux planifier leurs activités de veille.

Une pratique à la fois rigoureuse et intuitive

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La veille exige autant de rigueur méthodologique que de flair, de sens de l’observation, de culture générale et d’expérience de manière générale ou en lien avec le sujet et le terrain de veille. Et surtout de temps pour la faire, dans son ensemble et une étape à la fois. C’est ainsi une activité à la fois structurée et profondément humaine, où se croisent sérendipité, accumulation de savoirs, intuition et sensibilité personnelle. Sensibilité individuelle aux informations, à ce qui est important et pertinent, mais aussi au flot immense d’informations à laquelle une personne s’expose en faisant de la veille.

Ces tensions soulève des questions sur la reconnaissance des aptitudes et des individualités, la transmission des savoirs entre collègues, la pérennité des pratiques et l'appropriation des outils en fonction des humains qui la réalisent, des contextes ambiants et des transformations sociétales.

Des enjeux de compétences et de savoirs-faire individuels

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La constance et la crédibilité ont été identifiées comme des conditions clés pour une veille durable. Mais comment faire quand la veille est portée par des personnes en mouvance constante?

Le sentiment de compétence, lui, varie beaucoup : plusieurs expriment un besoin de formation, tout en manifestant une grande ouverture à partager leur expertise. Bien que des guides écrits existent, ces ressources sont souvent difficiles à repérer ou peu adaptées. Aussi, certaines personnes se sentent mal outillées. Conscientes de l’importance de la veille, elles ne savent pas toujours comment s’y prendre pour la rendre plus stratégique, plus utile ou plus efficace. Cela est particulièrement vrai dans des contextes marqués par un fort roulement de personnel, où les nouveaux·elles veilleur·euses doivent s’approprier cette pratique sans pouvoir avoir recours à un accompagnement structuré.

Parmi les personnes qui maîtrisent davantage la veille, plusieurs d’entre elles souhaitent améliorer son intégration à leurs autres activités. Elles cherchent ainsi à optimiser l’usage des outils numériques, à renforcer la diffusion des résultats de la veille ou à développer des stratégies plus robustes de curation, d’archivage et de partage. Des personnes présentes qui ont mené une carrière en veille et qui sont sur le bord de la retraite se posent aussi la question de la transmission de leurs savoirs, pratiques et dossiers aux personnes qui arrivent comme collègues puis comme relais.

Des enjeux de reconnaissance organisationnelle et de ressources dédiées

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Comme c’est le cas pour d’autres activités liées à la documentation, à l’apprentissage ou à la collaboration, l’un des freins majeurs à la pratique de la veille demeure son manque de reconnaissance par l’organisation ou le collectif dans lequel elle s’opère. Même si son utilité est de plus en plus admise, elle reste souvent sous-évaluée, notamment lorsqu’elle entre en concurrence avec diverses priorités organisationnelles jugées plus urgentes. Cette sous-évaluation se traduit souvent en manque de temps et de ressources pour mener les activités de veille de manière appropriée.

Cette dévaluation se traduit aussi par une difficulté à obtenir du financement pour ses activités. Les bailleurs de fonds sous-estiment parfois la portée stratégique de la veille, bien qu’ils y aient eux-mêmes recours. Ceci peut s’expliquer d'une méconnaissance de ses effets concrets ou d'un inconfort face à sa charge critique ou politique.

La veille permet d’affiner la compréhension des enjeux, de saisir des opportunités, d’encourager les complémentarités, de nourrir les expertises et de renforcer les capacités d’action. Ces retombées, bien que réelles, peuvent être perçues comme secondaires par des directions ou des conseils d’administration, reléguant ainsi la veille au second plan.

👀 Voir aussi pour plus d'informations sur comment faire de la veille
3. Outils et méthodes de veille

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Intégré par Joël Nadeau, le 12 mai 2025 15:30
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Publication

12 mai 2025

Modification

11 juin 2025 13:57

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Pour citer cette note

Maria Anastasaki, Joël Nadeau, Alice Rivard. (2025). 2. L’état de la veille au Québec - forces et enjeux. Praxis (consulté le 14 juin 2025), https://praxis.encommun.io/n/iWZ28nm9YY99TKCUsJ3hLNXrUcM/.

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