note Note générale

Devenir artisan d'art, le fantasme d'une nouvelle vie

Par Sciences Humaines | "Frappés par le burn out, une crise existentielle ou l’ennui du travail salarié, ces cadres et diplômés de l’enseignement supérieur se reconvertissent dans les métiers manuels afin de donner du sens à leur pratique. L’épanouissement est-il au rendez-vous ?"

Qu'entend-on par artisan d'art?
- "« Par “artisans d’art”, nous désignons l’ensemble des professionnels qui fabriquent eux-mêmes, éventuellement avec l’aide de salariés, dans le cadre de l’entreprise qu’ils dirigent, des objets matériels à vocation esthétique à partir de savoir-faire traditionnellement attachés à un métier (ébéniste, maroquinier, graveur héraldiste, etc.) et appliqués à un matériau non périssable (métal, bois, textile, etc.) dans l’optique de les vendre »"
Un changement de parcours qui interpelle ++ de profesionnel·les et de diplomé·es universitaire
- "63 % des artisans d’art rencontrés sont des reconvertis professionnels, et ont abandonné une activité rémunératrice"
Plus qu'une activité économique, une recherche de sens
- besoin de se réaliser "Plus qu’une activité économique, l’artisanat serait un moyen de se réaliser, et même de rendre la société meilleure car le « bon travail » formerait le « bon citoyen »."
- besoin de ralentir "« Mon objectif de vie, c’est clairement de ralentir. J’avais un boulot très stressant, on me demandait de faire toujours plus et ce n’était plus tenable. »"
- besoin de sens "De nombreux emplois du secteur administratif (finance, télémarketing, droit des affaires, communication, etc.), plutôt valorisés socialement, seraient vidés de leur substance par les entreprises elles-mêmes "
- besoin d'émancipation "Leur démarche procède d’une volonté d’émancipation. Émancipation par rapport à la hiérarchie de l’entreprise mais aussi par rapport à des attentes matérielles et financières"
Une liberté qui n'a pas de prix
- importante perte de revenu "« Non, j’ai subi une importante baisse de revenus et je vis chaque mois avec la pression de payer le loyer de mon appartement et de mon atelier. Mais je ne suis plus salariée, je suis libre. Cette liberté a un prix »"
- ++ précarité "66 % des professionnels installés après une reconversion ont un chiffre d’affaires (CA) annuel inférieur à 20 000 euros"
Une avenue réservée aux prévilégié·es?
- un fort capital culturel : « Les reconvertis d’aujourd’hui comme les néoruraux disposent d’un fort capital culturel. Ils constituent ce que le sociologue Pierre Bourdieu nommait “la petite bourgeoisie nouvelle”. »
Des artisan·es qui ne sont pas nécessairement émancipé·es du capitalisme
- ++ d'entreprises individuelles : "Ce sont objectivement des indépendants, voire des chefs d’entreprise, qui doivent rentabiliser leur activité. Le secteur compte plus de 85 % d’entreprises individuelles, et 15 % d’entreprises avec salariés."
- ++ valeurs du capitalisme :
  - « Ils portent, parfois malgré eux, les valeurs du capitalisme : liberté d’entreprendre, propriété privée, recherche de sources de profit. »
  - communication via les réseaux sociaux
  - exportation à l'étranger
Des "momspreneurs" qui subissent de fortes inégalités de genre (surtout en cas de séparation)
- ++ ont bifurqué suite à l'arrivée d'un enfant "57 % des artisans d’art reconvertis sont des femmes. Parmi elles, les « mompreneurs » (contraction de mère et entrepreneur en anglais) ont bifurqué après l’arrivée d’un enfant."
- un époux salarié qui investit dans sa carrière " Leur époux va pouvoir s’investir dans sa carrière alors qu’elles retournent au foyer (dans un atelier certes, mais au foyer quand même) et qu’elles s’investissent fortement dans l’éducation des enfants."
- néanmoins une émancipation de la domination du travail : "Elles considèrent ce retour au foyer comme une sortie de leur position de dominées dans l’entreprise, milieu qu’elles jugent peu épanouissant (plafond de verre, mise au placard après un retour de congé maternité, etc.)"