Cette note fait partie des carnets Deuil et mort ⚱️ et Du café et des pages : recommandations de lectures ☕️📚

Parler de la mort n'est pas chose évidente dans la société occidentale. Il existe des initiatives comme le mouvement death positive qui nous encouragent à décomplexer la mort, le deuil et le corps mort, et à en parler de façon ouverte et sincère. Comme toujours, l'art nous aide également à approcher et à faire sens de sujets difficiles. En tant qu'éditrice et autrice, je prêche pour ma paroisse – la littérature – et vous offre quelques recommandations littéraires qui portent sur cette amie étrange et singulière: la mort.
- Fiorella Boucher, L'abattoir c'est chez nous, « Dans ce premier recueil bouleversant, l’auteure d’origine argentine écrit à sa mère autochtone (sy en guaraní) et à sa grand-mère qui vient de mourir, elle qui a connu l’enlèvement et qui a grandi esclave. Née de la rencontre de deux mondes qui ne se parlent pas, l’Europe et l’Amérique autochtone, la petite-fille parcourt de poème en poème l’espace dilaté des origines, des impostures et des blessures. »
- Anne Boyer, The Undying. « The Undying explore l'expérience de la maladie telle qu'elle est médiatisée par les écrans numériques, en y mêlant les anciens rêveurs romains, les canulars et fétichistes du cancer, les vlogueurs du cancer, les mensonges des entreprises, John Donne, les «doloristes» pro-douleur, les coûts écologiques de la chimiothérapie et les nombreux petits meurtres du capitalisme. Il fustige l'industrie pharmaceutique et les hypocrisies insipides de la «culture du ruban rose», tout en s'inscrivant dans la longue lignée littéraire des femmes qui ont écrit sur leur propre maladie et leur mort : Audre Lorde, Kathy Acker, Susan Sontag, et d'autres encore.»
Disease is never neutral. Treatment never not ideological. Mortality never without its politics. ― Anne Boyer, The Undying
- Vickie Gendreau, Testament. « Le 6 juin 2012, on a diagnostiqué à Vickie Gendreau une tumeur au cerveau. Entre les traitements, entre l’hôpital et « sa chambre à soi », elle écrit Testament, roman autofictionnel où elle s’imagine morte et léguant à ses proches, dans une langue crue et flamboyante comme elle l’était, le récit fragmenté de sa dernière année et celui des êtres aimés qui, après son départ, se rappellent son vivant souvenir. »
- Tania Langlais, Les pommiers dépassaient partout des palissades. « Vladimir Maïakovski aime Lili Brik. Célèbre poète de l’avant-garde russe, il écrit, voyage, se lie à d’autres, mais ne cesse jamais de l’adorer. À trente-six ans, il se tire une balle dans le cœur. « Lili, aime-moi », l’invoque-t-il jusque dans sa lettre de suicide. C’est une histoire d’amour comme il y en a tant. Celle d’un jeune homme en feu, d’un amour démesuré, insupportable. Celle du jour où le poète vise le cœur et tire. Ce jour-là, « les pommiers dépassaient partout des palissades ». Il y avait quelque chose de tranquille, de résolu. »
- Marie-Hélène Voyer, Mouron des champs « Mouron des champs dit l’histoire de vies dures et empêtrées, de destinées de filles de fermiers, de pauvresses du bout du rang, de mères travailleuses infatigables aux désirs corsetés. Revitalisant brillamment le vocabulaire des parlers populaires, Marie-Hélène Voyer fouille les lieux de vie familiaux où se resserrent l’emprise de la domesticité et la violence de la contention. Cette poésie profonde et tassée comme un pain de mie porte la voix des mortes et met en lumière les encagements du passé. Mouron des champs, suivi de l’essai Ce peu qui nous fonde, est l’occasion pour la poète de revenir sur la disparition de sa mère, cette femme de cendre qui s’effondre, sur les ombres qui planent depuis l’enfance et sur l’affranchissement que permet l’écriture. Un souffle d’amour pour apprendre à vivre. »

- En bonus, parce que je suis fière des textes précieux qu'il contient, Mortel·les, un ouvrage collectif sur la mort que j'ai eu la chance de diriger. « Ce livre explore différents vécus traversés par l’expérience de la mort et du deuil. Un collectif qui, avec ses douze voix puissantes, courageuses, solidaires et poignantes, ne craint ni la prise de risques ni la vulnérabilité. L’objectif : briser la culture du silence, lever les tabous et parler ouvertement de la mort, de façon à mieux apprivoiser cette réalité à laquelle personne ne peut échapper. »
Je voulais que nous écrivions collectivement sur la mort parce que nous n’en parlons pas assez, et que, lorsque nous le faisons, il y a presque toujours une retenue, une réserve qui nous interrompt dans notre élan. Une sorte de convention à respecter pour ne pas trop déranger. Une entente symbolique sur la quantité et l’intensité d’émotions et de réflexions déployées. […] Ce collectif est ainsi né d’un désir de représenter la mort dans sa complexité, en évitant les lieux communs, en abordant, avec ouverture et empathie, cette expérience à la fois intime et universelle. Malgré nos différences, un fait incontestable, immuable nous lie inextricablement dans notre humanité : nous sommes toustes mortel·les. A. R.
Avec des textes de : Katy Boyer-Gaboriault, Simon Brown, Mélodie Bujold-Henri, Valérie Forgues, Roxanne Guérin, Madioula Kébé-Kamara, Maude Lafleur, Ayavi Lake, Anya Nousri, Noémie Pomerleau-Cloutier, Alice Rivard et Karianne Trudeau Beaunoyer.
Bonne lecture et bonnes réflexions! 📚✨