Question d'expérimentation n°3 : Comment valoriser l’intangible ?

Cette note est issue d'une production collective dans le cadre du laboratoire entrACTE

Dans nos initiatives, on survalorise les effets (ou impacts) tangibles et mesurables, au détriment des effets intangibles qui sont pourtant cruciaux. Ce biais nous empêche d’allouer toute l’attention, le temps, le soin et les ressources que l’on voudrait à certains éléments comme le travail relationnel (ex : liens de confiance, tissage, dynamiques de pouvoir...) et le travail culturel (croyances, récits collectifs...). Comment valoriser ces éléments intangibles et inestimables dans nos projets ?

CONTEXTE ET DÉFIS

Dans notre travail, on retombe souvent sur un nœud particulièrement coriace : la nécessité d'avoir des résultats tangibles, mesurables, attribuables directement à notre initiative. Notre attention se dirige sur ces éléments, pour plusieurs raisons. D’abord, on est naturellement poussé à faire ce qui est valorisé (ou valorisable) par notre environnement interne ou externe (ex : partenaires financiers). On peut aussi avoir envie de voir qu'on avance dans la 'bonne' direction ou que le changement souhaité se concrétise. On se tourne alors vers des indices nous permettant de rendre compte de nos avancées et d'expliciter ce qui est accompli, le plus souvent : des résultats tangibles et mesurables. On ressent peut-être d'ailleurs une pression de résultats de la part des partenaires, des collègues et de la direction qui peuvent « avoir besoin de munitions » pour « défendre » une initiative ou faire valoir sa pertinence, son utilité.

De manière générale, on est amené à valoriser :

  • Les résultats finaux au détriment du processus (et tout ce qui est important dans ce processus, ce qui se passe, se transforme, etc.)
  • Les résultats que l'on peut attribuer à notre action en particulier, au détriment des résultats plus collectifs, issus d’une diversité d’initiatives et de facteurs.

Ce biais envers le « mesurable » nous empêche d’allouer toute l’attention, le temps, le soin et les ressources que l’on voudrait à certains éléments intangibles qui sont pourtant cruciaux :

  • La création de liens de confiance, essentielle à tout travail de « rencontre », de dialogue, d’innovation, de transformation sociale (et le temps que cela prend à construire) ;
  • La transformation de certaines relations sociales, de certains rapports de pouvoir, ou de certaines normes sociales ;
  • Le temps dédié au soin, au ressourcement, au relai, à l’entraide ; ainsi que la nature cyclique de notre rythme de vie, notre énergie, notre implication ;
  • La construction d’une pensée critique individuelle et collective, la construction d’un récit commun, la convergence des idées et des tactiques, etc.

Les ressources (en tous genre) étant limitées, on doit faire des choix entre des projets et des actions concurrentes. Lesquelles choisir? Et sur la base de quels critères?  Le biais du « mesurable » nous amène parfois à nous tourner vers les projets ou les actions dont les effets sont tangibles (et à court terme!). En conséquence, on va souvent délaisser les projets ou les actions qui consistent à (re)tisser des liens et faire évoluer nos relations (entre nous et avec le territoire). Or, n’est-ce pas là le cœur de l’innovation territoriale, du « faire territoire autrement » ? ll est probable que la majeure partie de ce travail ne rentre pas dans « ce qui est valorisable, tangible, mesurable ». Comment faire dans ce cas? Comment valoriser ce travail, ces processus ? Comment mobiliser les partenaires autour de cela ?

PISTES IDENTIFIÉES 

Dans notre démarches, 3 pistes ont été identifiées jusqu’à présent :

  1. Faire reconnaître les différentes composantes et leviers du changement systémique à travers des outils pédagogiques
  2. Se joindre à l’effort collectif pour faire changer « la culture de l’impact » chez les bailleurs de fonds publics et privés, par exemple en initiant/participant à un dialogue inter-organisationnel sur la question ; en développant des plaidoyers partagés ; en montrant/suivant l’exemple d’un « dépôt de projet » alternatif ou d’une « reddition de compte » alternative ; en trouvant des partenaires et alliés qui sont alignés avec vous sur ce changement de culture.
  3. S’il n’est pas possible de changer les grands projets existants, essayer d’appliquer cette lunette pour un projet-pilote de plus petite taille.

MISE EN ACTION

À partir de là, on se demande quelles sont les premières actions que l'on souhaite prendre pour accorder plus d'attention à l'intangible dans nos démarches ?

À quoi pourrait ressembler la mise en action dans nos milieux de pratique ? Quelles petit pas concret pouvons-nous poser dans cette direction ? 

Nous invitons les membres du Lab à contribuer à ce carnet, à travers plusieurs possibilités :

  • Référencer des ressources existantes, utiles pour l’action (outils, guides pratiques, exemples, étude de cas)
  • Créer des nouvelles ressources spécialement adaptées pour votre milieu (« traduire », adapter ou décliner certains contenus ou pistes dans un langage et un format plus adapté à votre milieu de pratique)
  • Créer des notes de pratique : partage d’un vécu ou d’une perspective personnelle, documentation d’une expérimentation menée dans votre milieu

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Intégré par Claudia Loutfi, le 29 janvier 2024 09:28

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Publication

18 septembre 2023

Modification

3 juillet 2024 16:17

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Pour citer cette note

Marie Michèle Lemay, Claudia Loutfi, Yann Pezzini. (2023). Question d'expérimentation n°3 : Comment valoriser l’intangible ?. Praxis (consulté le 17 juillet 2024), https://praxis.encommun.io/n/qzPIUOyBdWJl1wYhmn5yf0KrKJA/.

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