La ferme maraîchère La Clé des champs expérimente le Modèle de soutenabilité des communs

En mai 2023, Monica Garriga de la coopérative femProcomun de Barcelone était de passage à Saint-Camille pour présenter le Modèle de soutenabilité des communs. Suite à sa présentation, les participant·es ont été invité·es à choisir un projet existant pour expérimenter le modèle. C'est ainsi qu'une quinzaine d'habitant·es de la communauté ont analysé une ferme maraîchère afin de réfléchir aux moyens de rendre cette dernière plus soutenable dans une perspective de commun.

Processus d'animation

Nous nous sommes installé·es autour de la table sur laquelle une planche de travail avait été installée. À l'aide de post-it, la maraîchère et les participant·es ont été invité·es à réfléchir aux 5 piliers nécessaires à la soutenabilité de la ferme, soit : la communauté (actuelle et potentielle), les ressources mobilisées, la coproduction, le partage et la cogouvernance. Monica explique qu'un commun soutenable est un commun où on retrouve un équilibre au travers ces 5 piliers. Nous avons ainsi passé environ 15 minutes par pilier afin de mettre sur papier les différents aspects de chacun des piliers. Ce fut l'occasion de créer un espace d'échanges sécuritaire entre la maraîchère et les habitant·es du village.

Principaux apprentissages

Pour ma part, c'était la première fois que j'expérimentais la mise en œuvre du Modèle de soutenabilité des communs. Cette expérience m'a permis de constater la puissance de cet outil. Je partage ici, mes premiers apprentissages.

Apprentissage #1 - Un pilier (co)production disproportionné

En complétant le pilier coproduction, la maraîchère a été amenée à énumérer l'ensemble des tâches réalisées par la ferme. Bien plus que des fruits et des légumes, l'exercice a permis de mettre en lumière une quantité impressionnante de retombées sociales et écologiques de la ferme.

En parallèle, l'exercice a également été l'occasion de prendre conscience de l'ampleur des tâches et de la charge mentale supportées par le couple de maraîcher. Nous étions tous et toutes conscientes qu'il y avait là une disproportion entre la quantité de tâches (et de retombées positives) versus la quantité de personnes qui contribuaient à la production de celles-ci. Ce qui m'amène au second apprentissage.

Apprentissage #2 - Une communauté limitée aux client·es et aux ami·es proches

L'analyse du pilier communauté permet de se questionner sur les besoins auxquels répond le projet, ainsi que les personnes qui font actuellement partie de la communauté. C'est-à-dire qui ont un intérêt à ce que le projet existe, et par conséquent qui sont prêt·es (ou seraient prêt·es) à y contribuer pour assurer sa pérennité.

Ce pilier démontre qu'actuellement, la ferme est principalement soutenue par les gens qui consomment les fruits et légumes, ainsi que par les ami·es proches des maraîchers qui participent aux corvées d'entraide. Ici, Monica nous indique que c'est une situation très courante quand on analyse un projet de nature plutôt entrepreneuriale: la communauté est souvent limitée aux client·es. Or, Monica souligne que bien souvent, beaucoup de personnes peuvent avoir à cœur l'existence d'un commun, sans pour autant consommer ses produits et services. La contribution de ces personnes peut alors s'exprimer autrement, en réalisant certaines tâches de la co-production, en étant présent dans des espaces de co-gouvernance, ... Les façons de contribuer pouvant être toutes aussi variées que les motivations des contributeur·trices.

Cependant, pour se sentir légitime de contribuer, les personnes doivent sentir qu'elles ont accès à différents espaces de co-gouvernance, et doivent pouvoir facilement savoir ce qu'il y a à faire et comment réaliser les tâches. Ce qui m'amène au troisième apprentissage.

Apprentissage #3 - Des piliers Partage et Cogouvernance sous-développés

L'analyse du pilier Partage permet de réfléchir aux différents moyens mis en œuvre par la communauté pour partager les savoirs, les biens et services, les tâches à réaliser. Cela peut se concrétiser par la présence d'agendas publics, de listes de tâches autogérées, de guides d'utilisation, de séances d'information, de vidéos d'autoformation, etc. Or on constate ici, que la principale source de partage est l'infolettre transmise par les maraîchers à leurs clients. Pour Monica, il y a ici une possibilité pour la communauté plus large de contribuer à la soutenabilité de ce projet en proposant de mieux partager des informations qui permettraient à des personnes au-delà des client·es actuel·les de soutenir la ferme.

En ce qui a trait au pilier cogouvernance, actuellement l'ensemble des décisions semblent actuellement prises par le couple de maraîchers. Ici aussi, Monica proposait l'idée de créer des espaces de co-gouvernance où des personnes, au-delà des porteurs de projet, pourraient contribuer à réfléchir, à proposer des idées et à initier des chantiers de travail pour soutenir la ferme. 

Dans tous les cas, tant les habitant·es que la maraîchère étaient conscient·es que ces nouvelles tâches (pour mieux documenter, partager et créer des espaces de cogouvernance) ne pouvaient pas être pris en charge que par les maraîchers.

Si les gens du village ont à coeur l'existence et la pérennité de la ferme, ils et elles se doivent d'aller au-delà d'une posture de client·e et adopter celle d'une personne qui contribue à prendre soin du commun (de la ferme).

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Veille du mouvement des Fermes pérennes
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Intégré par Marie-Soleil L'Allier, le 28 mars 2024 08:56
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Modèle de soutenabilité des communs (MSC)
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Intégré par Marie-Soleil L'Allier, le 11 septembre 2023 12:33
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Publication

28 mai 2023

Modification

21 mars 2024 14:08

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