La pénurie de main-d’œuvre en TI au Québec et ses effets sur la transformation numérique du secteur communautaire

Ce texte est une synthèse de la rencontre #4 de la table sur la transformation numérique du secteur communautaire

Le secteur des technologies de l’information évolue à une vitesse folle. Comme indiqué dans des notes précédentes, les besoins des entreprises (privées et OBNL) en matière de T.I sont multiples et diversifiés, tout comme les solutions mises à leur disposition. Dans tous les cas, on constate une difficulté croissante pour ces organisations d’engager de la main-d'œuvre qualifiée qui saura répondre à leurs besoins spécifiques.

Les travailleur.euse.s dans le secteur des TIC au Québec représentent 262 800 professionnel.le.s. Selon TechnoCompétences, il se forme, au Québec, près de 9000 nouveaux talents dans le domaine à chaque année. Or, à l’échelle de Montréal seulement, les postes vacants s’élèvent à 4680 (TechnoCompétences, 2021, p.80).

Les enjeux pour le communautaire

Ces enjeux de pénurie de main-d’œuvre sont exacerbés pour le secteur communautaire puisque les moyens sont limités et permettent une moins grande compétitivité dans l’attraction et la rétention du personnel.  

Seulement 21 % des organisations interrogées disposent à l’interne d’une personne ayant les compétences nécessaires à la gestion et au développement de leurs ressources technologiques, comme un spécialiste ou un expert en technologie de l’information (Cefrio, 2016, p.16).

Le retour d’expériences du communautaire est unanime, le roulement du personnel en TI est spectaculaire. Il n’est plus possible, dû aux écarts salariaux trop grands, de capitaliser sur les valeurs et la mission des organismes communautaires pour attirer des candidat.e.s. Les salaires demandés pour un poste de niveau technique s’élèvent à 70 000$ par année ou plus, un ordre de grandeur avec lequel le secteur n’arrive pas à rivaliser. 

Mais comment faire alors pour trouver et garder des employé.e.s qualifiés dans le milieu communautaire ou dans des entreprises qui ont ces organisations comme principale clientèle? La Puce, un organisme communautaire qui travaille depuis 39 ans dans la formation et l’accompagnement à la transformation numérique des organismes communautaires a essayé plusieurs formules : recruter de jeunes diplômé.e.s ou encore des nouveaux arrivants qui ne maîtrisent pas toujours la langue et les former. Malheureusement, iels quittent tous et toutes après quelques mois. Selon l’ancien DG de Mutualit’, un organisme communautaire en services T.I, le milieu institutionnel (villes, réseaux scolaire et de la santé, etc.) est un rival particulièrement attractif pour les nouveaux candidat.e.s puisqu’il est en mesure d’offrir de meilleures conditions salariales.

Les répercussions

Les défis d’attraction et de rétention du personnel occasionnent des difficultés qui sont non négligeables. Déjà, plusieurs organismes doivent composer avec des postes vacants rendant l’offre de services incomplète. Le temps et l’argent investi dans la formation à l’interne sont considérables pour les organismes communautaires et doivent être répétés quand les employé.e.s nouvellement formé.e.s quittent. Le roulement du personnel a également des répercussions sur les client.e.s qui doivent constamment renouveler leur lien de confiance avec les nouvelles personnes embauchées. De plus, les personnes qui quittent partent souvent avec de l’information ou des connaissances en lien avec leur travail et leurs client.e.s.  

Des avenues intéressantes 

Créé en 2019, le réseau des agent.e.s de développement culturel numérique (RADN) a pour objectif d’accélérer la transformation numérique du secteur culturel. Le réseau compte maintenant 50 agent.e.s de développement numérique au service de 56 organisations culturelles nationales, régionales ou sectorielles. Les ADN peuvent démystifier les processus et les outils numériques, faciliter leur intégration ainsi qu’accompagner et soutenir le milieu culturel dans sa transformation numérique via des activités de formation, d’adoption de bonnes pratiques et de création d'initiatives qui répondent à leurs enjeux. Iels ne peuvent toutefois pas pallier à la pénurie de main-d’oeuvre en T.I. De plus, compte tenu de leur financement hybride (gouvernement et organisme), les ADN sont perçus de différentes manières par les organismes communautaires.

Le Cégep André-Laurendeau a aussi identifié le manque de personnel qualifié comme principale difficulté rencontrée par les entreprises québécoises dans leur transformation numérique.

Le cégep offre deux formations:

  1. La formation créditée – Attestation d’Étude Collégiale (AEC) en virage numérique 4.0
  2. La formation non créditée – Certification collégiale en planification numérique

Les formations sont d’une durée respective de 390 heures et 50 heures. Malgré leur durée relativement courte et leur flexibilité (en ligne et/ou de soir), les organismes communautaires ne sont pas tous au même niveau et n’ont pas tous le même temps à mettre pour de la formation à l’interne. Toutefois, le cégep peut également offrir des formations pour des cohortes privées (une dizaine de personnes) qui sont faites 100% sur mesure. 

Changer la culture organisationnelle et les modes de financement

Au-delà de la question de la main-d’œuvre en termes d’effectif, la question de la culture organisationnelle doit aussi être abordée. Pour rendre le travail plus attrayant et l’offre de services numériques au communautaire plus pertinente, il apparaît important de se tourner davantage vers la constitution d’équipes multidisciplinaires. La question de l'âgisme dans le milieu TI pourrait aussi être explorée, sachant que les personnes travaillant dans ce secteur ont tendance à quitter très jeune alors qu’elles pourraient encore offrir de la valeur aux organisations pour lesquelles elles travaillent. 

Les administrations publiques et le secteur philanthropique, s’ils souhaitent agir sur cet enjeu, devront imaginer des nouveaux modèles qui permettent de bonifier l’offre et/ou soutenir la demande de services numériques adaptés au communautaire, considérant le fossé financier qui les sépare présentement. Il est possible pour les entreprises de s’inspirer de modèles de tarification sociale ou, à une plus grande échelle, de s’inspirer d’un programme comme Innogec qui permet de subventionner l’achat de services auprès de fournisseurs qualifiés qui respectent certains critères. 

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Intégré par Gabriel Salathé-Beaulieu, le 21 février 2024 12:36
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Numérique et données - Enjeux, leviers et stratégies
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Intégré par Gabriel Salathé-Beaulieu, le 10 octobre 2023 10:57
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Transition et transformation numérique

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Publication

10 octobre 2023

Modification

21 novembre 2023 15:06

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