La durabilité des fermes en circuits courts dans le Canada atlantique

Les circuits courts sont souvent présentés comme ayant le potentiel d’améliorer la durabilité de l’agriculture et de nombreuses recherches tentent de tester l’ampleur et la réalité des vertus qui leur sont associées. Cette recherche s’intéresse à cette question dans les provinces du Canada atlantique : le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve-et-Labrador, provinces ayant jusqu’ici reçu moins d’attention, alors que selon Statistique Canada, elles se caractérisent pourtant par un pourcentage important (entre 18 et 46 %) de fermes en vente directe. En se basant sur des données recueillies auprès de 64 fermes en circuits courts, cette recherche dresse un bilan des pratiques liées à la durabilité sociale, économique et environnementale en circuits courts dans ces provinces.

L'analyse souligne une bonne durabilité sociale des circuits courts dans ces provinces. Les facteurs clés comprennent l'aspect communautaire, l'authenticité et la qualité des produits, la confiance et la proximité avec les consommateurs et le soutien à l'économie locale, notamment par la création d’emplois locaux. Ces facteurs influencent le choix du canal principal, qui est en général la vente à la ferme. L'aspect communautaire motive la vente aux marchés fermiers. La distribution locale s'étend sur 83 km en moyenne. En ce qui concerne la COVID-19, les agriculteurs ont montré une résilience remarquable et 59 % indiquent que leur profit a augmenté pendant la pandémie.

Les résultats qualitatifs montrent en revanche une plus faible durabilité économique et environnementale des circuits courts, malgré l'adoption, par de nombreuses fermes, de pratiques durables comme les emballages compostables, l’agriculture biologique, des systèmes de production hydroponiques pour économiser de l'eau et de l'espace, ou encore le passage aux véhicules électriques et aux énergies renouvelables pour réduire les émissions de GES. Les fermes interrogées, se plaignent des obstacles qu’elles rencontrent tels que les coûts élevés, les réglementations excessivement strictes et le manque de soutien politique qui entravent leur mise en oeuvre. Les agriculteurs demandent donc des incitatifs pour les producteurs locaux et les jeunes agriculteurs, ainsi que des politiques favorisant la biodiversité, la production durable et la distribution locale. Par ailleurs, ils souhaitent l'interdiction des emballages non durables et la taxation des supermarchés qui ne soutiennent pas les petits producteurs.

Les enseignements

Les résultats fournissent un éclairage intéressant sur l’agriculture de ces provinces et le rôle social que jouent les fermes de proximité. Ces fermes vendent pour l’essentiel dans un rayon proche malgré une assez faible densité de population. L’analyse montre aussi des fermes relativement isolées et peu coordonnées, ce qui les empêche de profiter des effets de synergie que l’on constate ailleurs. Leurs attentes se tournent vers l’État pour bénéficier d’une reconnaissance plus grande d’un soutien plus actif pour leurs efforts environnementaux. Dans ces provinces qui restent assez faiblement agricoles (en comparaison des Prairies, de l’Ontario ou même du Québec) et dans lesquelles, en dehors de quelques exceptions, les filières sont peu présentes, l’agriculture n’a parfois pas d’autre moyen que de miser sur la proximité et les circuits courts.

pdf N°25, fiche n°3 – janvier 2023 – mars 2023

Fiche n°3, Bulletin n°25 – janvier – mars 2023
Rédaction : Stevens Azima & Patrick Mundler

Cette veille bibliographique vous est offerte par le groupe de recherche Agriculture, territoires et développement de l’Université Laval avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.

À retenir