Faits saillants du Tour d'Horizon et d'une mini-recherche OVSS sur le roulement de personnel en développement des communautés

Fiche thématique écrite par l’OVSS et le Collectif, puis produite par l’OVSS dans le cadre des États généraux en développement des communautés, octobre 2022.

Avantages d’avoir une personne dédiée

Les démarches territoriales nous ont dit qu’avoir une personne dédiée à la coordination d’une démarche de développement d’une communauté est crucial pour son succès. Cette personne dédiée facilite la communication entre les parties prenantes et effectue le suivi des dossiers. Elle possède différents liens et informations qui accroissent grandement les capacités d’une démarche collective. En outre, elle peut 1) coordonner les projets de l’acteur collectif, 2) permettre aux partenaires de dépasser leurs chapeaux organisationnels et se rejoindre au sein d’une vision commune et d’un effort de concertation et de mutualisation des leviers et des expertises au service d’enjeux transversaux clés pour leur communauté, 3) prendre le temps de mobiliser les autres acteurs du territoire qui ne sont pas partie prenante de la démarche, 4) participer à l’évaluation continue de la démarche.

Conséquences du roulement de personnel

Tout le monde remarque que le roulement de personnel est criant en ce moment et qu’il y a des conséquences réelles sur le développement des communautés. Diverses causes peuvent expliquer ce roulement: un.e supérieur.e qui retire la personne de la démarche ou recrute une autre personne à sa place, un.e élu.e qui n’est pas réélu.e, le départ de la personne en poste à la suite d’une promotion ou pour changer d’emploi, une friction entre deux personnes autour de la table, un congé de maternité, un surmenage, une surcharge ou une perte d’intérêt, etc.

Les territoires sont sensibles aux conséquences de ce roulement. Il en découle une perte d’expérience et de mémoire de la démarche tout en devant intégrer de nouvelles personnes. Ceci réduit le nombre de personnes qui interagissent ensemble depuis longtemps et nuit au processus long nécessaire pour créer une dynamique collective basée sur une histoire commune, des réflexes partagés et des orientations collectives adoptées par chaque partenaire ou membre de l’équipe. Et cela demande du temps afin que les nouvelles personnes recrutées s’approprient de tous ces éléments à leur arrivée dans une démarche territoriale de concertation intersectorielle, ce qui est d’autant plus important si elles arrivent au poste de coordination.

Si ce roulement soulève déjà un enjeu de pérennisation, il est encore plus aigu quand c’est la coordination d’une démarche qui quitte. Les liens personnels (confiance, leadership) tissés entre une coordination et les acteurs d’une démarche sont à refaire avec la nouvelle recrue. La mémoire se perd, peut-être aussi la ‘protection’ de la vision commune de la démarche. Ceci ralentit souvent la concertation intersectorielle lorsqu’il faut trouver une personne remplaçante à la coordination et que la passation des dossiers ne se fait pas en commun entre la personne qui part et celle qui arrive. Les réunions sont moins efficaces pendant un moment; ça peut ralentir le groupe et être démotivant. Le roulement – et le fait d’apprendre sur le tas à chaque fois – fait aussi en sorte que, le temps que la nouvelle coordination se forme, il y a beaucoup de possibilités de ratés, d’occasions manquées et de décisions

improvisées qui ne sont pas toujours à point. Et ces ratés peuvent s'ajouter aux coupures de ressources, s’il y a, au point que certaines démarches se voient stoppées avant même de pouvoir en récolter les fruits. À l’analyse, ces constats soulèvent deux questions de fond: comment faire pour allonger la durée des personnes en poste de coordination de démarches (pérennisation)? Comment faire pour outiller les nouvelles personnes qui arrivent à la coordination d’une démarche collective?

Conditions de travail

Sur les différents territoires, il est demandé aux coordinations de démarches d’offrir des animations de qualité, démocratiques, ‘neutres’, au service de l’assemblée et de la vision commune. Ceci demande d’avoir des réflexes de collaboration, de travail de groupe, des méthodes innovantes et dans l’art de la discussion éthique et inclusive. Ça demande parfois une posture de médiation pour venir aplanir et passer au travers des tensions entre les partenaires, d’autres fois, une posture de combativité pour effectuer des revendications au nom de la démarche. Au final, ces personnes sont tiraillées entre quatre loyautés : envers leur organisation fiduciaire, envers la démarche collective, envers l’ensemble de la communauté et envers leur identité professionnelle. Le tout pour un emploi méconnu et souvent peu valorisé et aux conditions de travail peu avantageuses. Si l’idéal serait d’avoir une personne d’expérience pour répondre aux besoins d’une démarche territoriale intersectorielle et concertée, les postes sont souvent comblés par des gens en début de carrière, ce qui exacerbe le besoin en renforcement des compétences.

Prendre collectivement le développement des communautés au sérieux semble demander la reconnaissance du travail accompli avec un salaire et des conditions conséquentes pour le faire. Par exemple, dans les tables de quartiers de Montréal, le financement tombe comme de la pluie, mais les coordinations se font dire qu’il ne faut pas trop augmenter le salaire des ressources pour que l’argent aille aux projets. Mais est-ce que les démarches collectives gagnent dans ce pari de prioriser les projets ? Est-ce que le contexte de départ récurrent des coordinations de démarches qui recherchent un salaire décent pour mieux subvenir à leurs besoins, souvent en se redirigeant vers la fonction publique nourrit l’atteinte des objectifs du développement des communautés? Et ce, sans oublier les difficultés de recrutement et de recommencement auxquels font alors face les démarches. Dans ce contexte, quelle place peut-on et veut-on accorder aux conditions de travail des coordinations en développement des communautés afin de retenir les personnes compétentes et bien intégrées dans leurs territoires et leurs démarches intersectorielles concertées?

Formation / Compétence

À la suite du Tour d’horizon, nous remarquons que beaucoup de gens arrivent en début de carrière dans le développement des communautés et apprennent sur le tas. Est-ce que l'arrivée de ces personnes nécessite qu'elles soient davantage formées sur les bases du développement des communautés? Serait-il pertinent d’assurer aussi une formation continue qui permette de se maintenir à l’affût des transformations sociales ou des manières de faire du développement des communautés en phase avec les nouvelles réalités et avancées de la pratique, mais aussi les crises et les besoins du moment? Serait-il possible que des formations mettent en place des mécanismes pour soutenir les personnes qui coordonnent des démarches dans leurs compétences et leur engagement? Sur quels sujets pourraient porter les formations: l’influence et la représentation? Les notions, les concepts et les pratiques du développement des communautés? Les conditions d’émergence de démarches fructueuses avec des exemples à l’appui? Les temps courts et longs de la planification? L’évaluation des impacts collectifs au service de l’action collective? La capacité d’agir, de réagir et de s’ajuster? Des savoirs et des compétences intangibles comme la communication (se comprendre, s’écouter, se dire les vraies affaires)? Des compétences de rétroaction, d’évaluation, ainsi que l’aptitude de se situer soi-même dans le tout? La capacité de favoriser l’accueil, l’évolution et la posture généralisée d’apprenant.e dans la démarche?

Que penser du coaching qui permet de développer des aptitudes personnelles et interpersonnelles qui permettraient d'accroître le potentiel de la coordination d’une démarche? Qu’elle puisse développer une posture de confiance, personnelle et collective, de sécurité intérieure pour répondre aux besoins de la démarche (et non une posture de faiblesse, de besoin de plaire, de soumission) face aux bailleurs de fonds et autres acteurs externes ou aux partenaires? Que penser du mentorat par une personne d’expérience dans le domaine du développement des communautés?

Renforcement / formation des acteurs d’une démarche collective

Y a-t-il d’autres sujets de formation à explorer: outils de médiation et de résolution de conflits; démocratie partagée (délibération, inclusion et diversité, intelligence collective et relationnelle); renforcement des compétences : souplesse, adaptabilité et accessibilité; rôles et objectifs des comités, des tables et partenaires impliqués dans une démarche; décision stratégique: gestion agile, pertinente et efficace; évaluation évolutive et rétroactive; communautés de pratique; sensibilisation aux réalités culturelles et autochtones; reconnaissance des organismes communautaires; intervention sociale; intégration du développement des communautés dans les leviers des ministères et des secteurs d’activités du milieu publique et communautaire, etc.

Les personnes accompagnant le Tour d’horizon aimeraient que le Rendez-vous national des États généraux crée une communauté de pratique ponctuelle, un lieu de retrouvailles, de ressourcement, de réconfort, de liens entre gens qui pratiquent la même profession. Un moment collectif qui pourrait venir combler, de manière ponctuelle, leur besoin de reliance et de ne pas se sentir seul.e et qui pourrait être inclusif et rassembleur des différentes appellations, réseaux et regroupements d’acteurs qui font du développement territorial, social, collectif, etc. Plusieurs se rappellent encore de l’espace interterritorial créé il y a quelques années pour permettre aux acteurs territoriaux de se rassembler à l’échelle nationale.

Serait-il intéressant de créer de tels espaces ou réseaux de communautés de pratiques (ou de formation continue) pour se former et s’outiller en continu, et se sentir comme faisant partie d’une pratique professionnelle à travers les différentes échelles territoriales ? Est-ce que les communautés de pratiques pourraient se situer à l’échelle régionale afin de tenir compte des dynamiques territoriales, mais se rencontrer ponctuellement à l’échelle nationale? Est-ce que ça pourrait même inclure des partenaires et membres des démarches collectives autres que les acteurs territoriaux du DC, dans un souci de transferts de connaissances et de formation continue des milieux, surtout dans un contexte d’un grand roulement de personnel ? Qui pourrait porter cette initiative ?

Effet de groupe

Quand des gens ont fait les mêmes formations et sont autour d’une même table, on se ramasse avec des leaders rassembleurs qui partagent les mêmes approches, les mêmes compréhensions, les mêmes outils et qui peuvent collaborer à l’échelle de leur quartier ou de leur communauté. Ça peut renforcer les capacités du milieu et donner des résultats intéressants. Qu’est-ce que ça inspire ?

Et puisqu’il y aura toujours du roulement, même si ça roule plus lentement : comment former la relève, transférer les connaissances spécifiques à un territoire ?

diversity_3Organisation(s) reliée(s)

bookmark Terme(s) relié(s)

padding Carnet(s) relié(s)

file_copy 30 notes
États généraux en développement des communautés - 2022
file_copy 30 notes
person
Intégré par Joël Nadeau, le 7 juin 2023 14:48

Auteur·trice(s) de note

forumContacter l’auteur·trice

Communauté liée

Chantiers nationaux des états généraux en développement des communautés

Communauté Passerelles

Profil En commun

forumDiscuter de la note

Publication

28 octobre 2022

Modification

24 août 2023 10:44

Historique des modifications

Licence

Attention : une partie ou l’ensemble de ce contenu pourrait ne pas être la propriété de la, du ou des auteur·trices de la note. Au besoin, informez-vous sur les conditions de réutilisation.

Visibilité

lock_open public