Quand l’agriculture soutient la communauté

Aux États-Unis, divers dispositifs permettent aux ménages à faible revenu d’avoir accès à des produits fermiers. Parmi ceux-ci, le CO-CSA (Agriculture soutenue par la communauté avec compensation des coûts) permet à des abonnés à faible revenu de payer seulement une fraction du coût du panier. Le reste est pris en charge par d’autres sources de financement privées et publiques. Il est connu que le système ASC est parfois critiqué pour ses difficultés à inclure des ménages à faible revenu. Le COCSA est une opportunité pour toucher un public plus large. Mais les producteurs qui choisissent de gérer eux-mêmes ce dispositif, découvrent vite l’ampleur et la difficulté de sa gestion. De fait, divers intermédiaires se sont dédiés à cette tâche. Mais ces organismes rencontrent aussi leurs propres défis. À partir de l’étude de 5 organisations à but non lucratif offrant la gestion de paniers à prix réduit dans 3 régions des États-Unis, cet article analyse leur fonctionnement et leurs enjeux.

Trois enjeux ressortent. Premièrement, les fonctions assurées par ces organisations peuvent être plus ou moins diversifiées, allant de la simple offre de subventions pour les fermes en ASC, à un rôle plus structurant de consolidation de l’offre (à l’image d’un food hub), en passant même parfois par une implication directe dans la production agricole. Le nombre de membres consommateurs varie également (de la quarantaine au millier). Ces organisations subventionnent les paniers dans une fourchette allant de 40% à 100%. Elles acceptent les coupons alimentaires gouvernementaux et autorisent un paiement à la semaine plutôt qu’un seul montant en début de saison. Deuxièmement, la gestion des paiements et des retards de paiements change grandement d’une organisation à une autre, certaines étant plus permissives et plus ouvertes à la négociation que d’autres. Du côté des bénéficiaires, le paiement par coupons gouvernementaux est pesant en raison de formalités gouvernementales obligeant le consommateur à aller payer en personne et n’autorisant pas le paiement à l’avance.

Enfin, malgré les avantages économiques pour les participants, la fidélisation des consommateurs reste un défi. Si les auteurs soulignent la diversité des consommateurs membres, ils soulignent aussi que des formations ou des cours de cuisine sont parfois nécessaires pour aider cette clientèle à se familiariser avec des fruits et légumes moins communs. La recherche de plus de flexibilité dans les horaires et le contenu des paniers est aussi un enjeu. En général, le taux de désistement des membres reste néanmoins faible, ce qui suggère que ces programmes de paniers à prix réduit marchent plutôt bien. Mais les auteurs n’ayant interviewé que les gestionnaires de ces organisations, le bon fonctionnement de ces ASC pourrait être surestimé.

Les enseignements

Le principe des ASC est que le consommateur porte une partie du risque en acceptant de payer les paniers à l’avance. Avec les paniers à prix réduit ciblant les populations vulnérables, le modèle s’adapte et entend soutenir à son tour la communauté. L’intervention des organisations intermédiaires à but non lucratif permet de soulager les producteurs du fardeau administratif, logistique et financier, tout en consolidant leur offre et en agissant comme des food hubs pour la production alimentaire locale. Ce modèle montre encore une fois l’importance de certains intermédiaires dans le développement des circuits de proximité, mais il ne favorise guère les rencontres directes entre producteurs et consommateurs qui sont une des forces de l’ASC.

pdf N°20, fiche n°5 – mars – avril 2022

Fiche n°5, Bulletin n°20 – mars – avril 2022
Rédaction : Stevens Azima & Patrick Mundler

Cette veille bibliographique vous est offerte par le groupe de recherche Agriculture, territoires et développement de l’Université Laval avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.