Que recherchent les consommateurs de produits de la mer au Canada ?

Manger notre Saint-Laurent : au Québec, la promotion des produits de la mer locaux est dans l’air du temps. L’article présenté analyse dans un spectre plus large (plusieurs provinces canadiennes) la demande en matière de produits de la mer, les préférences des consommateurs canadiens et les conséquences. En comprenant les préoccupations de cette clientèle, les acteurs distribuant des produits de la mer en circuits courts pourraient en profiter pour mieux cibler et en même temps élargir leur clientèle.

Un total de 2006 consommateurs canadiens (en Colombie-Britannique, dans les Prairies et en Ontario) a rempli un questionnaire en ligne. Les répondants étaient invités à parler de leurs comportements, habitudes et attitudes en matière d’achat de produits de la mer (poissons, fruits de mer mais aussi plantes marines comestibles), ainsi que de leur disposition à payer pour certaines propriétés de ces produits.

La recherche sur les produits de la mer en circuits courts se développe. Elle partage d’ailleurs beaucoup d’enjeux et de constats retrouvés dans les travaux sur les circuits courts au sens large, tant en matière de bénéfices associés (résilience, biodiversité, environnement, qu’en ce qui concerne les défis à surmonter (vivabilité, impact encore limité voire cloisonné dans des marchés de niche, etc.).

En enquêtant auprès des consommateurs, l’article obtient des résultats sur leurs préoccupations et leurs habitudes qui pourraient aider à élargir la portée de ces circuits courts. Les auteurs ont choisi de tester cinq caractéristiques clés généralement associées aux produits de la mer commercialisés en circuits courts : petite échelle, origine locale, traçabilité, durabilité et qualité supérieure du produit. 

Des consommateurs orientés « produit »

L’enquête révèle que les participants consomment principalement, régulièrement ou occasionnellement, du saumon, du thon et des crevettes, comme ailleurs en Amérique du Nord. Au total, 86% des répondants achètent des produits de la mer pour consommation à la maison. Seulement 9% n’achètent ni ne consomment ces produits, surtout pour des questions de préférence en matière de goût (57% de ces participants), et accessoirement pour des questions de prix, de santé, d’environnement, etc. Quant à ceux qui achètent ces produits, les produits achetés le sont, pour la grande majorité des participants (80%), sous forme congelée, mais la consommation de produits frais (70% des participants), en boite de conserve (69%) reste aussi très courante. La consommation des produits de la mer semble donc être assez répandue au Canada.

Les participants ont été invités ensuite à indiquer les caractéristiques des produits les plus importantes à leurs yeux parmi une liste de neuf caractéristiques généralement recherchées. En tête de liste, au regard de l’importance accordée (« très importante » ou « importante »), se retrouvent des caractéristiques comme le goût, l’aspect du produit et sa fraicheur. Ensuite viennent l’accessibilité en matière de prix (produit abordable) et l’accès à de l’information de qualité sur le produit. Les consommateurs se préoccupent aussi, par importance décroissante, des avantages santé que procurent ces produits, de la durabilité des modes de production et de l’origine locale du produit. Ils recherchent enfin des produits prêts-à-consommer et en dernier lieu valorisent les retombées économiques positives pour les pêcheurs. Ce que ce tableau révèle dans l’ensemble, c’est que les caractéristiques pouvant être évaluées directement à l’étape de la consommation (goût, prix,information, etc.), sont au centre des préoccupations des consommateurs de produits de la mer. A l’autre extrémité, on retrouve les caractéristiques qui dépendent plus de la chaine ou des étapes en amont.

Il est intéressant de remarquer que lorsqu’on demande à ces participants lesquels de ces attributs sont plus faciles à trouver, cela suit plus ou moins la même tendance (les avantages pour la santé et le goût, l’aspect et la fraicheur étant cités en premier), mais des caractéristiques très recherchées (comme des produits à prix abordables ou de la bonne information sur les produits), semblent aussi difficiles à obtenir de façon satisfaisante, selon les participants. En matière de consentement à payer, les consommateurs se montrent cohérents, puisque les attributs qui obtiennent les meilleures performances sont le goût, l’aspect et la fraicheur. Mais on note aussi que certaines franges (autour ou moins de 30% des acheteurs) sont disposées à payer plus pour les autres attributs. Il y a donc toujours, avec une bonne segmentation, la possibilité de conquérir davantage de consommateurs, pourvu qu’ils retrouvent les attributs qu’ils valorisent. Cette segmentation doit idéalement faire intervenir aussi des critères démographiques, principalement l’âge (qui semble exercer une influence très marquée sur les attributs recherchés, les habitudes et les comportements d’achat en matière de produits de la mer) et, dans une moindre mesure, le niveau d’éducation, le revenu et les caractéristiques du lieu où le consommateur se trouve.

Les enseignements

Cet article ne se concentre pas sur les consommateurs qui achètent des produits de la mer en circuits courts, mais ce faisant il fournit des informations précieuses sur ce qui pourrait attirer ces consommateurs à acheter ces produits en circuits courts. Certes, certaines habitudes sont bien établies (par exemple, l’achat de produits de la mer congelés) et la palette des espèces consommées reste dominée par trois grands produits (saumon, thon et crevettes) alors que la diversité des espèces est l’une des forces des circuits courts. Mais, cette enquête suggère que des opportunités de marché encore inexploitées sont peut-être à trouver dans la variété d’attributs valorisés par les consommateurs et le fait qu’une frange de la population est tout de même prête à payer plus pour les obtenir. Alors que dans d’autres pays, pêcheurs et coopératives ont su développer des formes innovantes de circuits courts, comme les « pêches soutenues par la communauté », le Québec apparaît en retard et il reste bien du chemin à parcourir pour mieux « manger notre Saint-Laurent ».

pdf N°18, fiche n°2 – août 2021 – septembre 2021

Fiche n°2, Bulletin n°18 – août 2021 – septembre 2021
Rédaction : Stevens Azima & Patrick Mundler

Ce bulletin vous est offert avec le soutien du Partenariat canadien pour l’agriculture.

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Intégré par Anne-Sophie Thomas, le 4 octobre 2023 11:38
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Circuit court, Environnement, Fiche

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Publication

1 août 2021

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10 novembre 2023 08:21

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