Les guides alimentaires au prisme de la santé et de l’environnement

Environ 80 pays publient un guide alimentaire. Au Canada comme ailleurs, la publication d’un tel guide est toujours un événement très attendu. Longtemps, l’objectif principal a été de promouvoir la santé nutritionnelle par des habitudes alimentaires saines. Mais récemment, plusieurs pays ont amendé leurs guides alimentaires pour prendre en compte leur impact environnemental. Un article publié en octobre dernier dans la revue Science of The Total Environment a comparé six grands guides alimentaires autour de ces deux aspects (environnement, santé) : le guide américain, le guide des pays nordiques, le guide des Pays-Bas, le guide espagnol, le guide italien et le guide méditerranéen.

Sur le plan environnemental, les auteurs de l’article ont calculé l’empreinte carbone et l’empreinte eau des régimes alimentaires proposés. Les auteurs montrent que c’est le régime américain qui a l’empreinte carbone la plus élevée, 2.98 kg CO2-équivalent par personne par jour contre 2.04 pour le guide alimentaire Italien, qui offre l’empreinte carbone la plus faible. Une analyse plus détaillée montre que la place, même relativement marginale dans tous les régimes, accordée aux produits animaux (principalement les produits laitiers et la viande) explique l’essentiel des émissions associées (80% dans le cas du régime américain), ce qui souligne le caractère hautement intensif en carbone des élevages industriels. Au niveau de l’empreinte eau, le guide espagnol et la diète méditerranéenne apparaissent comme les plus intensifs en eau (3181 et 2826 litres par personne par jour, respectivement). Les États-Unis présentent cette fois une performance mitoyenne et c’est le guide alimentaire italien qui présente la plus faible empreinte eau (1760 litres). L’analyse plus poussée par produit et par type de guide révèle que ces différences ne tiennent pas à une cause unique. Enfin, quant à l’aspect santé, après une discussion de l’apport de chaque régime pour les principaux nutriments, l’article combine deux grands indicateurs de qualité pour comparer les guides: le régime méditerranéen affiche une performance élevée pour les deux indicateurs, les pires performances sont associées aux recommandations américaines et néerlandaises, et enfin les autres régimes affichent une performance intermédiaire. Hormis pour l’empreinte eau, les recommandations du guide alimentaire américain sont donc les moins performantes au niveau environnemental et en matière de santé nutritionnelle parmi les guides étudiés.

Les enseignements

Après plus d’une décennie d’attente, un nouveau Guide alimentaire canadien a été publié en 2019. Il s’agit d’un événement important. Aucun secteur alimentaire ne souhaite être exclu de ce guide, et le document peut influencer l’orientation des politiques agro-alimentaires. Ainsi, en recommandant de consommer davantage de produits végétaux et moins de produits animaux, le dernier guide a suscité maintes réactions. Ces guides peuvent en effet influencer les choix des consommateurs, il y a donc des enjeux de santé et des enjeux économiques. Mais à l’heure des changements climatiques, cet article apporte un regard neuf dans la discussion en montrant l’intérêt et la possibilité d’une comparaison internationale des guides, cette fois, pas seulement en matière de qualité nutritionnelle mais aussi au niveau de leur impact potentiel sur l’environnement.

pdf N°19, fiche n°3 – janvier – février 2022

Fiche n°3, Bulletin n°19 – janvier – février 2022
Rédaction : Stevens Azima & Patrick Mundler

Cette veille bibliographique vous est offerte par le groupe de recherche Agriculture, territoires et développement de l’Université Laval avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.