La cour supérieure affirme la supériorité du droit de propriété sur la protection du patrimoine.

Un litige opposant la ville de Saint-Augustin-de-Desmaures (ville de Saint-Augustin) à un particulier vient d’être résolu par un arrêt de la Cour supérieure du Québec. La question en litige est : est-ce que la ville de Saint-Augustin a procédé à une expropriation déguisée ? Une tension existante entre le bien commun et le droit de propriété est mise en exergue. Les municipalités disposent du droit d’exproprier des propriétaires, mais une compensation monétaire doit être accordée.

L’expropriation déguisée

L’expropriation déguisée se définit par un usage abusif par les municipalités de leur pouvoir de réglementer et qui a pour conséquence de priver les propriétaires de jouir de leurs droits de propriété.

L’argument est souvent utilisé dans des causes traitant du droit de l’environnement, c’est la première fois que cet argument est utilisé en matière de préservation du patrimoine. L’an dernier, la Cour d’appel du Québec a condamné la ville de Mascouche à indemniser une propriétaire dont le terrain avait obtenu le zonage conservation.

La Cour supérieure a donc intimé la Ville de Saint-Augustin à payer 138 000 $ pour racheter le terrain, 5000 $ de dommages et intérêts ainsi que le remboursement de frais divers, incluant les taxes municipales et les frais d’acquisition.

Les effets de la décision

Cette décision risque de faire jurisprudence, puisqu’elle est la première en matière de protection du patrimoine, et elle risque aussi d’affaiblir le pouvoir des municipalités en la matière. Cette décision pourrait aussi avoir pour effet de décourager les villes d’adopter des règlements de citation patrimoniale.

Des pistes de solutions

  • Inscrire dans la loi que les pouvoirs conférés aux municipalités en matière de citation et de zonage sont légale et ne constitue pas de l’expropriation déguisée, donc qu’il n’y a pas d’indemnité assujettie à ces actes.
  • Inscrire dans la loi sur l’expropriation que les municipalités doivent payer la juste valeur marchande plutôt que les revenus potentiels.

Des leçons à tirer de ce cas précis

Dans ce cas-ci, la ville de Saint-Augustin a autorisé le lotissement d’un lot, a émis des permis d’abatage d’arbres avant de décider de protéger ledit lot.

Une fois que le Domaine des Pauvres a été zoné patrimoniale, le maire a affirmé que les parties devraient s’asseoir ensemble pour régler le litige, or aucun suivi n’a été faite suite à cette affirmation malgré des demandes de rencontres envoyées par Bouffard.

Les faits menant à la victoire du particulier, Bouffard, sont les suivants :

Chronologie

  • 30 novembre 2018, lotissement du lot en litige, par le propriétaire de la Maison Couture, lot situé dans le Domaine des pauvres
  • 6 décembre 2018, acquisition du lot par Bouffard
  • 1er mars 2019, tentative de vendre le lot en litige, tout en continuant les démarches pour obtenir un permis de construction.
  • Mai 2019, un avis de conformité est émis par la commission de protection du territoire agricole, autorisant la construction d’une maison. Une demande de permis de construction est déposée le jour de la réception de l’avis de conformité. Un certificat autorisant l’abattage d’arbre est aussi émis.
  • 24 juillet 2019, la ville de Saint-Augustin tient une séance extraordinaire lors de laquelle, elle demande à la ministre de la Culture et des Communications de protéger le Domaine des Pauvres. Aucun des propriétaires n’ont été avisé de cette séance extraordinaire.
  • 1er août 2019, une ordonnance est émise interdisant toute altération du Domaine des Pauvres, pour les 30 prochains jours.
  • 12 août 2019, la ministre de la Culture et des Communications indique qu’elle ne fera pas suite à la demande de protection patrimoniale du Domaine des Pauvres.
  • 27 août 2019, la ville de Saint-Augustin modifie son plan directeur d’aménagement et créer une zone de protection sur le Domaine des Pauvres.
  • 3 septembre 2019, une nouvelle motion interdit toute construction sur le Domaine des Pauvres.
  • 17 septembre 2019, une consultation publique, lors de laquelle ledit règlement est adopté, est tenue.
  • Septembre 2019, le maire de Saint-Augustin affirme que les parties devraient s’asseoir ensemble pour trouver une solution au présent litige.
  • 6 juillet 2021, Bouffard dépose une nouvelle demande de permis de construction.

Pour en savoir plus

Pour lire le jugement

https://www.ledevoir.com/societe/780742/patrimoine-bati-une-decision-juridique-lourde-de-consequences-pour-la-protection-du-patrimoine-quebecois

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Publication

7 février 2023

Modification

21 juillet 2023 15:05

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