note Note générale

1.2. L’innovation sociale | Mémoire sur les communautés de pratique / problématique

ℹ️ Contexte
Cette note fait partie du carnet "La communauté de pratique comme stratégie de transfert de connaissances dans le champ de l’innovation sociale", un mémoire qui propose un regard critique sur le déploiement de la démarche Passerelles 1 (2018-2022) et qui vise à identifier les conditions de succès et les facteurs à considérer pour ce type particulier de communautés de pratique (CdP).
Table des matières | Résumé | Références

Cette recherche s’intéresse aux CdP portées par des acteur·trices de l’innovation sociale, ou plus spécifiquement qui œuvrent dans le champ de l’innovation sociale. Comme ce terme peut porter à confusion, cette section vise à en préciser le sens.

1.2.1. La pratique

Notons que les définitions sont nombreuses et parfois divergentes. Voici trois définitions tirées du lexique de Passerelles (consulté en novembre 2021).

Le Réseau québécois de l’innovation sociale (RQIS) la définit comme une « nouvelle idée, approche ou intervention (…) qui répond plus adéquatement et plus durablement que les solutions existantes à un besoin social bien défini (…) et qui produit un bénéfice mesurable pour la collectivité et non seulement pour certains individus », ajoutant qu’elle est transformatrice et systémique et qu’elle s’inscrit en rupture avec l’existant.

Le Centre de recherche sur les innovations sociales (CRISES) propose qu’il s’agisse de :

« nouveaux arrangements sociaux, organisationnels ou institutionnels ou encore nouveaux produits ou services ayant une finalité sociale explicite résultant, de manière volontaire ou non, d’une action initiée par un individu ou un groupe d’individus pour répondre à une aspiration, subvenir à un besoin, apporter une solution à un problème ou profiter d’une opportunité d’action afin de modifier des relations sociales, de transformer un cadre d’action ou de proposer de nouvelles orientations culturelles ».

Pour la Fondation McConnell,

« il y a plusieurs façons de définir l’innovation sociale, mais à la base, celle-ci amène les gens et les organismes à créer conjointement, découvrir, adapter et développer des solutions plus efficaces à des problèmes sociaux aux racines profondes, ce qui permet de rendre nos systèmes naturels et humains plus adaptatifs et résilients. »

Tel que le mentionnent Bussières et coll. (2018), l’innovation sociale est parfois présentée comme un processus qui implique une collaboration entre une diversité d’acteur·trices : « sous cet angle, l’innovation sociale peut être envisagée comme un processus collectif d’apprentissage et de création de connaissances » (p.17).

Face à ce panorama de définitions, il est plutôt difficile pour les acteur·trices de la transformation sociale de savoir si leur action s’inscrit ou non un processus d’innovation sociale. Comme l’exprimait le chercheur Juan-Luis Klein lors d’un webinaire organisé par Culture pour tous le 12 novembre 2020 : « on ne se lève pas un matin en disant qu’on va faire de l’innovation sociale. On peut dire qu’on expérimente, cependant. Et de cette expérimentation émergera ou non une innovation sociale ».

1.2.2. Le champ

Dans le cadre de ce mémoire, l’innovation sociale ne sera pas considérée comme une pratique ou comme un processus, mais comme un champ tel que le propose Folco (2020), plus particulièrement un champ d’acteur·trices qui interviennent dans une finalité de transformation sociale et d’émancipation.

Plutôt que de s’attarder au concept d’innovation, cet auteur propose de réfléchir aux acteur·trices, aux règles et à l’espace institutionnel de l’innovation sociale. Le champ fait ici référence à la notion telle que définie par Bourdieu en 1982. Pour Folco, le concept de champ est plus précis que les termes domaine ou secteur, car il désigne « un milieu social particulier défini par un enjeu spécifique que les différentes personnes impliquées doivent comprendre pour tirer leur épingle du jeu » (paragr. 8).

Dans ce champ, Folco constate la présence d’acteur·trices qui

« interagissent dans une arène où se croisent stratégies d’accumulation de capital économique et symbolique, quêtes de légitimité, rivalités et luttes territoriales, mais aussi amitiés sincères, inquiétudes partagées pour le devenir du monde, et souci pour la justice sociale (paragr. 88). »

Ces constats l’amènent à définir l’innovation sociale comme un champ de bataille. La convergence d’une multitude d’acteur·trices au sein de ce champ et son institutionnalisation progressive au cours des dernières années « amène son lot d’ambigüités, de rencontres inédites, mais aussi de tensions », selon Folco (paragr. 91).

L’innovation sociale se retrouve ainsi sur un terrain mouvant qui se définit progressivement, et donc également un « champ de bataille sur sa propre signification » (paragr. 93), conclut l’auteur.