Impacts des stratégies de commercialisation en circuits courts sur l’usage des pesticides

La question de savoir si la vente en circuits courts (CC) favorise ou non une diminution de l’utilisation des pesticides reste très débattue. Ce type de commercialisation est souvent présenté comme une alternative bénéfique à la vente par circuit long, en termes d’effets sur la société, l’environnement ou encore l’économie locale, mais la recherche manque souvent de données pour étudier plus finement si les circuits courts peuvent être vraiment associés à une agriculture plus écologique. Cette recherche menée sur le territoire français s’est dotée de l’objectif d’évaluer l’impact d’une mise en marché en CC sur la quantité de pesticides utilisés par les producteurs pratiquant ce type de commercialisation.

Les chercheurs ciblent trois réalités propres à une mise en marché en CC qui ont un effet potentiel de réduction d’usage de pesticides par les agriculteurs qui utilisent ce mode de commercialisation. D’abord, les produits vendus en CC sont affranchis de certains standards du marché, standards souvent liés à des critères esthétiques qui imposent de nombreux traitements. Ensuite, les producteurs reçoivent une meilleure rémunération. Enfin, le réseautage entre fermes de proximité influence les pratiques phytosanitaires utilisées. Par la suite, quatre scénarios de mise en marché sont étudiés par les auteurs : les mises en marché (i) directe au consommateur (DTC), (ii) avec un intermédiaire (DTR), (iii) combinant ces deux stratégies (DTC et DTR) et (iv) la vente par circuits longs. En utilisant les données du recensement agricole français de 2020 et des enquêtes menées en 2018, les stratégies phytosanitaires mises en place par des producteurs agricoles sont analysées et mises en lien avec le type de commercialisation qu’ils utilisent. L’usage des pesticides est calculé à l’aide d’un indice de fréquence des traitements, mettant en relation les doses appliquées et recommandées selon la superficie traitée. Les résultats obtenus montrent que les agriculteurs qui commercialisent via la vente DTC utilisent 72 % moins de pesticides dans leurs pratiques de production que ceux qui commercialisent en circuit long. La mise en marché combinant DTC et DTR est associée à une réduction de 49 % d’usage des pesticides tandis qu’aucun effet significatif n’est observé auprès des agriculteurs pratiquant une mise en marché avec un intermédiaire (DTR).

Les enseignements

Bizarrement, les auteurs ne retiennent pas les interactions directes avec les consommateurs, comme l’un des moteurs possibles de la réduction de l’usage des pesticides. Pourtant ce moteur est souvent mis en avant dans la littérature. Cela dit, l’intérêt de cette recherche est de pouvoir s’appuyer sur un recensement national pour valider un plus faible emploi des pesticides de synthèse en vente directe que lorsqu’un produit est distribué en circuits longs. Cette recherche vient confirmer les résultats d’une autre étude, portant cette fois sur les liens entre circuits courts et emploi des pesticides aux États-Unis. De plus en plus, les preuves convergent et montrent qu’il serait judicieux de soutenir le développement de la vente directe pour favoriser l’atteinte des cibles de réduction de l’usage des pesticides.

pdf N°31, fiche n°1 – février – mars 2024

Rédaction : Marilou Ethier, Pascal Genest-Richard, Patrick Mundler

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