L'approvisionnement en produits alimentaires locaux par les institutions publiques telles que les hôpitaux et les écoles est de plus en plus perçu comme une stratégie efficace pour encourager une alimentation saine, locale et durable. Le marché institutionnel se distingue par une demande volumineuse, stable et continue. Une étude menée en Australie s'est penchée sur l'origine des aliments servis dans deux hôpitaux de Melbourne, situés dans l’État de Victoria, ainsi que sur les perceptions des acteurs impliqués (patients, personnel, fournisseurs). Cette recherche repose sur une analyse de l'origine de 110 aliments frais ou faiblement transformés, ainsi que sur des entretiens menés auprès de 23 acteurs. Ces hôpitaux, dépourvus de cuisine sur site, confient leur approvisionnement à des fournisseurs qui se procurent les ingrédients et les préparent dans un système de production centralisé de type cook-chill (les plats sont cuisinés et livrés réfrigérés).
Trois résultats clés émergent. D’abord l'origine des produits ne peut pas toujours être déterminée : pour 5 produits, aucune donnée n'était disponible. Environ un tiers des produits étaient importés, un quart des produits australiens provenaient de l’État de Victoria, le reste provenait des autres États australiens. Mais pour 15% des produits australiens l’origine précise restait inconnue. Ensuite, la provenance était souvent associée à un type de produit. Ainsi, les légumes et les yaourts étaient principalement d'origine victorienne, tandis que les jus, viandes et fruits de mer étaient importés. Les produits laitiers frais et l'eau étaient australiens, mais sans information précise sur leur origine. Enfin, les résultats qualitatifs ont mis en évidence les avantages associés à l'approvisionnement local selon les participants : soutenir les producteurs locaux, renforcer la durabilité environnementale, la résilience du système alimentaire et améliorer la réputation de l'hôpital. Mais curieusement, ces valeurs étaient surtout portées par le personnel de l’hôpital, alors que l’opinion des patients semblait plus mitigée, certains ne considérant pas l'approvisionnement local comme une priorité. L’enquête souligne également diverses tensions inhérentes à un approvisionnement plus local dans les institutions : préférence pour les bas prix, difficultés pour trouver les fournisseurs locaux, routines établies avec certains fournisseurs, difficultés d’identification de l’origine des produits, limitation de l'autonomie des hôpitaux dans le choix de leurs fournisseurs, absence de cuisine et de personnel pour transformer des produits bruts.
Les enseignements
Cette recherche met en évidence la traçabilité limitée des produits, qui rend au fond difficile l’identification de leur origine. Elle met également en évidence divers freins maintenant bien connus concernant l’approvisionnement en produits locaux des institutions. Alors que le Québec, avec la Stratégie nationale d’achat d’aliments québécois, cherche à encourager l’achat local dans les institutions, l’exemple australien vient rappeler que le manque de flexibilité et la préférence pour des bas prix constituent des obstacles majeurs à l'amélioration de l'approvisionnement local institutionnel. Il vient aussi rappeler que les efforts que peuvent faire les gestionnaires ne sont pas toujours reconnus à leur juste valeur par les usagers.
pdf N°26, fiche n°4 – avril – mai 2023
Fiche n°4, Bulletin n°26 – avril – mai 2023
Rédaction : Stevens Azima & Patrick MundlerCette veille bibliographique vous est offerte par le groupe de recherche Agriculture, territoires et développement de l’Université Laval avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.