De la ferme à la banque alimentaire

Aux États-Unis, les banques alimentaires desservent près de 46 millions de personnes par an - plus de la totalité de la population canadienne - à travers plus de 60 000 centres de distribution. Grossistes et détaillants sont encouragés à approvisionner les banques alimentaires par une règlementation visant à prévenir le gaspillage alimentaire et des incitatifs fiscaux pour encourager les dons à des organismes de charité. Mais qu'en est-il des fermes opérant en circuits courts ? Ces fermes obtiennent des prix généralement plus élevés pour leurs produits, les cantonnant ainsi à une clientèle cible plus aisée ne recoupant pas celle des banques alimentaires.

L'étude est basée sur une banque alimentaire du comté de Yolo en Californie. Cette région est majoritairement agricole, avec près de 1 000 fermes dont la taille médiane se situe entre 4 et 20 hectares. Le comté compte 10 % d'entreprises agricoles biologiques, comparativement à la moyenne nationale qui est de 1 % et 14 % des fermes du comté s'adonnent à la vente directe. Pourtant, la population de Yolo compte davantage de citoyens souffrant d'insécurité alimentaire (13.3 % en 2017) que la moyenne nationale de 12.5 %. La banque alimentaire de Yolo distribue plus de 1 500 tonnes d'aliments annuellement, dont 20 % proviennent de fermes locales. Une proportion de 65 % de ces fermes déclaraient avoir des pratiques biologiques ou écologiques, et 77 % donnaient des produits qui n'étaient pas initialement destinés aux banques alimentaires, c'est-à-dire des invendus ou des surplus. La totalité des agriculteurs qui ont donné à la banque alimentaire conçoivent ces dons comme étant une contribution positive à leur communauté. Seuls 33 % d'entre eux ont reçu une compensation monétaire pour leurs produits. Parmi ceux-ci, les propriétaires de plus petites fermes ont mentionné concevoir la banque alimentaire comme un canal de mise en marché améliorant leur résilience économique.

L'étude montre qu’une partie de l'approvisionnement des banques alimentaires par les fermes de proximité est possible même si le comté est un peu particulier du fait de la grande proportion de fermes biologiques. Les causes principales du choix des fermes de proximité de participer aux programmes caritatifs dépendent certes de leur sentiment de responsabilité sociale envers les plus démunis, mais aussi des crédits d'impôts offerts par le gouvernement et de la possibilité de mettre cette implication sociale en valeur auprès de leur clientèle.

Les enseignements 

Les recherches s’intéressant aux relations entre fermes de proximité et banques alimentaires ne sont pas nombreuses. Pourtant, cette recherche montre que les banques alimentaires peuvent être des acteurs importants des systèmes alimentaires locaux. Plutôt que de tenter d'aligner les intérêts des agriculteurs sur ceux des organismes de charité, les autrices suggèrent de concevoir l'accès à la nourriture comme un droit en renforçant le rôle de débouchés complémentaires que peuvent jouer les banques alimentaires pour les fermes locales.

pdf N°27, fiche n°5 – juin – juillet 2023

Fiche n°5, Bulletin n°27 –  juin – juillet 2023
Rédaction : Marilou Ethier, Pascal Genest-Richard, Patrick Mundler

Cette veille bibliographique vous est offerte par le groupe de recherche Agriculture, territoires et développement de l’Université Laval avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.