Secteur public et approvisionnement alimentaire durable

Les gouvernements et les institutions, comme acheteurs, représentent un gros joueur sur le marché des produits alimentaires. Et si on inclut les achats alimentaires des établissements du réseau de l’éducation, de la santé, de l’enseignement supérieur et des services sociaux, cela fait du secteur public un intermédiaire important entre les consommateurs et les producteurs. Le gouvernement québécois, sans doute conscient de la force de ce levier, a ainsi décidé d’adopter une stratégie nationale d’achats d’aliments québécois pour une alimentation locale dans les institutions publiques. Il n’est pas le seul. À l’heure où l’on se préoccupe de plus en plus d’une transition vers des systèmes de production plus durables, de nombreux pays dans le monde utilisent les achats des institutions publiques comme outils permettant de favoriser cette transition. La présente synthèse, qui se base sur un corpus de 103 articles publiés entre 2000 et 2020, identifie ce que ces vingt années de recherche nous ont appris sur le rôle des approvisionnements alimentaires du secteur public dans la promotion d’une agriculture et d’une alimentation plus durables. Parmi ces travaux, ceux qui ont été conduits en Europe ont tendance à s’attarder sur les aspects environnementaux de la question, alors qu’en Amérique l’aspect social (inclusion, santé) est davantage examiné. Dans tous les cas, le soutien à l’économie locale est un facteur important.

Dans l’ensemble, les travaux sur l’aspect environnemental de ces politiques tendent à mettre l’accent sur la réduction du gaspillage alimentaire et l’achat de produits alimentaires biologiques et de provenance locale (malgré les limites d’un indicateur basé sur la distance parcourue par les aliments). Il s’agit aussi de réduire l’empreinte carbone des achats alimentaires des institutions publiques et de privilégier les produits de saison. Pour l’impact social, l’attention est portée sur la qualité nutritionnelle des aliments, l’éveil des consommateurs à une alimentation plus éthique, surtout par les achats alimentaires des établissements d’enseignement. Enfin, sur le plan économique, l’intérêt de supporter les producteurs locaux et de leur assurer des conditions de vie décentes revient. Mais il est aussi question des achats institutionnels comme une opportunité d’affaire pouvant faire grandir les petites exploitations.

Les enseignements

Au fond, pas de surprise dans les raisons qui motivent les gouvernements à se servir de leurs achats pour améliorer la durabilité des systèmes alimentaires. On y retrouve les bénéfices habituels des achats de proximité. Il ne faut toutefois pas sous-estimer l’ampleur des changements qui se dessinent lorsque c’est par l’alimentation - et non par des politiques agricoles sectorielles - qu’est orientée l’évolution de l’agriculture. En outre, cette transformation des achats publics va de pair avec de nombreux apprentissages. Une bonne communication entre des parties prenantes peu habituées à se parler et connaissant mal leurs contraintes respectives est nécessaire. Toutes les recherches sur le sujet soulignent aussi la complexité de la chaine logistique à mettre en œuvre et la difficulté de gérer la variété des produits et l’addition de petits volumes. Dans ce contexte, de plus en plus de territoires testent de nouveaux outils comme des plateformes régionales permettant d’agréger l’offre et de l’acheminer. Un fourmillement d’initiatives qui fait des achats alimentaires publics un sujet d’actualité à suivre attentivement.

pdf N°19, fiche n°2 – septembre 2021 – février 2022

Fiche n°2, Bulletin n°19 – septembre 2021 – février 2022
Rédaction : Stevens Azima & Patrick Mundler

Cette veille bibliographique vous est offerte par le groupe de recherche Agriculture, territoires et développement de l’Université Laval avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.