note Note générale

4.15. Une coopération entre les CdP | Mémoire sur les communautés de pratique / résultats

ℹ️ Contexte
Cette note fait partie du carnet "La communauté de pratique comme stratégie de transfert de connaissances dans le champ de l’innovation sociale", un mémoire qui propose un regard critique sur le déploiement de la démarche Passerelles 1 (2018-2022) et qui vise à identifier les conditions de succès et les facteurs à considérer pour ce type particulier de communautés de pratique (CdP).
Table des matières | Résumé | Références

Wenger (2005) a théorisé les relations entre CdP ainsi que les chevauchements entre elles, permettant l’émergence de narrations communes, un enrichissement des dynamiques de collaboration, voire la création de sens nouveaux. Demers et Tremblay (2020) estiment même que les interstices entre CdP ont davantage de chances de générer de l’innovation radicale et de transformer en profondeur les pratiques. C’est en partie ces hypothèses qui ont influencé le design et le nom de la plateforme Passerelles.

Rappelons que sur Passerelles, les personnes font partie d’une ou de plusieurs CdP. Lorsqu’elles publient, elles peuvent restreindre la portée à une CdP ou l’élargir à plusieurs groupes dont elles font partie. Nous remarquons que cette fonctionnalité a surtout été utilisée pour de la veille ou la diffusion d’information avec des publications partagées dans plusieurs communautés thématiques et territoriales ; sur ce point, les CdP 1 et 2 (présentation des cas) ne faisaient pas exception.

On peut émettre l’hypothèse que les CdP 1 et 2 ont été davantage utilisées comme instrument de catégorisation en fonction des sujets abordés et des enjeux concernés.

Dans d’autres contextes, l’élargissement de la portée d’une publication s’est effectué d’une CdP privée vers une CdP thématique dans l’objectif de diffuser un contenu issu de groupe vers un public plus large. Ici, la diffusion élargie à plus d’une communauté peut être analysée comme une action de partage d’objets frontières. Ces éléments étaient par exemple des réflexions, des guides ou des invitations destinées à un public plus large. Si l’intention relevait davantage d’un effort de communication, ces objets pouvaient néanmoins ouvrir la porte à d’éventuelles créations de liens ou de coopérations.

Une autre fonction disponible sur la plateforme, de repartage de contenu, a quant à elle surtout été utilisée à partir d’une publication publique diffusée dans une communauté thématique pour être repartagée au sein d’une CdP privée. Ici, les espaces communs de veilles devenaient des sources susceptibles d’alimenter le travail des CdP privées. Dans ce cas, la co-existence de différentes communautés sur une même plateforme ne semble pas avoir permis de nouvelles collaborations ou de TC structuré, mais a plutôt contribué aux activités de veille et à la fluidité de la circulation des informations.

Il y a très peu de cas dans lesquels les outils disponibles ont été utilisés de pour permettre une collaboration ou même un partage d’information entre deux CdP privées. Certaines personnes faisant partie de plus d’une CdP ont pu apporter des informations d’un groupe à l’autre, mais ces passages étaient plus difficiles à suivre et à évaluer, puisqu’ils s’effectuaient d’une personne à l’autre dans des contextes plus ou moins formels et relativement fermés.

4.15.1. Espaces de chevauchement

Nous pouvons remarquer qu’à plusieurs égards, les communautés thématiques, comme les CdP 1 et 2, devenaient des intersections ou des espaces de chevauchement. En effet, c’est peut-être davantage en se croisant au sein d’espaces moins formels et dont les mandats sont plus larges que les membres de CdP privées pouvaient échanger, partager des informations et créer de nouvelles collaborations.

On pourrait ainsi émettre l’hypothèse que ces communautés constituaient en réalité des espaces de liaison et qu’elles permettaient de créer des ponts entre les CdP.

Si aucune collaboration directe n’a été observée entre les CdP 3, 4, 5 et 6, leurs membres respectifs étaient néanmoins susceptibles de se retrouver et de développer des relations au sein des communautés thématiques, dont les CdP 1 et 2. La CdP 2 semblait particulièrement présenter une intersection qui permet des points de jonction entre de nombreuses communautés, notamment en raison du caractère large et rassembleur de sa thématique. Si l’engagement y était plus faible, le potentiel de cette communauté ne doit pas être négligé pour autant, étant donné qu’un tel espace peut permettre des chevauchements entre plusieurs autres CdP.

Notons aussi que la communauté Passerelles, qui rassemblait l’ensemble des membres de la plateforme, pouvait être considérée comme l’intersection centrale de toutes les CdP. Si elle n’était pas conçue, considérée et animée de la sorte, on peut néanmoins supposer qu’elle présentait un tel potentiel.

Le besoin de créer des liens entre les CdP était souvent mentionné par les responsables de l’animation et par les membres. Par exemple, le champ ciblé par la veille dans la CdP 5 permettait de concentrer les efforts des membres sur des sujets bien ciblés autour d’un secteur donné. Cependant, certains de ces sujets demandaient une approche plus transversale et intersectorielle, qui pouvait se concrétiser avec des collaborations dépassant la CdP. Ce n’est donc pas le champ d’intervention, mais la problématique sociale traitée, vue sous un angle plus large, qui devenait le sujet d’intérêt commun et qui aurait pu éventuellement susciter l’engagement des membres.

La veille aurait parfois pu être plus fructueuse si elle avait été effectuée en collaboration étroite avec d’autres CdP présentes sur Passerelles et qui discutaient des mêmes sujets, par exemple le transport, l’habitation ou l’alimentation, même si elles l’abordaient selon différentes perspectives. Cela amène des questions intéressantes à étudier, notamment concernant la manière de déceler et de rendre visibles ces espaces collaborations, puis concernant les rôles liés à l’animation et à la documentation, les enjeux liés au langage commun et à la confiance, ainsi que les stratégies qui pourraient être mises en œuvre.